Goris : TRAVAUX SCIENTIFIQUES
Site créé le 24 octobre 2004 Modifié le 10 janvier 2006
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Titres et travaux scientifiques

 

de

 

Albert Goris

Directeur honoraire de la pharmacie centrale des hôpitaux et hospices de Paris/Membre de l'Académie de Médecine/Professeur honoraire à la faculté de pharmacie de Paris

 

 

APERÇU GÉNÉRAL DES TRAVAUX SCIENTIFIQUES

 

J'ai débuté dans la carrière universitaire en 1899 comme Assistant de la chaire de Matière médicale, occupée alors par le professeur Planchon, puis par M. le professeur Perrot; aussi mes premières recherches furent-elles naturellement orientées vers l'anatomie microscopique appliquée à l'étude des matières premières d'origine végétale.

 

Mon activité scientifique devait également se diriger dans une autre voie.

 

Le professeur Planchon, convaincu de l'importance de la chimie pour la connaissance des plantes, m'avait engagé, dès mes débuts, à poursuivre des études théoriques de chimie, en vue de leur application à l'étude complète des végétaux.

 

La biologie a pris le développement que l'on connaît, en faisant surtout appel aux recherches physiques et chimiques. De statiques qu'elles furent au début, avec l'isolement, la caractérisation, le dosage des éléments minéraux et organiques, elles ne tardèrent pas à déborder dans l'étude du dynamisme cellulaire.

 

Les modifications, les migrations, la répartition, le rôle de ces composés, constituent des problèmes de biochimie végétale d'un intérêt captivant. Les systématiciens et les génétistes trouvent parfois dans les convergences et divergences chimiques rencontrées parmi les espèces végétales des appuis à leur système de classification comme à leurs expériences d'hybridation.

 

A ce point de vue, les recherches du regretté chanoine H. Colin sur les osides des Betteraves, des Iris et des Graminées ont apporté leur contribution à des questions du plus haut intérêt.

 

Des faits du même ordre, mais de moins grande importance, ont été rencontrés par nous dans le genre Aconitum.

 

Mon œuvre scientifique, anatomique et cytologique à son point de départ, s'est donc également orientée vers la biologie et la biochimie végétale, bien que toujours dominée par une même pensée.

 

J'ai même fait quelques incursions dans la biochimie microbienne, les bactéries ne pouvant être dissociées du monde végétal.

 

Mais je n'ai jamais cessé de m'intéresser aux recherches histologiques qui me sont très familières.

 

J'ai eu à utiliser ces connaissances en anatomie végétale, comme Chef des Travaux pratiques de Micrographie, au Laboratoire des fraudes pharmaceutiques et, particulièrement, au cours des vingt-cinq années pendant lesquelles, comme Assistant, puis Agrégé de la Chaire des matières premières d'origine végétale, j'ai eu à diriger les travaux de nombreux élèves en vue de l'obtention de Thèses de Doctorat en Pharmacie dont la plupart comportaient des sujets d'anatomie végétale.

 

Anatomie végétale.

La structure anatomique des racines tubérifiées d'Aconit, normale dans les types Napellus, Stœrckianum, Fischeri, m'a montré, dans les autres espèces du genre Aconitum, des anomalies bien curieuses du cylindre central par dislocation de la ligne cambiale.

 

Tantôt cette dernière se fragmente de chaque côté des faisceaux ligneux produisant des cylindres libéro-ligneux plongés dans un parenchyme conjonctif (types : Anthora, heterophyllum, palmatum), tantôt elle produit des diverticules qui, en s'affranchissant de la ligne cambiale normale, forment des cordons libéro-ligneux entourant le cylindre central primitif (types : uncinatum autumnale,japonicum).

 

Dans certains cas, la fragmentation se produit par l'apparition d'un cambium surnuméraire à la périphérie de la moelle qui, en se réunissant entre les faisceaux ligneux au cambium normal, isole des massifs libéro-ligneux plongés dans un parenchyme conjonctif (type : atrox).

 

Dans les types Lycoctonum, pyrenaïcum, c'est à l'apparition de deux assises subéreuses, l'une, dans le parenchyme cortical et l'autre à la périphérie de la moelle qu'est due la dissociation du cylindre libéro-ligneux central ; ces assises subéreuses se rejoignent entre les faisceaux ligneux et produisent des cordons libéro-ligneux isolés, donnant l'apparence d'une racine fibreuse.

 

Ces types basés sur l'anatomie des racines, correspondent aux groupes établis par de Candolle d'après la morphologie florale.

