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Titres et travaux scientifiques
de
Directeur honoraire de la
pharmacie centrale des hôpitaux et hospices de Paris/Membre de l'Académie de
Médecine/Professeur honoraire à la faculté de pharmacie de Paris
APERÇU GÉNÉRAL DES TRAVAUX
SCIENTIFIQUES
J'ai débuté dans la carrière universitaire en 1899 comme
Assistant de la chaire de Matière médicale, occupée alors par le professeur
Planchon, puis par M. le professeur Perrot; aussi mes premières recherches
furent-elles naturellement orientées vers l'anatomie microscopique appliquée à
l'étude des matières premières d'origine végétale.
Mon activité scientifique devait également se diriger dans
une autre voie.
Le professeur Planchon, convaincu de l'importance de la chimie
pour la connaissance des plantes, m'avait engagé, dès mes débuts, à poursuivre des
études théoriques de chimie, en vue de leur application à l'étude complète des
végétaux.
La biologie a pris le développement que l'on connaît, en
faisant surtout appel aux recherches physiques et chimiques. De statiques
qu'elles furent au début, avec l'isolement, la caractérisation, le dosage des
éléments minéraux et organiques, elles ne tardèrent pas à déborder dans l'étude du dynamisme
cellulaire.
Les modifications, les migrations, la répartition, le rôle
de ces composés, constituent des problèmes de biochimie végétale d'un intérêt
captivant. Les systématiciens et les génétistes trouvent parfois dans les
convergences et divergences chimiques rencontrées parmi les espèces végétales
des appuis
à leur système de classification comme à leurs expériences d'hybridation.
A ce point de vue, les recherches du regretté chanoine H.
Colin sur les osides des Betteraves, des Iris et des Graminées ont apporté leur
contribution à des questions du plus haut intérêt.
Des faits du même ordre, mais de moins grande importance,
ont été rencontrés par nous dans le genre Aconitum.
Mon œuvre scientifique, anatomique et cytologique à son
point de départ, s'est donc également orientée vers la biologie et la biochimie
végétale, bien que toujours dominée par une même pensée.
J'ai même fait quelques incursions dans la biochimie
microbienne, les bactéries ne pouvant être dissociées du monde végétal.
Mais je n'ai jamais cessé de m'intéresser aux recherches
histologiques qui me sont très familières.
J'ai eu à utiliser ces connaissances en anatomie végétale,
comme Chef des Travaux pratiques de Micrographie, au Laboratoire des fraudes
pharmaceutiques et, particulièrement, au cours des vingt-cinq années pendant
lesquelles, comme Assistant, puis Agrégé de la Chaire des matières premières
d'origine végétale, j'ai eu à diriger les travaux de nombreux élèves en vue de
l'obtention de Thèses de Doctorat en Pharmacie dont la plupart comportaient des
sujets d'anatomie végétale.
Anatomie végétale.
La structure anatomique des racines tubérifiées d'Aconit,
normale dans les types Napellus, Stœrckianum, Fischeri, m'a montré,
dans les autres espèces du genre Aconitum, des anomalies bien curieuses
du cylindre central par dislocation de la ligne cambiale.
Tantôt cette dernière se fragmente de chaque côté des
faisceaux ligneux produisant des cylindres libéro-ligneux plongés dans un parenchyme
conjonctif (types : Anthora, heterophyllum, palmatum), tantôt elle produit
des diverticules qui, en s'affranchissant de la ligne cambiale normale, forment des cordons
libéro-ligneux entourant le cylindre central primitif (types : uncinatum
autumnale,japonicum).
Dans certains cas, la fragmentation se produit par
l'apparition d'un cambium surnuméraire à la périphérie de la moelle qui, en se
réunissant entre les faisceaux ligneux au cambium normal, isole des massifs
libéro-ligneux plongés dans un parenchyme conjonctif (type : atrox).
