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Thèse présentée à la Faculté
des sciences de l'Université de Lyon
pour obtenir le grade de
Ingénieur-Docteur
par
Contribution
à l'étude des réactions catalytiques sur platine incandescent. Détermination de
la volatilisation du catalyseur à l'aide de platine radioactif
soutenue le 18 juin 1959
devant la commission d'examen
:
Prettre, M., président
Moussa, A., Eyraud, C., examinateurs
II est assez satisfaisant, pour un esprit qui craindrait
de voir se tarir les sources de son activité à cause du développement des
connaissances, de constater sans cesse combien de domaines immenses trouve à
défricher toute nouvelle acquisition de la science aussi bien que toute
réflexion, même en des régions depuis longtemps explorées.
En ce qui concerne 1'objet de la présente étude par exemple,
on peut, frappé par le volume de la production scientifique actuelle,
considérer comme déjà très anciens les premiers travaux sur l'activité
catalytique du platine.
Cependant.
si l'idée vint alors assez tôt d’un métal "porteur" d'oxygène ou d’hydrogène,
il fallut attendre près d'un siècle les remarquables travaux de I.LANGMUIR pour
donner à ce concept la précision nécessaire, par la mise en évidence, réalisée
dans des opérations à faible pression, des films monomoléculaires de gaz
chimisorbés à la surface du tungstène et du platine.
Seule
l’évolution de la physique du solide, en modifiant quelque peu par la suite nos
conceptions de l'état cristallin, fit progresser les idées de LANGMUIR jusque
l'actuelle théorie électronique de la catalyse par les métaux, dont
l'élaboration a connu ces dernières années un grand développement et provoqué
plusieurs mises au point récentes.
On pense
alors en particulier qu'un acte du processus catalytique d’oxydation sur
platine est la liaison de l’oxygène au métal par l'apport d'électrons du
premier à.la bande incomplète du réseau du second. Des mesures de
susceptibilité magnétique conduisent GRAY et McCAIN à suggérer la formation
d'un oxyde non stoechiométrique par ce mécanisme, entre 0 et 800°C.
La
molécule sujette à l'oxydation réagit avec ce complexe oxygène-métal, voire
elle-même après chimisorption. Cette théorie rend assez bien compte des aspects
de plusieurs réactions d'oxydation, en particulier celle du gaz tonnant, bien
que jusqu'à nos jours aucune étude n'ait été réalisée sur le processus
d'activation du catalyseur par le mélange combustible lui-même, pour savoir
s’il s'identifie avec la seule chimisorption de l’oxygène ou s'il en est
distinct.
Quoi
qu'il en soit, cette dernière devenant de moins en moins importante au fur et à
mesure que la température s'élève, le rendement de la combustion décroît alors.
Tout
autrement se déroule l'oxydation du méthane par l'air à la pression ordinaire
sur platine massif incandescent, qui est notre propos. DAVIES réalisa les
premières expériences sur ce système. Il caractérisait le taux de combustion
par la température, déterminée à partir de mesures de la résistance du
catalyseur que prenait ce dernier dans les différentes conditions de travail,
pour "une même" puissance électrique fournie. Notons tout de suite
qu’il admettait ainsi implicitement que toujours la même fraction de l'énergie
de la réaction était transférée au métal, ce qui n’est précisément pas le cas
ainsi que l'a montré DEVORE en tirant de cette observation le remarquable parti
que nous verrons plus loin.
Toutefois
l'importance du phénomène ne modifie pas de façon significative les résultats
de DAVIES, qui établit par son étude d'une part qu'aux faibles concentrations
en méthane une température d'au moins 800°C est nécessaire et qu'alors le
rendement croît avec la température, d'autre part qu'aux fortes concentrations
en méthane la réaction a lieu déjà en-dessous de 400°C et que le rendement
baisse quand la température s’élève.
Ce
comportement est encore plus apparent lorsque sont déterminés directement les
taux de combustion au grisoumètre et la température du catalyseur au
micropyromètre optique, comme dans les travaux de DOMANSKI. Ce dernier a même
pu ainsi tracer les courbes cinétiques du processus d'activation à différentes
températures, l'étude de divers facteurs de structure réalisée parallèlement ne
lui permettant cependant pas d'en donner une définition.
