Gagnepain : Titres et travaux scientifiques
Site créé le 24 octobre 2004 Modifié le 11 janvier 2006
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Titre

et

travaux scientifiques

De

F. Gagnepain

 

 

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

 

Avoir goûté aux sciences, en avoir savouré la volupté à la fois âpre et douée; vivre à la campagne entouré d'une végétation tous les ans renouvelée; sans maître et presque sans livres, sentir profondément que chaque plante est un problème aux cent inconnues; vouloir, malgré toutes conditions précaires, résoudre au moins en partie ces milliers de problèmes ; découvrir cent fois l'Amérique; ne pas s'en décourager, mais continuer sans répit et sans dépit; ne pas garder pour soi jalousement l'observation des faits, mais publier, croyant impérieusement que de toute description des faits il résulte toujours quelque bénéfice pour la science; avoir horreur de l'incertitude et mettre dans ses recherches une conscience que ne satisfait que l'évidence, telle fut ma situation, telles furent mes directives, tel fut l'apprentissage que je fis de la botanique, avec des lacunes sans doute, dur certes, mais incontestablement profitable par l'effort toujours tendu, par le savoir péniblement acquis et d'autant plus durable.

 

Durant cette période de 14 ans qui s'étend de 1886 à 1900, j'ai publié vingt-cinq notes dans divers recueils.

 

Dispersion des semences. — La connaissance des plantes n'est pas une fin en soi; mais si elle forme une partie de la science appelée botanique descriptive, si elle devient une spécialité pour nombre de chercheurs, c'est que, même limitée aux phanérogames, elle est d'une vaste étendue avec ses 10.000 genres et ses 130.000 espèces. Dès le début, je ne pensais qu'à acquérir la connaissance précise de quelques milliers d'espèces pour l'appliquer au fur et à mesure. C'est ainsi que se groupent des observations nombreuses sur la végétation qui s'installe sur les chaumières, sur les murs, sur les saules têtards. Quels agents poussent les graines à se fixer si haut ? Sont-ce les vents, les animaux et quelle peut être la part de chacun d'eux ? Comment et pendant combien de temps vivent ces réfugiés dans des stations si extraordinaires ?

 

Sur une route sont plantés des frênes, des ormes, des peupliers blancs, des peupliers noirs. Pourquoi ces derniers seuls sont-ils infestes de Gui ? Pourquoi le nombre des tondes du parasite croît-il en raison du voisinage de la foret ? et de toute évidence, je démontre que les oiseaux des bois sèment le Gui.

 

Hybrides. — Quand on herborise aussi ardemment, on rencontre parfois entre deux espèces voisines, mais tranchées, des formes intermédiaires, les hybrides, qui sont en quelque sorte les mulets parmi les végétaux. Les hybrides ne sont certains que lorsqu'on les produit artificiellement. C'est ainsi que j'ai été amené à décrire des hybrides naturels très probables et à obtenir par expérience (les hybrides certains et même des frères inverses, eu intervertissant le rôle des parents.

 

Pollen.— Les hybrides s'obtiennent par l'action d'un pollen étranger. Mais qu'est le pollen ? Ses caractères ne peuvent-ils différencier les familles, les genres, les espèces ? Je fus amené à étudier plus de 500 pollens appartenant à autant d'espèces. Plusieurs articles exposèrent les résultats obtenus : étude des pollens appartenant à 10 familles, puis pollen des Géraniacées, des Chénopodiacées, pollen des hybrides et plus tard pollen des plantes cultivées.

 

En observant le pollen des Géraniacées, la mésine a été découverte, membrane qui est intermédiaire entre l'exine et l'intine, qui n'offre ni l'ornementation de la première, ni la flaccidité de la seconde et qui se révèle à l'extérieur par ces opercules des pores que j'avais appelés les corps calleux.

 

Tératologie. — Connaître l'organographie qui est l'architecture de la plante, la savoir invariable pour les groupes considérés et cependant rencontrer des exceptions, des anomalies ou monstruosités, quelles surprises ! Ainsi m'attira la tératologie végétale dont je décrivis de nombreux cas. Pour l'esprit curieux, connaître ne suffit, il faut pénétrer les causes et je fus assez heureux pour découvrir, à n'en pas douter, la cause de telle prolifération ou de telle duplicature florales.

 

Flore française — Cependant j'avais appris à connaître en entier. pendant 14 ans de recherches dans toute l’étendue du département, les espèces de la flore nivernaise, publié de nombreuses notes où j'ajoutais à l'ouvrage de Boreau beaucoup de localités ou d'espèces nouvelles pour le département.

 

La plus importante de ces publications est la Topographie botanique des environs de Cercy-la-Tour (178 pages et une carte), qui est proprement la flore du quart de la Nièvre, prélude de la flore du département tout entier.

 

A tous ces points de vue, l'apprentissage du botaniste était complet et quelques savants très distingués ou bien connus provoquèrent ma nomination au Muséum.