Dans les types Lycoctonum, pyrenaïcum, c'est à
l'apparition de deux assises subéreuses, l'une, dans le parenchyme cortical et
l'autre à la périphérie de la moelle qu'est due la dissociation du cylindre
libéro-ligneux central ; ces assises subéreuses se rejoignent entre les
faisceaux ligneux et produisent des cordons libéro-ligneux isolés, donnant
l'apparence d'une racine fibreuse.
Ces types basés sur l'anatomie des racines, correspondent
aux groupes établis par de Candolle d'après la morphologie florale.
Bien plus, à chacun de ces types correspond une composition
chimique particulière. Le groupe du type Anthora ne renferme que des
alcaloïdes atoxiques (Anthorine, Atisine), alors que les autres possèdent,
pour chaque groupe, des alcaloïdes différent d'une toxicité extrême
(aconitine, japaconitine, pseudo-aconitine, lycoctonine).
Dans ce cas, l'anatomie et même la chimie apportent une
confirmation aux déductions de la Systématique.
La racine tubérifiée du Scorodosma fœtidum Bunge, m'a
montré une anomalie de structure de même formation que celle constatée pour
le type A. uncinatum : production de diverticules de la ligne cambiale,
qui s'isolent ensuite du cylindre central.
L'étude anatomique de la feuille des Anacardiacées,
entreprise en vue d'apporter une contribution aux données de la Systématique,
nous a montré que les caractères anatomiques concordaient avec la
classification basée sur la morphologie florale.
Enfin, un travail d'anatomie descriptive sur les pailles à
chapeaux de Madagascar, les fibres de vannerie et de sparterie de même origine géographique,
a donné les caractéristiques de ces pailles et a permis de les comparer avec les plus
belles pailles des « chapeaux de Panama ».
Cytologie végétale.
Aux confins de l'anatomie et de la chimie végétales, le
chercheur< rencontre le problème de la localisation des principes immédiats
chez les végétaux.
La question, à l'époque où je m'y arrêtai, venait d'être
abordée par Errera et ses élèves.
Séduit par ces méthodes nouvelles, j'obtins d'aller travailler
quelque temps auprès de ce Maître réputé, dont les études ont porté plus
particulièrement sur la localisation des alcaloïdes.
Je me proposai dès lors de faire des recherches du même
ordre sur les glucosides.<
La question était entièrement nouvelle et n'était pas sans
présenter de réelles difficultés : en effet tandis qu'à tous les alcaloïdes
convient une même méthode microchimique de localisation, aucune technique
générale de précipitation ou de coloration n'était connue pour les glucosides.
Les résultats de ces recherches furent exposés dans ma thèse
de doctorat es Sciences où j'étudiai la localisation de divers tanins et
glucosides (daphnine, esculine, fraxine, fustine, salicine), dont j'ai pu suivre
l'évolution au cours de la végétation dans les diverses parties de la plante.
Plus tard, j'eus l'occasion de localiser les principes de
la Rhubarbe et ceux du Polygonum cuspidatum Sieb. et Zucc.
J'y montrai la présence simultanée du tanin et des principes
anthraquinoniques dans les mêmes cellules.
Parmi mes élèves, M. Chemineau a fait l'application de ces
nouvelles méthodes à la localisation de l'arbutine, des glucosides chromogène
du Rubia tinctorum L., de la juglone et M. Ronceray à celle de
Porcine dans les Lichens producteurs d'orseille.
Cette dernière réaction cytologique nous a conduit à une
étude de biologie fort intéressante concernant la formation de la couleur
«orseille» et, avec M. Arnould, à une étude de systématique nous permettant
de séparer deux espèces affines du genre Russula.
Dès lors, familiarisé avec la question de localisation des
alcaloïdes et des glucosides, j'ai rassemblé tous les documents la concernant et
montré le rôle de ces substances chez les végétaux, dans ma thèse
d'Agrégation et dans un ouvrage de 450 pages avec 30 planches coloriées, qui
est une deuxième édition de ce travail, préfacée par M. Guignard.
