Site créé le 24 octobre 2004 | Modifié le 11 janvier 2006 |
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Bernard N. Halpern
Mon activité scientifique a
été influencée, au début, par l’orientation des laboratoires dans lesquels
j’ai travaillé :
Mon Maître J. GAUTRELET a
été intéressé tout au long de sa carrière par les effets physiologiques des
extraits d’organes de Vertébrés et d’Invertébrés. C’est la raison pour
laquelle, après quelques travaux préliminaires, il m’a orienté vers l’étude
des effets physiologiques des venins.
Lors de mon passage dans les
laboratoires de la Société Rhône-Poulenc, ce sont les problèmes d’application
thérapeutique qui ont été mes sujets de recherches. Mon choix s’était porté
sur l’étude des antagonistes de l’histamine, qui ont transformé la
thérapeutique des maladies allergiques.
Lorsque j’ai rejoint, en
1945, à l’Hôpital Broussais, le service du Professeur Pasteur Vallery-Radot, j’ai axé mes travaux de recherches
vers l’étude de l’anaphylaxie et des phénomènes d’hypersensibilité en
général. Ceux-ci m’ont conduit à l’étude des mécanismes immunologiques
généraux, les réactions d’hypersensibilité n’étant, en fait, qu’une des
formes de l’immunité.
Mes recherches ont été
orientées dans deux directions : l’étude des phénomènes
d’hypersensibilité et celle des mécanismes fondamentaux de défense.
Que des germes ou des virus
pénètrent dans l’organisme, qu’un sérum hétérologique soit administré, qu’une
greffe d’organe ou de tissu étranger soit appliquée, la réponse fondamentale
de l’organisme est immuablement la même.
Dans un premier stade, il y
a reconnaissance par certaines cellules de la nature hétérogène des cellules
ou de la substance. Cette information est transmise à d’autres populations
cellulaires qui réagissent par l’élaboration des globulines spéciales
appelées anticorps, capables de neutraliser, de précipiter, d’agglutiner, de
lyser la substance ou les cellules étrangères. La spécificité des anticorps
est très près d’être absolue, ce qui implique une faculté de synthèse
protidique prodigieusement fine et délicate.
Ce qui distingue les
phénomènes d’hypersensibilité de phénomènes immunitaires c’est la structure
des anticorps qui acquièrent des propriétés de contracter, avec les cellules,
des liaisons dont la nature reste encore obscure.
Du fait de l’union de
l’antigène avec les anticorps fixés sur les cellules, celles-ci réagissent
par une libération massive et explosive de certaines substances toxiques,
emmagasinées sous forme de précurseurs inactifs. Ce sont ces substances
toxiques qui sont responsables des dommages et des désordres graves ainsi
causés. Parmi ces substances, l’histamine assume une responsabilité
dominante.
Nous
avons consacré une grande partie de nos recherches à l’étude de la réaction
anaphylactique chez diverses espèces animales et de son déterminisme. Nous
avons étudié plus particulièrement la nature des liaisons entre les anticorps
sensibilisants et les cellules, ainsi que les facteurs qui conditionnent la fixation des
anticorps.
Tout récemment nous avons
mis au point une technique permettant de conférer à des populations
cellulaires ou à des tissus normaux une sensibilisation spécifique par la
mise en contact de ces tissus avec un immunsérum « in vitro ». Cette
technique nous a permis d'établir un certain nombre de principes auxquels les
processus de sensibilisation obéissent et d'explorer les divers facteurs
susceptibles d'influencer, dans un sens ou dans un autre, la cinétique de 1a
sensibilisation.
Une grande partie de nos
recherches a été consacrée à l'étude des modalités de la libération de
l'histamine endogène.
Bien qu'elle ait déjà une
longue et riche histoire, l'histamine n'a pas encore livré tous ses secrets.
Substance éminemment toxique
pour la plupart des Mammifères, elle est pourtant présente, en quantité
relativement importante, dans presque tous les tissus normaux et
pathologiques. L’histamine est le modèle même des substances - elles sont
quelques-unes dans l'organisme animal - qui interviennent dans les
régulations physiologiques, mais qui sont également responsables du
déclenchement des désordres pathologiques. Véritables poisons endogènes, ces
substances sont mises en réserve dans les cellules plus ou moins spécialisées
qu'elles n'affectent guère. Elles ne sont dangereuses que lorsqu'elles sont
mises en liberté clans les humeurs circulantes.