 

Au Muséum, en 1900, l'amateur, nommé préparateur, devient fonctionnaire et il entend l'être dans la belle acception du terme. Il s'agit de comprendre la situation, de montrer de l'initiative. Vouloir connaître en entier la plus riche collection du monde est illusoire. Il s'agit de travailler sans répit un groupe après l'autre, afin de réduire un arriéré considérable ; ici, travailler à la collection, c'est s'instruire. Il s'agit de publier pour ajouter quelque rayonnement au glorieux passe du Muséum. Heureusement, devoir et vocation vont de pair et toute fatigue est retardée ou adoucie par le plaisir d'apprendre.

 

Aussi que ce soit sous les ordres du Professeur Bureau, fatigue par l'âge, ou sous la direction du grand travailleur H. Lecomte, mon activité fut la même.

 

Zingiberacées. — Une famille de plantes, celle des Zingiberacées, est négligée des botanistes et presque innommée spécifiquement. Deux difficultés la caractérisent : l'extrême délicatesse des tissus floraux, la similitude de l'appareil végétatif. C'est par la fleur que se distinguent genres et espèces et cette fleur, il faut lui consacrer souvent deux ou trois heures pour l'étaler avant de la comprendre et de la dessiner.

 

Sept ans après, en 1907, sur un rapport très élogieux de M. Léon Guignard, l'Académie des Sciences m'attribuait le prix de Coincy, pour les 19 notes publiées, pour les 120 espèces nouvelles découvertes dans la famille des Zingibéracées.

 

Flore d'Extrême-Orient. — Dès 1903, Finet, dont le désir d'être utile n'avait d'égal que le haut esprit scientifique, me demande de collaborer avec lui pour l'étude de la Flore d'Extrême-Orient. De 1903 à 1906, nous avons publié, au Bulletin de la Société botanique de France, 11 notes qui furent réunies en deux tomes sous le titre «Contributions a la Flore de l'Asie orientale», contenant au total 426 pages et 29 belles planches. Dans cet ouvrage sont traitées les familles suivantes : Renonculacées, Calycanlhacées, Dilléniacées, Magnoliacées et Anonacées, comprenant plus de 820 espèces classées ou décrites et dont beaucoup sont nouvelles.

 

L'étude de ces 5 familles constitue autant de monographies asiatiques.

 

Depuis 20 ans ces «Contributions» n'ont rien perdu de leur intérêt et jouissent encore de la faveur des botanistes.

 

Flore d'Indo-Chine. — L'auteur de la monumentale Flore forestière de Cochinchine, Louis Pierre, devait, avec les subsides de la colonie, publier une Flore générale de l'Indo-Chine. Mais aucun commencement d'exécution n'avait été abordé en 1905.

 

Sous la direction de M. le Professeur Lecomte, je suis chargé :

De l'attribution des groupes de plantes aux collaborateurs ;

De la préparation des spécimens à leur distribuer ;

De la mise au point des manuscrits pour une rédaction uniforme ;

De la préparation des manuscrits pour l'impression, et de la correction des trois épreuves successives ;

De l'illustration dans le texte et des planches.

 

Le titre et les fonctions de Rédacteur de la Flore ne pouvaient me suffire ; comme botaniste, j'ai résolu d'être la cheville ouvrière de cette œuvre de très longue haleine.

 

Depuis 1907, mes publications, presque exclusivement, se classent ainsi :

1° Matériaux pour l'étude de la Flore de l'Indo-Chine ;

2° Fascicules de la Flore signés de mon nom.

 

La première partie se justifie parfaitement, car la Flore ne comporte que la langue française et, pour que les nouveautés soient valables, il faut les décrire en latin avec commentaires ; car certains groupes, familles ou genres, méritent d'être discutés, remaniés et ce seraient des hors-d'œuvre incapables d'être compris dans le cadre rigide de la Flore.

 

La plupart de mes notes sont consacrées à ces matériaux relatifs à la Flore.

 

Quant à la seconde partie, collaboration à la Flore, beaucoup de ses fascicules sont entièrement de ma main et il n'est pas exagéré d'affirmer que j'ai contribué à cet ouvrage presque autant que tous les autres collaborateurs ensemble.

 

La grande Flore coloniale comporte le plan général suivant : description et synonymie des familles, genres et espèces ; clefs des genres dans la famille et des espèces dans le genre ; distribution géographique des familles, genres et espèces; - noms indigènes et usages de ces dernières ; - illustration dans le texte et hors texte.

 

Elle sera complète en 7 volumes de chacun 1.000 pages au moins.

 

Parmi les collaborateurs de la Flore dirigée par M. le Professeur Lecomte, citons: le grand botaniste anglais Hooker, fils célèbre d'un père illustre ; Casimir de Candolle, le troisième d'une grande famille de botanistes ; deux membres de l'Institut, MM. Lecomte et Julien Costantin, puis les professeurs Guérin, Pitard, Beille, Dop, etc.

 

Notre Flore n'est pas seulement la première flore coloniale française, elle a permis la rédaction d'un ouvrage pratique de première valeur : les Bois de l'Indo-Chine, par M. le Professeur H. Lecomte; elle permettra d'en rédiger d'autres ; elle préside à l'exploitation méthodique des richesses végétales de l'Indo-Chine.