L'intérêt, théorique, biologique et pratique de ce problème
ne saurait être mis en doute.
Localiser, extraire, définir un glucoside ou un alcaloïde, c'est déjà
enrichir la Science de faits originaux, mais ceux-ci ne prennent toute leur valeur que
par l'essai de synthèse qu'on peut faire des notions acquises.
On ne saurait, à l'heure actuelle, qu'entrevoir la réponse à
cette question. Quelle est la signification des alcaloïdes et des glucosides
chez les végétaux ?
Cela suppose en effet, outre la connaissance de leur
localisation, celle de leurs variations quantitatives, de leurs migrations,
journalières ou saisonnières et avant tout celle de leur structure moléculaire.
Dans mon ouvrage d'ensemble, je me suis efforcé de grouper
les connaissances touchant ces différents points de vue, travail important de bibliographie
et de mise au point éminemment utile à ceux qui tenteront de nouvelles
recherches.
J'ai fait suivre cet exposé des faits, d'une discussion des hypothèses
auxquelles ils ont donné naissance et j'ai proposé une conception personnelle
de leur
interprétation.
Ce que l'on sait actuellement des glucosides m'a conduit à
les considérer comme une forme de mobilisation des déchets de l'activité
cellulaire.
La partie hydrocarbonée de la molécule aurait pour rôle de
solubiliser, de convoyer les résidus nocifs ou pour le moins inutilisables par
la plante.
Le phénomène serait alors comparable à celui que l'on observe
dans l'organisme animal, où les sub-stances toxiques, telles que les phénols,
alcools, etc. sont éliminées sous forme de glucosides particuliers, chez
lesquels la molécule hydrocarbonée est représentée par l'acide glycuronique.
Il est plus difficile de concevoir la signification
biologique des alcaloïdes; aucune des hypothèses qui s'y rapportent ne suffit à
expliquer la majorité des faits. Mais il semble que tous les auteurs se
rallient maintenant à la conception de l'alcaloïde-déchet, opinion que j'ai
toujours envisagée comme la plus rationnelle.
Biologie et biochimie végétales.
A la suite des résultats obtenus en localisant certains principes
immédiats et en recherchant les rapports qu'ils présentent entre eux, je fus
nécessairement amené à tenter l'extraction et l'étude des principes constituants
des végétaux.
Ces travaux m'ont permis, soit de préciser des faits
antérieurement connus, soit de caractériser chez des végétaux des principes à peine
soupçonnés, soit enfin de découvrir des principes entièrement nouveaux.
Enfin, convaincu qu'aucun progrès sérieux n'est possible en
physiologie végétale si l'on se borne uniquement à l'extraction et à la
caractérisation des principes immédiats, j'ai tenté, avec plus ou moins de succès,
d'établir la constitution des principes que j'avais découverts, et leur
transformation sous des actions biologiques.
Dans quelques cas, j'ai pu préciser ou corriger les
résultats obtenus antérieurement par d'autres auteurs : il en est ainsi de mes
recherches sur les alcaloïdes de la Valériane, sur la nupharine, sur les cholestérines des
Champignons, etc.
Dans d'autres cas, j'ai caractérisé chez certaines plantes
divers principes signalés chez d'autres végétaux, ou, fait plus intéressant, chez
les animaux.
Le plus important des résultats obtenus dans cet ordre de
recherches fut la découverte de l’urée chez les Champignons.
L'urée y avait été signalée — occasionnellement pourrait-on
dire — par Bamberger.
La rencontre de l'urée chez les Champignons me surprit tout
d'abord. Je vérifiai soigneusement le cas plusieurs années de suite avant de le
publier.
C'était, sans contredit, un fait des plus intéressants que la formation de
ce composé chez un végétal, car il était jusqu'alors considéré uniquement comme un principe
d'excrétion animale. Aussi ai-je fait de nombreux essais pour trouver de l'urée
dans diverses
espèces de Champignons et dans les plantules des Phanérogames (Lupin).