 

Bien plus, à chacun de ces types correspond une composition chimique particulière. Le groupe du type Anthora ne renferme que des alcaloïdes atoxiques (Anthorine, Atisine), alors que les autres possèdent, pour chaque groupe, des alcaloïdes différent d'une toxicité extrême (aconitine, japaconitine, pseudo-aconitine, lycoctonine).

 

Dans ce cas, l'anatomie et même la chimie apportent une confirmation aux déductions de la Systématique.

 

La racine tubérifiée du Scorodosma fœtidum Bunge, m'a montré une anomalie de structure de même formation que celle constatée pour le type A. uncinatum : production de diverticules de la ligne cambiale, qui s'isolent ensuite du cylindre central.

 

L'étude anatomique de la feuille des Anacardiacées, entreprise en vue d'apporter une contribution aux données de la Systématique, nous a montré que les caractères anatomiques concordaient avec la classification basée sur la morphologie florale.

 

Enfin, un travail d'anatomie descriptive sur les pailles à chapeaux de Madagascar, les fibres de vannerie et de sparterie de même origine géographique, a donné les caractéristiques de ces pailles et a permis de les comparer avec les plus belles pailles des « chapeaux de Panama ».

 

Cytologie végétale.

Aux confins de l'anatomie et de la chimie végétales, le chercheur< rencontre le problème de la localisation des principes immédiats chez les végétaux.

 

La question, à l'époque où je m'y arrêtai, venait d'être abordée par Errera et ses élèves.

 

Séduit par ces méthodes nouvelles, j'obtins d'aller travailler quelque temps auprès de ce Maître réputé, dont les études ont porté plus particulièrement sur la localisation des alcaloïdes.

 

Je me proposai dès lors de faire des recherches du même ordre sur les glucosides.<

 

La question était entièrement nouvelle et n'était pas sans présenter de réelles difficultés : en effet tandis qu'à tous les alcaloïdes convient une même méthode microchimique de localisation, aucune technique générale de précipitation ou de coloration n'était connue pour les glucosides.

 

Les résultats de ces recherches furent exposés dans ma thèse de doctorat es Sciences où j'étudiai la localisation de divers tanins et glucosides (daphnine, esculine, fraxine, fustine, salicine), dont j'ai pu suivre l'évolution au cours de la végétation dans les diverses parties de la plante.

 

Plus tard, j'eus l'occasion de localiser les principes de la Rhubarbe et ceux du Polygonum cuspidatum Sieb. et Zucc.

 

J'y montrai la présence simultanée du tanin et des principes anthraquinoniques dans les mêmes cellules.

 

Parmi mes élèves, M. Chemineau a fait l'application de ces nouvelles méthodes à la localisation de l'arbutine, des glucosides chromogène du Rubia tinctorum L., de la juglone et M. Ronceray à celle de Porcine dans les Lichens producteurs d'orseille.

 

Cette dernière réaction cytologique nous a conduit à une étude de biologie fort intéressante concernant la formation de la couleur «orseille» et, avec M. Arnould, à une étude de systématique nous permettant de séparer deux espèces affines du genre Russula.

 

Dès lors, familiarisé avec la question de localisation des alcaloïdes et des glucosides, j'ai rassemblé tous les documents la concernant et montré le rôle de ces substances chez les végétaux, dans ma thèse d'Agrégation et dans un ouvrage de 450 pages avec 30 planches coloriées, qui est une deuxième édition de ce travail, préfacée par M. Guignard.

 

L'intérêt, théorique, biologique et pratique de ce problème ne saurait être mis en doute.

 

Localiser, extraire, définir un glucoside ou un alcaloïde, c'est déjà enrichir la Science de faits originaux, mais ceux-ci ne prennent toute leur valeur que par l'essai de synthèse qu'on peut faire des notions acquises.

 

On ne saurait, à l'heure actuelle, qu'entrevoir la réponse à cette question. Quelle est la signification des alcaloïdes et des glucosides chez les végétaux ?

 

Cela suppose en effet, outre la connaissance de leur localisation, celle de leurs variations quantitatives, de leurs migrations, journalières ou saisonnières et avant tout celle de leur structure moléculaire.

 

Dans mon ouvrage d'ensemble, je me suis efforcé de grouper les connaissances touchant ces différents points de vue, travail important de bibliographie et de mise au point éminemment utile à ceux qui tenteront de nouvelles recherches.