 

Il ne m'appartient pas d'apprécier le mérite de la direction de la Flore générale de l'Indo-Chine, ni de souligner l'importance et la portée considérable de l'œuvre.

 

Cependant, à titre de comparaison, une citation sera permise, qui a trait à un ouvrage de tous points similaire, le Flora of British India, par Joseph Dalton Hooker. Ces quelques lignes sont signées de son successeur éminent à la Direction des grands Jardins de Kew :

 

«La rédaction de la Flore est probablement un des plus grands services qu'il ait rendus au bien public, de même qu'elle a été un des objets les plus chers de sa vie... Bien que, dans la préparation de la Flore, sir J. Hooker ait reçu une aide étendue des savants du Jardin de Kew, l'ensemble de l'œuvre a passé sous ses yeux et le plus gros du travail, comprenant toutes les parties les plus difficiles, a été exécuté de sa propre main... Sir J. Hooker, sans doute trouve en lui-même sa propre satisfaction, ayant réalisé un des plus chers désirs de sa vie..., mais il m'apparaît que, dans l'intérêt public, de tels dévouements ne passent pas inaperçus... » Kew Bulletin, 1905, pp. 34 et suiv. (Lettre au duc d'Argyll, secrétaire d'Etat pour les Indes.)

 

Sir J. Hooker était déjà un des savants les plus considérables de l'Angleterre, chargé à la fois d'ans et de titres glorieux, membre depuis longtemps de la Société royale de Londres.

 

Quant a ma collaboration personnelle à la Flore générale de l'Indo-Chine, si elle comporte toute l'importance dont on a pu se faire une idée, je le dois à M. le Professeur Lecomte qui m'a chargé de ta rédaction de la Flore, qui ne m'a jamais distrait un seul instant d'une collaboration botanique vers laquelle me portaient mes goûts et mon activité naturelle, qui, bien au contraire, m'a toujours vivement encouragé dans cet objet et qui, enfin, dans la direction même de l'ouvrage, m'a déchargé d'une partie extrêmement importante, à mon avis, très délicate mais aride, je veux dire la gestion même de l'entreprise.

 

Dès 1920, pour la seconde fois, sur un rapport de M. Léon Guignard, l'Académie des Sciences m'honorait d'un prix de l'Institut (Houllevigue, 3.000 francs).

 

«Ces études de botanique systématique, poursuivies sans relâche depuis une vingtaine d'années, avec une activité et un soin des plus louables, méritaient d'être récompensés par, l'Académie.» (Rapport de M. Guignard, C. R. Acad. sc., 1920, séance du 20 déc., p. 1313.)

 

Etymologies. - L'Académie des Sciences m'ayant accordé sur le fonds Bonaparte une subvention pour études étymologiques, je tiens à en donner justification. De A à K, mon Dictionnaire étymologique des noms de genre des plantes est sensiblement à point ; de L à Z beaucoup de fiches sont établies, ce qui porte à environ 8.000 étymologies, toutes puisées aux origines des genres, et donne une idée de l'importance du labeur accompli dans les bibliothèques de Paris et de Kew, près de Londres.

 

Et si ce dictionnaire n'est pas en voie de publication c'est que les éditeurs reculent devant les prix demandés par les imprimeurs.

 

Méthodologie — Avoir étudié une science pendant 40 ans sans répit, ne va pas sans quelque expérience personnelle, sans avoir acquis une méthode ou tout au moins un ensemble de procédés pratiques et qu'il est bon de vulgariser afin d'éviter aux jeunes les incertitudes, les tâtonnements, les pertes de temps.

 

Ainsi ai-je fait et des notes ont été rédigées dans un réel esprit pratique et avec le vif désir d'être utile. Elles traitent des procédés de la< botanique exotique, forts différents de ceux de la botanique française; de la classification naturelle et des clefs dichotomiques si laborieuses à établir ; de l'emploi du dessin dans la botanique en particulier, et dont j'ai tiré moi-même un si bon parti, puisque toutes les espèces étudiées sont accompagnées d'un dessin précis d'analyse florale.

 

Herborisations. — La végétation des environs de Paris diffère à peine de celle de la Nièvre, qui m'est si parfaitement connue. Des herborisations en Bretagne, en Alsace, au Plateau central, à Nice, me rendent en outre capable de parler de la flore française tout en étant habile à diriger des excursions botaniques aux environs de Paris.

 

Cours — Mon expérience de l'enseignement, des causeries multiples aupublic dans les galeries du Muséum, les cours faits aux forestiers coloniaux, l'habitude de parler en des milieux divers devant un nombreux auditoire, me permettraient, à l'occasion, de donner des cours de botanique.

 

Administration — Avoir vécu 30 ans au Muséum, lui avoir donné pendant 30 ans le meilleur de soi-même ne va pas sans un grand amour pour la maison, sans réfléchir aux améliorations capables de lui préparer un avenir prospère, sans rendre quelque peu habile à collaborer à son administration.





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