Ces
phénomènes ne s'opposent pas à l'hypothèse,proposée par DAVIES, d'un mécanisme
purement hétérogène débutant par la chimisorption des deux réactifs. Néanmoins
il n'est pas sûr qu'un film monomoléculaire d'oxygène puisse exister sur le
catalyseur aux températures où l'on opère dans le cas des faibles teneurs en
méthane.
De plus
la dissociation, connue depuis longtemps, de cette molécule au contact de fils
ou de rubans de platine fit également arguer contre l'hypothèse de DAVIES.
Effectivement la chimisorption d'un hydrocarbure saturé ne peut être que
dissociative, mais elle ne doit pas forcément être suivie de la désorption des
mêmes produits suivant qu'il ait existé ou non de l'oxygène à la surface du
métal.
En tous
cas les dernières considérations conduisent à penser que le méthane et
l'oxygène peuvent également subir au contact du catalyseur des transformations
qui les amènent ensuite sous des formes particulièrement réactives dans la
phase gazeuse, où s'achèverait alors le processus réactionnel. Un tel mécanisme
reçut le qualificatif "hétéro-homogène" lorsque POLYAKOV et ses collaborateurs
l'invoquèrent dans le cas de la réaction de combustion de l'hydrogène sur
platine, à partir de travaux de calorimétrie différentielle et de dosages d'eau
oxygénée.
En ce qui
concerne celle du méthane, C.EYRAUD, DOMANSKI et nous même accomplîmes les premières
recherches dans ce sens et pûmes déceler la présence de radicaux hydrocarbonés
et hydroxyles par spectrophotométrie de filaments de platine au cours de cette
oxydation catalytique.
DEVORE,
par l"étude du transfert d’énergie de la réaction au métal, démontra
l'existence du mécanisme hétéro-homogène en observant la part qui. s'en déroule
dans la phase gazeuse.
Si
l'existence d'un tel processus ne fait ainsi plus aucun doute, son analyse
détaillée reste un problème. L'étude des radicaux par spectrophotométrie
d'émission dans les domaines ultraviolet et infrarouge en est, nous l'avons vu,
un moyen d'investigation, Mais puisque leur point de départ est le catalyseur,
nous sommes amenés à étudier son comportement, cherchant quels rapports peuvent
avoir ses propriétés physiques et chimiques, dans les diverses conditions liées
à la combustion catalytique du méthane, tant avec le processus d'activation
qu'avec le déroulement ultérieur de la réaction.
Or, quand on chauffe du platine en présence d'oxygène, on manque rarement d'observer un dépôt sur les parties froides de l'appareil utilisé. Il ne faut donc pas s'étonner que le phénomène soit de notoriété fort ancienne dans la littérature, où l'on en relève l'indication dès 1852. NAHRWOLD fut le premier à s'y arrêter quelque peu, et trouva qu'il ne se produit ni dans une atmosphère d'hydrogène ni dans le vide.
HOLBORN, HENNING et AUSTIN étendirent ces investigations à
d'autres métaux de transition, et reconnurent que la présence de l'oxygène est
nécessaire pour que la volatilisation soit mesurable avec le platine, l'iridium
et le rhodium. HULETT et BERGER confirmèrent l'allure du phénomène, indiquèrent
que la température à laquelle il débute était voisine de 800°C, et suggérèrent
que l'étude des domaines d'existence de composés oxygénés du platine pourrait y
apporter d'importants éclaircissements.
En fait, l'évaporation du métal lui-même fut mesurée peu après, dans. un large domaine de températures, et il peut être intéressant de souligner que ce travail fut effectué par I. LANGMUIR. Les valeurs des pressions de vapeur qu'il obtint correspondent à la relation :
Log10 p = 9,88 - 27.370/T
p étant
exprimée en mm de mercure, T étant la température absolue.
Les calculs thermodynamiques et les relations
expérimentales basées sur des données ultérieures, dont celles de JONES,
LANGMUIR et MACKAY, conduisent à une expression assez voisine :
Log10 p = 9,63 - 27.500/T
et donnent
pour la vitesse d'évaporation W, exprimée en g/cm2/s la relation ;
Log10 W = 9,545 – 0,5 Log10 T - 27.500/T
d'où
résulte par exemple à la température de 1.200°C une vitesse d'évaporation de
0,4 mg/dm2/jour.