Rigoureusement démontrée pour deux espèces de Champignons,
la présence de l'urée n'avait pu être, à cette époque, aussi formellement
caractérisée chez les phanérogames.
Les techniques alors à ma disposition n'étaient pas
suffisamment sensibles pour me permettre la mise en évidence dans tous les cas.
Depuis, on sait comment Fosse, grâce à un procédé très
précis de recherche et de dosage de l'urée, a pu généraliser cette importante
observation.
Reprenant alors cette étude, j'ai trouvé et dosé l'urée chez
un certain nombre de Champignons supérieurs et en ai étudié la répartition
suivant la nature des espèces, l'âge ou la nature des tissus.
A côté de l'urée, se trouve le ferment Uréase.
Le mode d'action de l'Uréase a particulièrement retenu mon
attention et j'ai déterminé les variations d'activité de ce ferment, sous l'influence de
différents facteurs : température, acides bases, sels, etc.
*
* *
J'ai isolé des végétaux plusieurs composés entièrement
nouveaux.
Ce fut d'abord la kolatine-caféine, extraite de la noix de
Kola fraîche, puis la kolatine et la kolatéine, ces deux derniers composés
appartenant au groupe des catéchines.
L'étude de ces corps, comme celle des tannoïdes en général, est
extrêmement difficile ; j'ai pu cependant donner leurs principaux
caractères, montrer leurs relations avec la caféine et l'importance de ces
faits au point de vue pharmacodynamique.
Ces recherches sur la Kola. fraîche ont été le point de
départ d'importantes applications : la stabilisation des végétaux que nous
exposons plus loin.
De la racine de Tormentille, j'ai retiré le tormentol, corps
dont, sans en montrer complètement la constitution, j'ai établi qu'il est à
la fois ester et alcool.
Dans l'étude biochimique du Primula officinalis L.,
j'ai obtenu des résultats absolument complets.
J'ai d'abord montré qu'il existait dans la racine du P.
officinalis des principes hétérosidiques non dédoublables par l'émulsine, mais
dédoublables par un ferment spécifique, la primevérosidase dont j'ai établi
la répartition et la localisation chez les Primulacées.
Ensuite, j'ai extrait ces principes hétérosidiques,
primevéroside et primulavéroside et déterminé la constitution chimique complète de l'une et de
l'autre.
Le premier donne, par dédoublement, l'ester méthylique de
l'acide 2-hydroxy-4 méthoxybenzoïque et le primevérose.
Le second, l'ester méthylique de l'acide 2-hydroxy-5
méthoxybenzoïque et le primevérose.
L'essence de Primevère est un mélange des deux esters
précédents avec une petite quantité de cétone, non déterminée en raison de la
trop faible portion obtenue.
La constitution du Primevérose bioside jusqu'alors inconnu a
été établie. Il est formé de l'union d'une molécule de d. glucose et d'une
molécule de xylose.
La découverte de ce sucre, de structure si spéciale,
constitue un fait nouveau d'autant plus important que ce biose fait partie d'un
grand nombre d'hétérosides découverts depuis (monotropitoside, gentiacauloside,
rhamnicoside, rubérythroside).
Ainsi, les deux hétérosides que j'ai isolés de la Primevère
appartiennent au groupe des hétérosides, très peu nombreux, dont on connaît
parfaitement la structure chimique de la partie hydrocarbonée comme de la portion
aglycone de la molécule.
Avec M. Canal, nous avons étudié la composition d'autres
essences de racines de Primevères dont la constitution est tout à fait
différente.
Des fruits verts ou stabilisés de Vanille, j'ai pu isoler
plusieurs hétérosides dont le vanilloside (glucovanilline) qui n'avait été obtenu
jusqu'alors que par des méthodes synthétiques.