 

J'ai fait suivre cet exposé des faits, d'une discussion des hypothèses auxquelles ils ont donné naissance et j'ai proposé une conception personnelle de leur interprétation.

 

Ce que l'on sait actuellement des glucosides m'a conduit à les considérer comme une forme de mobilisation des déchets de l'activité cellulaire.

 

La partie hydrocarbonée de la molécule aurait pour rôle de solubiliser, de convoyer les résidus nocifs ou pour le moins inutilisables par la plante.

 

Le phénomène serait alors comparable à celui que l'on observe dans l'organisme animal, où les sub-stances toxiques, telles que les phénols, alcools, etc. sont éliminées sous forme de glucosides particuliers, chez lesquels la molécule hydrocarbonée est représentée par l'acide glycuronique.

 

Il est plus difficile de concevoir la signification biologique des alcaloïdes; aucune des hypothèses qui s'y rapportent ne suffit à expliquer la majorité des faits. Mais il semble que tous les auteurs se rallient maintenant à la conception de l'alcaloïde-déchet, opinion que j'ai toujours envisagée comme la plus rationnelle.

 

Biologie et biochimie végétales.

A la suite des résultats obtenus en localisant certains principes immédiats et en recherchant les rapports qu'ils présentent entre eux, je fus nécessairement amené à tenter l'extraction et l'étude des principes constituants des végétaux.

 

Ces travaux m'ont permis, soit de préciser des faits antérieurement connus, soit de caractériser chez des végétaux des principes à peine soupçonnés, soit enfin de découvrir des principes entièrement nouveaux.

 

Enfin, convaincu qu'aucun progrès sérieux n'est possible en physiologie végétale si l'on se borne uniquement à l'extraction et à la caractérisation des principes immédiats, j'ai tenté, avec plus ou moins de succès, d'établir la constitution des principes que j'avais découverts, et leur transformation sous des actions biologiques.

 

Dans quelques cas, j'ai pu préciser ou corriger les résultats obtenus antérieurement par d'autres auteurs : il en est ainsi de mes recherches sur les alcaloïdes de la Valériane, sur la nupharine, sur les cholestérines des Champignons, etc.

 

Dans d'autres cas, j'ai caractérisé chez certaines plantes divers principes signalés chez d'autres végétaux, ou, fait plus intéressant, chez les animaux.

 

Le plus important des résultats obtenus dans cet ordre de recherches fut la découverte de l’urée chez les Champignons.

 

L'urée y avait été signalée — occasionnellement pourrait-on dire — par Bamberger.

 

La rencontre de l'urée chez les Champignons me surprit tout d'abord. Je vérifiai soigneusement le cas plusieurs années de suite avant de le publier.

 

C'était, sans contredit, un fait des plus intéressants que la formation de ce composé chez un végétal, car il était jusqu'alors considéré uniquement comme un principe d'excrétion animale. Aussi ai-je fait de nombreux essais pour trouver de l'urée dans diverses espèces de Champignons et dans les plantules des Phanérogames (Lupin).

 

Rigoureusement démontrée pour deux espèces de Champignons, la présence de l'urée n'avait pu être, à cette époque, aussi formellement caractérisée chez les phanérogames.

 

Les techniques alors à ma disposition n'étaient pas suffisamment sensibles pour me permettre la mise en évidence dans tous les cas.

 

Depuis, on sait comment Fosse, grâce à un procédé très précis de recherche et de dosage de l'urée, a pu généraliser cette importante observation.

 

Reprenant alors cette étude, j'ai trouvé et dosé l'urée chez un certain nombre de Champignons supérieurs et en ai étudié la répartition suivant la nature des espèces, l'âge ou la nature des tissus.

 

A côté de l'urée, se trouve le ferment Uréase.

 

Le mode d'action de l'Uréase a particulièrement retenu mon attention et j'ai déterminé les variations d'activité de ce ferment, sous l'influence de différents facteurs : température, acides bases, sels, etc.

*

* *

J'ai isolé des végétaux plusieurs composés entièrement nouveaux.

 

Ce fut d'abord la kolatine-caféine, extraite de la noix de Kola fraîche, puis la kolatine et la kolatéine, ces deux derniers composés appartenant au groupe des catéchines.

 

L'étude de ces corps, comme celle des tannoïdes en général, est extrêmement difficile ; j'ai pu cependant donner leurs principaux caractères, montrer leurs relations avec la caféine et l'importance de ces faits au point de vue pharmacodynamique.

 

Ces recherches sur la Kola. fraîche ont été le point de départ d'importantes applications : la stabilisation des végétaux que nous exposons plus loin.