Les études de la volatilisation dans l'air à la pression
atmosphérique réalisées par thermogravimétrie donnent des chiffres beaucoup
plus élevés, bien que dépendant énormément des conditions opératoires. CARTER
et LINCOLN indiquent pour cette température de 1.200°C une perte de poids de
0,8 mg/ dm2/jour quand le chauffage est effectué en tube clos, et de
10 mg/ dm2/jour lorsqu'il a lieu en convection libre.
BURGESS
et VALTEKBERG en établissant un courant de gaz au-dessus de l'échantillon
arrivent à 20 mg/ dm2/jour. RAUB et PLATE, qui ont réalisé avec
beaucoup de soin des travaux portant sur plusieurs métaux nobles et leurs
alliages, obtiennent la valeur de 120 mg/ dm2/jour environ durant
les premières heures du traitement.
FRYBURG
et I.MURPHY ont préféré mesurer directement la quantité de platine volatilisé
par détermination, après mise en solution, du dépôt recueilli sur une paroi
froide. Ils indiquent 100 mg/dm2/j. sous 0,15 mm d'oxygène.
Si l'on
ajoute à cela que WOHLER trouvait non une perte mais une augmentation de poids,
on comprend, à l'examen des résultats, que l'existence d'au moins un oxyde
volatil du platine ait été invoquée pour en rendre compte. Cette explication
est d'ailleurs également, basée sur des dosages chimiques, et des études de
diffraction des rayons X et des électrons.
ROBERTS,
en comparant les pertes de poids du platine et la consommation en oxygène dans
un récipient à volume constant, trouve qu'elles sont dans les rapports
atomiques Pt/O dans l'air et Pt/2O dans l'oxygène. Il pense alors
être en présence dans le dernier cas de PtO2 et dans le premier d'un mélange de
Pt et PtO2. RIDEAL et JONES 'concluent aussi à PtO2 avec l'oxygène. CARTER et
RICHARDSON trouvent que la vitesse d'attaque du fîl platine à la pression
ordinaire est proportionnelle à PO2 et en concluent qu'il se volatilise sous
forme de PtO2 ou d'un mélange de PtO et PtO2.
Dans le
travail déjà cité de FRYBURG et MURPHY, la mise en solution du produit de la
volatilisation est effectuée par l'acide chlorhydrique concentré, et le dosage
réalisé par spectrophotométrie dans la bande d'absorption de l'ion PtCl6 est
celui de PtO2. Cependant C.DUVAL indique que cet oxyde "est insoluble dans
les acides chlorhydrique, nitrique et sulfurique, isolés ou en mélange".
Les
clichés de rayons X de collecteurs placés dans l'atmosphère corrosive ne
portent que les raies du métal. Par contre, la diffraction des électrons dans
les mêmes conditions indique la présence de PtO2. En fait la formation d'autres
oxydes de platine, par action de l'air à température suffisamment élevée, a été
mise en évidence par examen aux rayons X du métal attaqué. Ils ont révélé la
présence de PtO2 ou de Pt3O4. ARIYA pense même que ce dernier est le seul
stable Au surplus il n'est pas impossible que l'on découvre un jour dans ces
produits PtO3 connu par ailleurs.
Quant aux
domaines d'existence de ces divers composés, ils sont mal connus. Dans un
système où ils se forment et se volatilisent, il existe sans doute des régions
où ils se décomposent au moins partiellement, car on a caractérisé le métal
dans les dépôts sur les parois froides, et ces dépôts ne se dissolvent
totalement que dans l'eau régale.
Il peut
être intéressant de chercher quelles influences le mécanisme catalytique de
combustion du méthane peut avoir sur tous ces phénomènes, ou inversement
quelles étapes de ce processus ils sont susceptibles de déterminer, sans
omettre la possibilité d’une interaction plus complexe. En effet les événements
qui se déroulent à l'interface solide-gaz donnent lieu à des observations non
encore interprêtées, telles que les micrographies au microscope électronique de
DOMANSKI et Madame LENOIR. Ils doivent également jouer un rôle important dans
le mécanisme hétéro-homogène dont nous avons précédemment parlé, auquel
pourrait participer la dissociation d'oxydes instables atteignant, après avoir
quitté le catalyseur, des régions moins chaudes.
