Germain : Travaux scientifiques
Site créé le 24 octobre 2004 Modifié le 11 janvier 2006
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Notice sur les travaux scientifiques

 

de

 

Louis Germain

Sous-directeur de laboratoire au Muséum d'Histoire Naturelle

 

 

 

INTRODUCTION

Toute ma carrière scientifique s'est passée au Muséum d'Histoire Naturelle où, en 1903, je suis entré au Laboratoire de Malacologie dirigé par mon Eminent Maître, M. le Professeur L. JOUBIN. Depuis plusieurs années déjà je m'étais adonné à l'étude des Mollusques et c'est dans cette voie que s'est d'abord portée mon activité.

 

Les collections du Muséum m'offraient des matériaux pratiquement inépuisables, et bientôt je fus chargé d'étudier ceux provenant de nombreuses Missions. J'ai été ainsi conduit à publier une longue suite de Mémoires sur la systématique et sur la faunistique des régions les plus diverses. Parmi les plus importants, je rappellerai ceux concernant les Missions de M. le Professeur A. CHEVALIER, de M. L. FEA, de M. E. FOA, de M. le Professeur Ch. GRAVIER, Membre de l'Institut, de MM. les Professeurs A. GRUVEL et R. CHUDEAU, de M. GUY BABAULT, de M. le Professeur R. JEANNEL, de M. le Général J. TILHO, Membre de l'Institut..., en Afrique ; de M. le Professeur P. RIVET, en Amérique du Sud ; de MM. HENRI CADEAU DE KERVILLE, GUY BABAULT, J. DE MORGAN, en Asie...

 

Entre temps, je continuais mes recherches sur la faune paléarctique et j'étudiais, au laboratoire et dans la nature, la systématique, l'anatomie et la biologie des Mollusques terrestres et fluviatiles de la faune française, apportant un soin particulier à l'examen du polymorphine, ce qui me permit de préciser, avec plus de netteté, la valeur de bien des espèces. J'aboutis ainsi à la publication de monographies importantes, comme celle des Helicidae de la faune française dans laquelle je propose une classification nouvelle des Helicidae paléarctiques et aux deux volumes des Mollusques de la Faune de France.

 

De plus, je continuais l'étude des Mollusques fossiles du Pliocène et du Quaternaire et celle des espèces de divers dépôts préhistoriques et archéologiques, ce qui me fournit des documents précieux pour mes recherches ultérieures d'ordre général.

 

Car le but que j'ai toujours essayé d'atteindre n'est pas seulement la connaissance des Mollusques et de leurs coquilles. Certes, la systématique, dont a peut-être méconnu la valeur, constitue une part importante de mes travaux et il ne saurait en être autrement dans un établissement comme le Muséum. Et je pense qu'il convient d’affirmer que la systématique reste la base fondamentale de la zoologie, de la biologie et de tout essai de généralisation.

 

Après avoir acquis une connaissance aussi précise que possible des espèces et de la biologie de beaucoup d'entre elles, je me suis orienté, sans abandonner d'ailleurs mes travaux de systématique, vers les recherches d'ordre plus général : influence de l'Homme sur les déplacements des Animaux, phénomènes de migrations et d'acclimatements, composition et origine des faunes insulaires, question de Biogéographie...

 

Mes études sur les espèces fossiles m'ont également permis d'aborder les problèmes de paléogéographie et de tenter d'esquisser l'histoire faunistique de l'Afrique Equatoriale, de la mer Méditerranée, des terres insulaires des océans Atlantique, Indien et Pacifique.

 

J'ai, de plus, longuement étudié les faunes lacustres, plus particulièrement celles des lacs à espèces relictes et thalassoïdes.

 

Les résultats auxquels je suis parvenu sont souvent disséminés dans un grand nombre de Mémoires, soit sous forme d'introduction, soit sous forme de conclusions.

 

Ils ont aussi fait l'objet de travaux spécialement écrits dans un esprit de synthèse. Tels sont, par exemple, mes études sur l'origine et la distribution de diverses familles; mes Mémoires sur les migrations et les acclimatements, mon livre sur la vie des animaux à la surface des continents dans lequel je propose une nouvelle classification des grandes provinces zoologiques.