Nous avons étudié longuement
la répartition cellulaire, la forme biochimique et le métabolisme de
l'histamine. Nous nous sommes surtout attaché à explorer les modalités de la
libération de l'histamine au cours du choc anaphylactique et après
administration de substances histamino-libératrices.
Nous avons étudié, d'une
part, les corrélations entre la libération de l'histamine et les désordres
pathologiques et, d'autre part, le comportement physiologique de l'animal
dont l'histamine tissulaire a été épuisée.
Mes travaux sur les
antihistaminiques de synthèse ont apporté une nouvelle et précieuse
thérapeutique des affections allergiques. La mise à contribution des
antagonistes spécifiques de l'histamine a permis en outre de préciser d'une
manière plus pertinente encore le rôle de l'histamine dans les processus
d'hypersensibilité.
Les phénomènes
d'hypersensibilité occupent une place importante en pathologie humaine.
Certains individus, héréditairement prédisposés, se sensibilisent au cours de
leur existence à des substances banales et variées, introduites par voie
respiratoire, digestive ou parentérale. Ces affections sont englobées sous le
terme d'allergie. Mais les phénomènes d'hypersensibilité ont une portée
beaucoup plus générale car ils sont directement liés à ceux de la spécificité
de l'espèce et de l'individu.
* *
Les processus fondamentaux
de défense et de l'immunité sont assurés par la fonction phagocytaire et la
formation d'anticorps spécifiques. Une grande partie de notre activité
scientifique a été consacrée à l'étude des cellules douées de propriétés
phagocytaires et capables de synthétiser les anticorps spécifiques. On
s'accorde à reconnaître que ces propriétés sont essentiellement dévolues à un
groupe de cellules qu'on désigne, depuis Aschoff, sous le nom de Système
Réticulo-Endothélial.
Nous nous sommes attaché à
établir les lois auxquelles obéit la dynamique de la fonction phagocytaire
des cellules réticulo-endothéliales à l'égard des substrats animés ou
inertes. Après avoir constaté que ces lois sont les mêmes chez toutes les
espèces animales étudiées, et qu'elles revêtent par conséquent un caractère
physiologique général, nous avons étudié les divers aspects de la phagocytose
et les facteurs qui sont susceptibles de l'influencer.
En employant des substrats
radiomarqués, nous avons tenté d'élucider le sort des germes phagocytés et
les étapes de leur destruction par les enzymes intracellulaires. Les cellules
appartenant au S. R. E. sont également impliquées dans l'immunité par l'élaboration
des anticorps spécifiques. Le rythme de la production d'anticorps, suivant
l'état fonctionnel des cellules réticulo-endothéliales, et leur rôle dans
l'immunité anti-infectieuse ont pu être étudiés grâce à la découverte de
substances susceptibles de déprimer ou de stimuler le S. R. E. Sous l'effet
de substances stimulantes et notamment du B. C. G., la production
d'anticorps, en réponse à l'injection d'un antigène microbien ou d'une substance
hétérologue peut être considérablement augmentée. Mais la stimulation du S.
R. E. a encore d'autres conséquences : la résistance de l'animal aux
infections sévères se trouve ainsi rehaussée. De même, l'invasion tumorale,
comme nous l'avons montré tout récemment, est nettement freinée sous l'effet
de cette stimulation.
Certes, une grande partie de
cette augmentation de la résistance conférée par le B. C. G. peut être
attribuée à l'exaltation de l'activité phagocytaire et de celle de la production
d'anticorps, mais les divers procédés expérimentaux, basés sur l'élimination
de chacun des facteurs, nous ont conduit à la notion de l'existence d'un
facteur cellulaire, dont la nature reste encore à déterminer.
Dans le domaine de
l'immunité, le S. R. E. semble constituer la clef de voûte de la défense
contre toute agression xénique, que celle-ci se produise sous la forme
microbienne ou cellulaire.
* *
En portant ces
considérations à un niveau plus élevé, où seule l'hypothèse est possible, on
peut admettre que la réponse immunologique est un acte de défense de
l'individu et de sa spécificité. Les phénomènes d'hypersensibilité et les
réactions immunitaires soulignent l'originalité biochimique de l'individu,
que conditionnent les facteurs génétiques. « II faut », comme l'a dit RICHET,
« que l'être soit stable et c'est pour le maintien de cette stabilité qu'il
réagit avec tant d'énergie aux atteintes chimiques qui peuvent l'affecter ». Cette
opinion, si elle paraît trop finaliste et philosophique, correspond cependant
aux faits réels.
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