 

De la racine de Tormentille, j'ai retiré le tormentol, corps dont, sans en montrer complètement la constitution, j'ai établi qu'il est à la fois ester et alcool.

 

Dans l'étude biochimique du Primula officinalis L., j'ai obtenu des résultats absolument complets.

 

J'ai d'abord montré qu'il existait dans la racine du P. officinalis des principes hétérosidiques non dédoublables par l'émulsine, mais dédoublables par un ferment spécifique, la primevérosidase dont j'ai établi la répartition et la localisation chez les Primulacées.

 

Ensuite, j'ai extrait ces principes hétérosidiques, primevéroside et primulavéroside et déterminé la constitution chimique complète de l'une et de l'autre.

 

Le premier donne, par dédoublement, l'ester méthylique de l'acide 2-hydroxy-4 méthoxybenzoïque et le primevérose.

 

Le second, l'ester méthylique de l'acide 2-hydroxy-5 méthoxybenzoïque et le primevérose.

 

L'essence de Primevère est un mélange des deux esters précédents avec une petite quantité de cétone, non déterminée en raison de la trop faible portion obtenue.

 

La constitution du Primevérose bioside jusqu'alors inconnu a été établie. Il est formé de l'union d'une molécule de d. glucose et d'une molécule de xylose.

 

La découverte de ce sucre, de structure si spéciale, constitue un fait nouveau d'autant plus important que ce biose fait partie d'un grand nombre d'hétérosides découverts depuis (monotropitoside, gentiacauloside, rhamnicoside, rubérythroside).

 

Ainsi, les deux hétérosides que j'ai isolés de la Primevère appartiennent au groupe des hétérosides, très peu nombreux, dont on connaît parfaitement la structure chimique de la partie hydrocarbonée comme de la portion aglycone de la molécule.

 

Avec M. Canal, nous avons étudié la composition d'autres essences de racines de Primevères dont la constitution est tout à fait différente.

 

Des fruits verts ou stabilisés de Vanille, j'ai pu isoler plusieurs hétérosides dont le vanilloside (glucovanilline) qui n'avait été obtenu jusqu'alors que par des méthodes synthétiques.

 

J'ai montré< que le parfum de la Vanille, si fin et si différent de celui de la vanilline, est dû à un autre hétéroside se dédoublant en un ester, produit jaune huileux, à odeur très agréable.

 

Cette origine — longtemps controversée — du parfum si délicat de la Vanille, très différent de celui de la vanilline, se trouve ainsi élucidée par l'obtention et la connaissance de la constitution des hétérosides générateurs d'odeur.

 

C'est bien par une action biochimique que se forment ces corps odorants, mais l'isolement de< tous ces principes infirme l'hypothèse faisant dériver la vanilline de la coniférine par une action fermentaire oxydante, suivie d'une action fermentaire hydratante.

 

La réalité est beaucoup plus simple.

 

J'ai montré également qu'il existe dans la Vanille des hétérosides donnant, par dédoublement fermentaire, l'alcool vanillique et l'aldéhyde protocatéchique, 1,3,4 n'intervenant pas dans la formation du parfum.

 

Avec M. Canal, nous avons fait de longues recherches sur la composition chimique des bourgeons du Populus balsamifera L. Nous en avons retiré dix-huit corps organiques ; presque tous sont déjà signalés dans les végétaux, mais l'un est entièrement nouveau.

 

C'est une chalcone dont nous avons établi et confirmé la formule par la synthèse ; c'est le 2’6'-dihydro-4’ méthoxy-b-propiophénone.

 

Biochimie microbienne.

J'ai consacré de patientes et pénibles recherches à l'étude de la composition chimique du Bacille tuberculeux.

 

J'y ai surtout étudié les substances lipidiques parmi lesquelles un principe entièrement nouveau, l’Hyalinol, dont je décris plus loin les curieuses propriétés.

 

J'ai repris aussi l'étude de la composition minérale du bacille et celle de la question si controversée de son acido-résistance ; celle-ci doit être rapportée, selon moi, aux acides gras libres, à la cire et surtout au Mykol, alcool constitutif de cette cire.

 

J'ai pu en outre extraire du bacille dégraissé une nucléo-albumine qui possède les propriétés atténuées de la tuberculine.

 

On poursuit l'étude de ce corps car il n'est pas douteux que l'obtention d'un produit chimiquement défini, agissant comme la tuberculine, constituerait un réel progrès.