 

Tous ces ouvrages ont été rédigés dans un esprit de synthèse en tenant compte, bien entendu, des travaux de mes devanciers et aussi en faisant appel à des disciplines très diverses. Car mes investigations m'ont conduit à entreprendre des recherches, non seulement dans le domaine de la zoologie et de la paléontologie, mais également dans ceux de la géographie ancienne, de la préhistoire, de l'archéologie et de l'ethnographie. Ainsi j'ai pu mettre en évidence certains faits que je crois importants, comme le parallélisme des migrations de divers groupes d'animaux, le synchronisme de migrations humaines et animales, l'existence de relations entre des peuples préhistoriques ou protohistoriques habitant des régions souvent fort éloignées, et aussi l'interprétation de monuments anciens figurant des animaux...

 

Mes recherches ne se sont pas bornées à l'étude des Mollusques et aux questions de biologie et de biogéographie. J'ai également publié des Mémoires sur l'anatomie, la systématique et la distribution (géographique et bathymétrique) des Chétognathes et une série de travaux qui, à première vue étrangers à la zoologie, s'y rattachent cependant à plus d'un titre. Tels sont, notamment, des Essais sur les climats des temps quaternaires, sur la mer des Sargasses, sur les animaux d'après les textes et les monuments anciens, sur la civilisation précolombienne dans ses rapports avec l'Ancien Monde et diverses études touchant l'ethnographie et la préhistoire .

 

Telles sont les principales directions vers lesquelles s'est manifestée mon activité. Et j'espère qu'il me sera possible de publier, dans un avenir prochain, un Précis de Biogéographie à l'élaboration duquel je travaille depuis plus de quinze ans.

*

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Les Professeurs du Muséum ont la lourde tâche d'assurer l'entretien et< l'accroissement des Collections. Celles du service de Malacologie sont considérables, mais elles ont besoin d'être remaniées parce qu'elles ont été constituées à une époque on l'on exposait au public tous les échantillons déterminés. Il est a peine besoin de faire ressortir les inconvénients d'une telle méthode, aggravés encore par la distance séparant la galerie de Zoologie du Laboratoire, et par la disposition même des locaux affectés au service de Malacologie, locaux répartis sur deux étages du bâtiment.

 

Les collections comprennent des pièces conservées en alcool et des pièces préparées à sec. Les premières (plus de 60.000 bocaux) sont logées dans les armoires des balcons du deuxième étage, inaccessibles au public et qui ne sont guère que des magasins. Les secondes sont exposées au public. Au deuxième étage, les Coraux, parmi lesquels des types précieux, sont répartis dans les armoires formant pourtour, armoires renfermant aussi la collection des Gastéropodes prosobranches; les Echinodermes occupent une longue suite de vitrines plates. Au premier étage, les Pélécypodes sont placés dans des vitrines plates sous lesquelles sont renfermés des Eponges et des Coraux que le public ne peut voir, les échantillons étant sensiblement au niveau du plancher.

 

Dans toutes ces séries, le nombre des espèces est considérable, même pour les formes très petites, et il s'y trouve mêlé des pièces précieuses : échantillons historiques, types ou cotypes, exemplaires provenant des grandes expéditions scientifiques du siècle dernier...

 

Enfin le service dispose de trois salles annexes : l'une contient les Mollusques Pulmonés, les Céphalopodes et une Collection des animaux des côtes de France se rapportant à la Chaire; l'autre renferme la Collection des Brachiopodes ; enfin, dans la troisième, dite salle Lamarck, M. le Professeur L. JOUBIN a rassemblé les échantillons types nommés par le célèbre naturaliste, types jusqu'alors disperses dans la Collection générale.

 

Projet de réorganisation des Collections.

Tel est l'état actuel des collections qui ont évidemment besoin d'être mises en concordance avec les données de la Muséologie moderne. Tout programme de réorganisation doit tenir compte de la disposition des bâtiments et aussi des >possibilités financières. Il me paraît inutile d'élaborer des projets grandioses qui, entraînant des dépenses excessives, n'ont aucune chance de réalisation même lointaine.

 

Une collection publique moderne doit satisfaire à plusieurs desiderata. Elle doit être vivante, attrayante; donner aux visiteurs le goût de l'histoire naturelle en lui montrant des objets choisis, des espèces caractéristiques, intéressantes par leur morphologie, leurs mœurs, leur utilisation alimentaire, industrielle artistique. De très courtes notices accompagnées de photographies, de dessins explicatifs, retiendront l'attention sur les objets présentés. Déjà certains services du Muséum montrent, par de magnifiques expositions, l'exemple qu'il convient de suivre.