J'ai montré< que le parfum de la Vanille, si fin et si différent de celui
de la vanilline, est dû à un autre hétéroside se dédoublant en un ester,
produit jaune huileux, à odeur très agréable.
Cette origine — longtemps controversée — du parfum si
délicat de la Vanille, très différent de celui de la vanilline, se trouve ainsi
élucidée par l'obtention et la connaissance de la constitution des hétérosides
générateurs d'odeur.
C'est bien par une action biochimique que se forment ces
corps odorants, mais l'isolement de< tous ces principes infirme l'hypothèse
faisant dériver la vanilline de la coniférine par une action fermentaire
oxydante, suivie d'une action fermentaire hydratante.
La réalité est beaucoup plus simple.
J'ai montré également qu'il existe dans la Vanille des
hétérosides donnant, par dédoublement fermentaire, l'alcool vanillique et
l'aldéhyde protocatéchique, 1,3,4 n'intervenant pas dans la formation du
parfum.
Avec M. Canal, nous avons fait de longues recherches sur la
composition chimique des bourgeons du Populus balsamifera L. Nous en
avons retiré dix-huit corps organiques ; presque tous sont déjà
signalés dans les végétaux, mais l'un est entièrement nouveau.
C'est une chalcone dont nous avons établi et confirmé la formule
par la synthèse ; c'est le 2’6'-dihydro-4’ méthoxy-b-propiophénone.
Biochimie microbienne.
J'ai consacré de patientes et pénibles recherches à l'étude de la composition
chimique du Bacille tuberculeux.
J'y ai surtout étudié les substances lipidiques parmi
lesquelles un principe entièrement nouveau, l’Hyalinol, dont je décris plus
loin les
curieuses propriétés.
J'ai repris aussi l'étude de la composition minérale du
bacille et celle de la question si controversée de son acido-résistance ;
celle-ci doit être rapportée, selon moi, aux acides gras libres, à la cire et surtout
au Mykol, alcool constitutif de cette cire.
J'ai pu en outre extraire du bacille dégraissé une
nucléo-albumine qui possède les propriétés atténuées de la tuberculine.
On poursuit l'étude de ce corps car il n'est pas douteux que
l'obtention d'un produit chimiquement défini, agissant comme la tuberculine,
constituerait un réel progrès.
Les tuberculines employées actuellement sont, le plus
souvent, obtenues par précipitation, avec l'alcool, d'un milieu de culture sur
bouillon du bacille tuberculeux.
La proportion de tuberculine fixée sur ce précipité de
matières albuminoïdes est très variable et, par suite, l'activité du produit n'est pas
constante.
Un principe défini, pondérable, ne présenterait pas les
mêmes inconvénients et la médecine ne pourrait que gagner à utiliser comme
agent thérapeutique ou réactif biologique, un produit d'action toujours comparable.
Avec M. Liot, nous avons étudié la nutrition azotée du
Bacille pyocyanique cultivé sur un milieu artificiel défini.
Après avoir contrôlé que les sels ammoniacaux des acides
organiques mono ou bibasiques étaient de bons aliments, j'ai montré que c'était le
contraire pour les acides aminés employés seuls.
Par contre, additionnés d'un hydrate de carbone ils sont
susceptibles de donner< de la pyocyanine. La fonction aminé n'intervient dans la
nutrition que lorsqu'elle a été transformée en fonction sel ammoniacal par un
processus tout à fait particulier.
*
* *
Recherches scientifiques sur des questions techniques.
Mes fonctions hospitalières m'ont conduit à aborder
des questions importantes de technique pharmaceutique : La culture des plantes
médicinales.
La stabilisation des végétaux. La préparation des Catguts.
L'étude et l'essai de diverses préparations pharmaceutiques.
J'ai fait de grands efforts pour encourager la culture des
plantes médicinales.
Mes observations sont consignées dans un petit volume,
écrit en collaboration avec M. Demilly.