Nous
avons donc porté notre attention sur le platine qui passe dans la phase gazeuse
à partir de rubans de catalyseur préalablement radioactives. Il devient alors
possible de repérer le métal sur le trajet des gaz dans l'appareillage même où
s'effectue la réaction de combustion du méthane. Outre l'obtention de
renseignements d'ordre micromérormétrique que l'on peut tirer de telles
observations, il faut noter que la fraction de métal volatilisé en des temps
aussi courts que quelques minutes, comme ceux d'une activation catalytique par
exemple, est trop faible pour être connue par des mesures de la radioactivité
résiduelle du ruban. C'est après des chauffages de 45 minutes que CARTER et
RICHARDS ont pu faire de telles déterminations en étudiant, à l'aide du platine
197, la volatilisation d'oxydes et siliciures de platine, encore qu'ils ne
fournissent aucun détail sur les précautions nécessaires pour cette utilisation
de la méthode des traceurs, et dont nous parlons plus loin.
Nous
avons alors entrepris une étude comparative de la volatilisation du platine,
mesurée directement sur la phase gazeuse, d'une part dans l'air, d'autre part
dans les conditions de la réaction catalytique de combustion du méthane dans
l'air pour des teneurs faibles en hydrocarbure. Les conditions opératoires se
sont rapprochées autant que possible de celles qu'ont utilisées nos
prédécesseurs au Laboratoire de Chimie Industrielle de la Faculté des Sciences
de Lyon, où nous avons effectué ces recherches.
Parmi les
nombreuses techniques dont le concours est nécessaire pour étudier des
processus réactionnels complexes, l'utilisation des traceurs radioactifs a déjà
pris une place très importante. Il était donc intéressant de l'introduire dans
les recherches menées par l'équipe lyonnaise sur l'activité catalytique du
platine à haute température.
Nous
avons pu aborder de cette façon l'étude de sa volatilisation au cours de la
combustion catalytique du méthane dans l'air à la pression ordinaire, entre
1380 et 1510°C, minute par minute, au sein des gaz aussi bien que sur les
particules d’aérosol recueillies.
Nous
avons ainsi établi d'une part que ce phénomène est de deux à trois fois plus important
que la volatilisation dans l'air seul pour une même température de la surface
des rubans utilisés, d'autre part que la surface développée dans la phase
gazeuse par l'aérosol d'oxyde de platine est beaucoup plus grande que celle du
catalyseur massif.
Puisque
nos recherches se situent dans la zone de températures où les études
antécédentes ont mis en évidence un mécanisme hétéro-homogène, nous avons pu
préciser les hypothèses nécessaires à des investigations plus poussées sur sa
nature. Les particules volatilisées peuvent, dans les régions où leur
température est suffisante, soit favoriser une réaction hétérogène, soit jouer
le rôle d'initiateurs de chaînes dans un processus plus complexe.
Au cours
de la mise en oeuvre de nos techniques expérimentales, nous avons proposé pour
le 195mPt la période de 4 Jours, et pour le 194Pt la section efficace de
capture pour les neutrons de pile de 0,35 barn, valeurs différentes de celles
qui sont généralement proposées actuellement.
Outre les
intéressantes possibilités d'analyse et de contrôle analytique offertes par la
radioactivation pour les recherches présentées dans ce mémoire, nous voudrions
avoir montré que ces premières utilisations de la méthode des traceurs à
l'étude des combustions catalytiques sur platine incandescent ouvre l'accès,
dans ce domaine, à un vaste champ d'expériences que nous espérons continuer
d'explorer.
Mots clefs : activation / activité / air / atmosphère / catalyseur /
catalytique / combustion / complexe / conditions / diffraction / dissociation / dosage /
électron / étude / évaporation / expérience / hydrogène / langmuir / mécanisme / mélange / métal /
méthane / observation / oxydation / oxyde / oxygène / phénomène / platine / pression / processus /
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