 

Aussi, une discrimination doit-elle être faite entre les espèces actuellement exposées. Tout ce qui est collection d'étude doit être reclassé au Laboratoire. Les galeries sont faites pour le public, non pour les savants, et c'est seulement au Laboratoire que les séries d'espèces peuvent être étudiées avec fruit et à loisir. Donc, il restera seulement aux galeries les échantillons intéressants pour le public et il appartient au professeur et à ses collaborateurs de les présenter dans un cadre aussi attrayant que possible.

 

Cependant, une remarque importante s'impose. Les Mollusques sont, avec les Insectes (surtout les Coléoptères et les Lépidoptères), les Invertébrés qui intéressent le plus les collectionneurs, dont le nombre décroît malheureusement, mais qui sont encore assez nombreux en France.

 

Il convient donc de leur offrir, en dehors du Laboratoire, une série suffisamment importante pour qu'ils puissent déterminer, au moins génériquement, les coquilles de leur collection. C'est pourquoi il me paraît nécessaire de laisser aux galeries un Genera des Mollusques assez développé pour que tous les genres importants soient représentés. Et, plus encore, de multiplier les espèces dans quelques genres particulièrement recherchés des amateurs (Cônes, Cyprées, Olives, Mitres, Murex, par exemple).

 

Par contre, on éliminera toutes les espèces de petite taille d'un intérêt uniquement scientifique.

 

De plus, des séries spéciales d'animaux dont l'intérêt alimentaire, industriel, artistique ou ethnographique est considérable seront constituées. Dans cet esprit, des vitrines spécialisées, consacrées aux Coraux constructeurs de récifs, aux Mollusques comestibles, aux Mollusques producteurs de nacres ou de perles, aux Mollusques perforants, à l'industrie des Eponges, à celle du Corail, à l'utilisation des Mollusques comme monnaies, objets de parure ou de culte..., sont d'un indéniable intérêt.

 

Bien entendu, l’émunération ci-dessus n'est pas limitative. L'esprit qui préside à une telle organisation est le suivant : faire comprendre au public comment, par exemple, on élève les Huîtres ou les Moules, en lui montrant, à côté des animaux à leurs divers âges de croissance, les installations utilisées par les ostréiculteurs, grâce à de courtes notices illustrées de dessins et de photographies.

 

La place ne manque pas pour organiser de telles expositions, le transport au Laboratoire des séries d'études pouvant libérer un nombre appréciable de vitrines, et de nouveaux meubles pouvant être prévus.

 

Les collections publique rénovées, il reste à réinstaller au Laboratoire les séries destinées aux recherches.

 

Une expérience déjà longue des collections du service me permet de formuler les remarques suivantes :

Ainsi qu'il a été dit précédemment, il existe, dans la Collection générale, un grand nombre de types et d'échantillons historiques. D'autre part, certains genres, certaines familles ont été révisés, à des époques diverses, par des spécialistes (Ed. PERRIER, R. KŒHLER, TOPSENT, BAVAY, BERTIN, DE BOURY...) et les matériaux recueillis au cours de voyages célèbres ont fait l'objet de publications considérables et universellement connues (Voyages de 1' « Astrolabe », du « Travailleur », et du « Talisman », du « Pourquoi-Pas? », etc...). Il n'y a aucun avantage à incorporer de tels documents dans la Collection générale, pas plus, d'ailleurs que les Collections historiques comme celles du BARON DE FÉRUSSAC, de COTTEAU (Echinodermes), etc...

 

On ne peut évidemment songer à consacrer, comme il a été fait pour la Collection LAMARCK, une salle à chacune de ces séries; mais il est possible, avec beaucoup de temps, de conserver au Laboratoire, dans des meubles spéciaux, ces séries dont il est inutile de souligner l'importance. Je dis avec beaucoup de temps, parce que les viscissitudes, sur lesquelles il n'y a pas lieu d'insister, ont rendu souvent pénible l'identification (perte d'étiquette originale, de provenance) des échantillons qui, d'autre part, sont répartis et, en quelque sorte, noyés dans la Collection générale.

 

Cependant mon collègue, M. Ed. LAMY, Sous-Directeur honoraire, a réuni déjà un grand nombre des exemplaires recueillis par QUOY et GAIMARD et j'ai moi-même, depuis plus de quinze ans, rassemblé une partie importante de la Collection FÉRUSSAC.