La récolte des simples, considérée comme la première des
opérations pharmaceutiques, à la fois par ordre chronologique et par son
importance, était autrefois l'objet des plus grands soins de la part des
pharmaciens ; peu à peu elle fut délaissée et abandonnée à des gens plus ou
moins expérimentés.
L'industriel doit, dans la mesure du possible, cultiver
lui-même les plantes nécessaires à son industrie. C'est par là seulement qu'il
se mettra à l'abri des erreurs dues à la négligence ou à l'ignorance des
récolteurs, des inconvénients d'une dessiccation trop rapide et mal surveillée
; c'est de cette façon aussi qu'il pourra se procurer d'une année à l'autre des
plantes de composition chimique semblable, donc d'activité thérapeutique
comparable.
C'est là toute une évolution, conséquence inévitable de la
centralisation de l'industrie pharmaceutique.
Ces industries, avec la culture des plantes qui y sera
annexée, deviendront de véritables industries agricoles.
Mes recherches de microchimie et plus spécialement celles
sur le Quinquina et la Kola, celles concernant l'extraction des hétérosides
de la Vanille, des Primevères, m'avaient montré que tanins,
glucosides et alcaloïdes existent souvent dans les mêmes cellules et qu'ils
forment ensemble des complexes dont les propriétés ne sont presque jamais celles de
leurs constituants.
Pendant la dessiccation, au cours de l'agonie du végétal, aussitôt que
se produit le phénomène de déséquilibre qu'est la mort, ces combinaisons sont
détruites sous l'influence des diastases.
Dès lors il devait être utile, indispensable même, de les
fixer afin de pouvoir les extraire ensuite sous la forme même où elles se
présentent chez les êtres vivants.
Bourquelot, pour caractériser ou extraire les glucosides,
traitait par l'alcool bouillant les plantes recueillies; mais on ne peut ainsi
obtenir que des extraits alcooliques.
Nous avons pensé, avec M. le Prof. Perrot, que le même but
serait atteint en soumettant les organes des végétaux dans l'autoclave à
l'action des vapeurs d'alcool, ou même, lorsque la consistance de la drogue est
plus compacte, à celle de la vapeur d'eau.
Au sortir de l'appareil, on obtient par une simple
dessiccation une matière première stable, qui peut, par la suite, être soumise
à tous traitements utiles.
La composition chimique de la plante stabilisée ainsi
obtenue ne présente guère de différence avec celle de la plante fraîche.
La Kola dont j'ai pu extraire, après stabilisation, le
composé kolatine-caféine qui n'existe plus dans la noix sèche, en est un
exemple démonstratif.
Est-ce à dire que l'on doive dans l'avenir avoir toujours recours
à la stabilisation des plantes médicinales, de préférence à tout autre traitement ? Ce
n'est pas là notre pensée.
Pour chacune des plantes médicinales, il sera bon de
comparer chimiquement, physiologiquement et cliniquement, la préparation
stabilisée aux préparations faites dans les conditions ordinaires.
Le Codex de 1937 a admis le principe de la stabilisation et
a inscrit les préparations de plantes stabilisées concurremment avec celles de
plantes traitées par les méthodes habituelles.
On retiendra toutefois qu'il est avantageux, pour beaucoup d'entre elles,
d'avoir recours à la stabilisation.
Chargé, pendant la guerre de 1914, par le Service de Santé
de l'Armée, du contrôle puis de la fabrication des ligatures chirurgicales,
j'ai très vite constaté que, dans ce domaine, la recherche scientifique
n'avait pas toujours suffisamment guidé la pratique industrielle.
L'étude anatomique de l'intestin du mouton m'a permis de
relever une erreur devenue classique, sur l'origine de la corde à boyau.
J'ai montré la nécessité de supprimer la macération initiale
des boyaux, cause de toutes les difficultés rencontrées au cours de la
stérilisation.