 

Les tuberculines employées actuellement sont, le plus souvent, obtenues par précipitation, avec l'alcool, d'un milieu de culture sur bouillon du bacille tuberculeux.

 

La proportion de tuberculine fixée sur ce précipité de matières albuminoïdes est très variable et, par suite, l'activité du produit n'est pas constante.

 

Un principe défini, pondérable, ne présenterait pas les mêmes inconvénients et la médecine ne pourrait que gagner à utiliser comme agent thérapeutique ou réactif biologique, un produit d'action toujours comparable.

 

Avec M. Liot, nous avons étudié la nutrition azotée du Bacille pyocyanique cultivé sur un milieu artificiel défini.

 

Après avoir contrôlé que les sels ammoniacaux des acides organiques mono ou bibasiques étaient de bons aliments, j'ai montré que c'était le contraire pour les acides aminés employés seuls.

 

Par contre, additionnés d'un hydrate de carbone ils sont susceptibles de donner< de la pyocyanine. La fonction aminé n'intervient dans la nutrition que lorsqu'elle a été transformée en fonction sel ammoniacal par un processus tout à fait particulier.

*

* *

Recherches scientifiques sur des questions techniques.

Mes fonctions hospitalières m'ont conduit à aborder des questions importantes de technique pharmaceutique : La culture des plantes médicinales.

 

La stabilisation des végétaux. La préparation des Catguts. L'étude et l'essai de diverses préparations pharmaceutiques.

 

J'ai fait de grands efforts pour encourager la culture des plantes médicinales.

 

Mes observations sont consignées dans un petit volume, écrit en collaboration avec M. Demilly.

 

La récolte des simples, considérée comme la première des opérations pharmaceutiques, à la fois par ordre chronologique et par son importance, était autrefois l'objet des plus grands soins de la part des pharmaciens ; peu à peu elle fut délaissée et abandonnée à des gens plus ou moins expérimentés.

 

L'industriel doit, dans la mesure du possible, cultiver lui-même les plantes nécessaires à son industrie. C'est par là seulement qu'il se mettra à l'abri des erreurs dues à la négligence ou à l'ignorance des récolteurs, des inconvénients d'une dessiccation trop rapide et mal surveillée ; c'est de cette façon aussi qu'il pourra se procurer d'une année à l'autre des plantes de composition chimique semblable, donc d'activité thérapeutique comparable.

 

C'est là toute une évolution, conséquence inévitable de la centralisation de l'industrie pharmaceutique.

 

Ces industries, avec la culture des plantes qui y sera annexée, deviendront de véritables industries agricoles.

 

Mes recherches de microchimie et plus spécialement celles sur le Quinquina et la Kola, celles concernant l'extraction des hétérosides de la Vanille, des Primevères, m'avaient montré que tanins, glucosides et alcaloïdes existent souvent dans les mêmes cellules et qu'ils forment ensemble des complexes dont les propriétés ne sont presque jamais celles de leurs constituants.

 

Pendant la dessiccation, au cours de l'agonie du végétal, aussitôt que se produit le phénomène de déséquilibre qu'est la mort, ces combinaisons sont détruites sous l'influence des diastases.

 

Dès lors il devait être utile, indispensable même, de les fixer afin de pouvoir les extraire ensuite sous la forme même où elles se présentent chez les êtres vivants.

 

Bourquelot, pour caractériser ou extraire les glucosides, traitait par l'alcool bouillant les plantes recueillies; mais on ne peut ainsi obtenir que des extraits alcooliques.

 

Nous avons pensé, avec M. le Prof. Perrot, que le même but serait atteint en soumettant les organes des végétaux dans l'autoclave à l'action des vapeurs d'alcool, ou même, lorsque la consistance de la drogue est plus compacte, à celle de la vapeur d'eau.

 

Au sortir de l'appareil, on obtient par une simple dessiccation une matière première stable, qui peut, par la suite, être soumise à tous traitements utiles.

 

La composition chimique de la plante stabilisée ainsi obtenue ne présente guère de différence avec celle de la plante fraîche.

 

La Kola dont j'ai pu extraire, après stabilisation, le composé kolatine-caféine qui n'existe plus dans la noix sèche, en est un exemple démonstratif.

 

Est-ce à dire que l'on doive dans l'avenir avoir toujours recours à la stabilisation des plantes médicinales, de préférence à tout autre traitement ? Ce n'est pas là notre pensée.