 

Ainsi, au Laboratoire, les savants auraient à leur disposition :

1° Une Collection générale.

2° Des Collections spéciales (des Voyages publiés, des genres et des familles révisés, etc...) où seraient soigneusement conservés les noms et les étiquettes originaux.

 

Reste la question des répertoires. On ne peut songer — ce qui serait l'idéal, mais exigerait un personnel spécial et compétent — à faire le Catalogue des Collections. Mais il est possible d'établir, sur fiches, des index des genres, permettant de retrouver, très rapidement, les échantillons, qu'ils soient conservés au Laboratoire ou aux galeries. Ces répertoires, déjà dressés pour les Coraux et une partie des Echinoderum, seront étendus au reste des Collections.

 

Enfin, un gros effort doit aussi porter sur l'éclairage des galeries. Les vitrines murales du deuxième étage sont particulièrement difficiles à rendre attrayantes parce que la lumière du jour y est distribuée avec une parcimonie déplorable. Le seul remède est de les éclairer à l'aide de lampes tubulaires placées à l'intérieur des armoires. Dépense assez forte évidemment, mais nécessaire et qu'il faudra bien engager un jour si l'on veut mettre en valeur les Collections.

 

De même la transformation du chauffage actuel est fort désirable : il est la source d'une abondante poussière grasse et noire qui détériore irrémédiablement les objets exposés.

*

* *

 

Un tel programme est facilement réalisable et n'entraîne que des dépenses relativement faibles, à répartir sur plusieurs exercices. Il peut être achevé en quelques années. Il a d'ailleurs reçu un commencement d'exécution. Grâce à la bienveillance de mon Eminent Maître, M. le Professeur L. JOUBIN, j'ai pu faire établir au Laboratoire, sur les fonds de la taxe d'apprentissage, une série de meubles à tiroirs destinés à recevoir les collections d'études actuellement aux galeries. De plus, au début de février dernier, lorsque M. le Professeur L. JOUBIN eût demandé sa mise à la retraite, MM. les Professeurs du Muséum ont bien voulu me charger de remanier les Collections publiques en vue du Tricentenaire du Muséum (Juin 1935). Je me suis aussitôt mis à l’œuvre, décidé à mener à bien cette tâche assez lourde. Je me permets d'exposer ici le travail que je poursuis actuellement et qui s'inspire des idées directrices exposées précédemment.

 

Au second étage, la Collection des Pélécypodes est complètement remaniée. Les séries d'études sont dès maintenant disposées, au Laboratoire, dans les meubles qui leur étaient destinés. La collection exposée ne comprend plus que les deux suites de vitrines plates bordant les côtés longs du grand hall.

 

L'un des petits côtés est réservé aux Mollusques perforants et je me plais à reconnaître l'active et compétente collaboration que m'a apportée ici mon excellent collègue et ami Ed. LAMY, Sous-Directeur honoraire. Les vitrines du petit côté opposé sont consacrées aux Mollusques caractéristiques de quelques régions (Afrique Equatoriale, Iles du Pacifique, faillies lacustres).

 

De même, au deuxième étage, la Collection des Gastéropodes a été réduite aux armoires adossées aux grands côtés des bâtiments. Les séries d'étude, mises en tiroirs, seront ultérieurement transportées au Laboratoire et classées à nouveau.

 

Dans les armoires des petits côtés sont installés : les types essentiels de Cœlentérés et une série de Coraux de récifs. Enfin, quelques armoires sont garnies d'Epongés industrielles et de Mollusques comestibles et la Collection des Echinodermes est également réduite, les échantillons déterminés par COTTEAU ayant été soigneusement mis en tiroirs en attendant leur transport au Laboratoire.

 

Partout des étiquettes explicatives (toujours très visibles), des dessins, des schémas, des photographies ont été disposés, non seulement pour rendre la galerie plus attrayante, mais aussi pour faire saisir aux visiteurs l'intérêt présenté par les objets qu'ils ont sous les yeux.

 

Je n'ai pas eu la prétention, en les trois mois qui me séparaient des fêtes du Tricentenaire, de faire œuvre définitive. Mais c'est le début d'un effort de présentation moderne des galeries publiques, d'une organisation rationnelle des séries d'étude au Laboratoire, effort qui, poursuivi quelques années, permettra de rénover les Collections publiques et aussi de mettre plus facilement à la disposition des savants des matériaux d'une valeur inestimable.




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