Je suis parvenu à faire préparer de la corde chirurgicale
par d'autres méthodes que celles employées pour les cordes destinées à des
usages non médicaux.
J'ai montré dans quelles conditions on pouvait préparer,
avec une sécurité parfaite, le catgut chirurgical et j'ai indiqué une méthode
de contrôle, vérifiée par plus de 60 000 ensemencements.
Les essais et la conservation des médicaments ont forcément
dû retenir mon attention.
Ces études ont trait à des préparations issues de matières
premières végétales suivantes : Aconit, Belladone, Ergot de seigle, Fougère mâle,
Noix vomique, Opium, Quinquina ; ou d'alcaloïdes : aco-nitine, héroïne,
novocaïne, morphine.
Malgré leur importance technique, je ne crois pas devoir en
faire ici plus largement état ; je rappellerai toutefois qu'elles m'ont valu
d'être désigné comme expert près de la Section d'Hygiène de la Société des
Nations.
Depuis 1908, j'ai assumé un enseignement à la Faculté de
Pharmacie, soit comme Chef des Travaux pratiques de Botanique, comme Agrégé et comme
Professeur.
Au cours de mon enseignement je me suis attaché à faire des
leçons construites sur un fond solide de faits scientifiques.
Je me suis efforcé d'intéresser l'esprit des élèves en leur
montrant, d'une part la solidarité des faits ou des notions purement scientifiques
et des applications pharmaceutiques, et, d'autre part, comment celles-ci sont
conditionnées par les précédentes.
J'ai eu la satisfaction de voir le cours suivi assidûment et
régulièrement sans que diminue le nombre des auditeurs.
La publication de ce cours : «La Pharmacie galénique», a eu
le plus grand succès près des étudiants et du Corps pharmaceutique; édité en 1937, il a
été réédité en 1942 et déjà il faut prévoir une 3e édition.
J'ai eu à diriger des jeunes gens qui, sans vouloir
consacrer leur vie à la science, désiraient accorder quelque temps à la
recherche scientifique.
A ces jeunes gens, je me suis efforcé de donner toute l'aide qu'il
m'était possible et le plus souvent les ai associés à mes travaux, ainsi que le
montre l'exposé des publications faites en commun.
Pour d'autres, désireux de travailler seuls, j'ai toujours
pris grand soin de ne pas les rebuter en leur imposant une direction donnée, mais
de respecter leurs tendances personnelles.
Dans le vaste domaine des Sciences, tous ne
s'intéressent pas également au même chapitre de Biologie végétale.
Au lieu d'imposer toujours le même type d'étude, j'ai laissé
à chaque élève le soin de choisir un sujet conforme à ses goûts. Je me suis au
besoin parfois écarté de mon propre chemin pour suivre ses recherches, afin
de pouvoir le guider dans l'établissement de la méthode de travail et dans
l'application des techniques propres au sujet choisi.
Dans ces conditions, la thèse ne devient pas un travail
fastidieux dont on s'acquitte sans enthousiasme pour acquérir le titre désiré.
L'élève dont on a respecté l'initiative conservera le
travail achevé, le goût de la recherche ; il continuera à s'intéresser au progrès
scientifique ; parfois, malgré l'éloignement de l'Université, il dérobera
quelques heures aux occupations professionnelles pour continuer un travail
commencé à l'occasion d'une thèse. Il conservera l'amour et le respect de la
Science, il continuera parfois à la servir, mais surtout, il gardera toujours
la conscience scientifique que nous avons voulu développer en lui.
Mots clefs : acide / aconit / activité / alcaloïde / anatomie /
anthora / application / betterave / biochimie / biologie / catgut / champignon / chimie / composition /
culture / essai / étude / extraction / ferment / glucoside / hétéroside / kola / ligneux / médicinal / noix /
orseille / pailles / parfum / pharmaceutique / plante / primevère / primevérose / quinquina / recherche /
rhubarbe / structure / tanin / tuberculine / urée / vanille / goris
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