 

Pour chacune des plantes médicinales, il sera bon de comparer chimiquement, physiologiquement et cliniquement, la préparation stabilisée aux préparations faites dans les conditions ordinaires.

 

Le Codex de 1937 a admis le principe de la stabilisation et a inscrit les préparations de plantes stabilisées concurremment avec celles de plantes traitées par les méthodes habituelles.

 

On retiendra toutefois qu'il est avantageux, pour beaucoup d'entre elles, d'avoir recours à la stabilisation.

 

Chargé, pendant la guerre de 1914, par le Service de Santé de l'Armée, du contrôle puis de la fabrication des ligatures chirurgicales, j'ai très vite constaté que, dans ce domaine, la recherche scientifique n'avait pas toujours suffisamment guidé la pratique industrielle.

 

L'étude anatomique de l'intestin du mouton m'a permis de relever une erreur devenue classique, sur l'origine de la corde à boyau.

 

J'ai montré la nécessité de supprimer la macération initiale des boyaux, cause de toutes les difficultés rencontrées au cours de la stérilisation.

 

Je suis parvenu à faire préparer de la corde chirurgicale par d'autres méthodes que celles employées pour les cordes destinées à des usages non médicaux.

 

J'ai montré dans quelles conditions on pouvait préparer, avec une sécurité parfaite, le catgut chirurgical et j'ai indiqué une méthode de contrôle, vérifiée par plus de 60 000 ensemencements.

 

Les essais et la conservation des médicaments ont forcément dû retenir mon attention.

 

Ces études ont trait à des préparations issues de matières premières végétales suivantes : Aconit, Belladone, Ergot de seigle, Fougère mâle, Noix vomique, Opium, Quinquina ; ou d'alcaloïdes : aco-nitine, héroïne, novocaïne, morphine.

 

Malgré leur importance technique, je ne crois pas devoir en faire ici plus largement état ; je rappellerai toutefois qu'elles m'ont valu d'être désigné comme expert près de la Section d'Hygiène de la Société des Nations.

 

Depuis 1908, j'ai assumé un enseignement à la Faculté de Pharmacie, soit comme Chef des Travaux pratiques de Botanique, comme Agrégé et comme Professeur.

 

Au cours de mon enseignement je me suis attaché à faire des leçons construites sur un fond solide de faits scientifiques.

 

Je me suis efforcé d'intéresser l'esprit des élèves en leur montrant, d'une part la solidarité des faits ou des notions purement scientifiques et des applications pharmaceutiques, et, d'autre part, comment celles-ci sont conditionnées par les précédentes.

 

J'ai eu la satisfaction de voir le cours suivi assidûment et régulièrement sans que diminue le nombre des auditeurs.

 

La publication de ce cours : «La Pharmacie galénique», a eu le plus grand succès près des étudiants et du Corps pharmaceutique; édité en 1937, il a été réédité en 1942 et déjà il faut prévoir une 3e édition.

 

J'ai eu à diriger des jeunes gens qui, sans vouloir consacrer leur vie à la science, désiraient accorder quelque temps à la recherche scientifique.

 

A ces jeunes gens, je me suis efforcé de donner toute l'aide qu'il m'était possible et le plus souvent les ai associés à mes travaux, ainsi que le montre l'exposé des publications faites en commun.

 

Pour d'autres, désireux de travailler seuls, j'ai toujours pris grand soin de ne pas les rebuter en leur imposant une direction donnée, mais de respecter leurs tendances personnelles.

 

Dans le vaste domaine des Sciences, tous ne s'intéressent pas également au même chapitre de Biologie végétale.

 

Au lieu d'imposer toujours le même type d'étude, j'ai laissé à chaque élève le soin de choisir un sujet conforme à ses goûts. Je me suis au besoin parfois écarté de mon propre chemin pour suivre ses recherches, afin de pouvoir le guider dans l'établissement de la méthode de travail et dans l'application des techniques propres au sujet choisi.

 

Dans ces conditions, la thèse ne devient pas un travail fastidieux dont on s'acquitte sans enthousiasme pour acquérir le titre désiré.

 

L'élève dont on a respecté l'initiative conservera le travail achevé, le goût de la recherche ; il continuera à s'intéresser au progrès scientifique ; parfois, malgré l'éloignement de l'Université, il dérobera quelques heures aux occupations professionnelles pour continuer un travail commencé à l'occasion d'une thèse. Il conservera l'amour et le respect de la Science, il continuera parfois à la servir, mais surtout, il gardera toujours la conscience scientifique que nous avons voulu développer en lui.




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