Gutton : Travaux scientifiques

Documents disponibles au laboratoire de chimie du Muséum National d’Histoire Naturelle,

63 rue Buffon 75005 Paris

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Notice sur les travaux scientifiques

 

de

 

M. C. Gutton

Correspondant de l'Institut/Directeur du laboratoire national radioélectricité

 

 

SOMMAIRE

Le plus grand nombre des recherches qui font l'objet de cette notice sont relatives à 1'étude des oscillations hertziennes et de la propagation des ondes électromagnétiques, à la technique de la radiotélégraphie et de la radiotéléphonie.

 

Elles ont été commencées, en 1896, au Laboratoire de Physique de la Faculté des Sciences de Nancy, où R. Blondlot avait, depuis peu, mesuré la vitesse de propagation des ondes de Hertz et démontré expérimentalement que cette vitesse était égale à celle de la lumière.

 

Mes premiers essais ont été entrepris en vue de rechercher la forme du champ électromagnétique au voisinage d'un résonateur de Hertz.

 

Ce travail m'a conduit à m'occuper de la transmission des ondes d'un conducteur à un autre sans liaison métallique avec le premier. J'ai montré que, lors de ce passage, on pouvait toujours trouver sur le conducteur secondaire une ligne le long de laquelle la force électrique est nulle. De part et d'autre de cette ligne le flux d'énergie se sépare en deux parties, l'une réfléchie le long du fil primaire, l'autre transmise le long du fil secondaire.

 

J'ai étudié d'autre part les rapports de phase et d'intensité entre les ondes incidentes et les ondes transmises. Ces recherches ont fait le sujet de ma thèse de doctorat (1899).

 

En appliquant les résultats obtenus à l'étude du rayonnement d'une antenne radiotélégraphique, j'ai rendu compte des conditions dans lesquelles les ondes se séparent de l'antenne pour se propager ensuite le long du sol et indiqué une explication du rayonnement dirigé des antennes horizontales basses.

 

A l'époque de ce travail l'égalité des vitesses de propagation des ondes le long des fils et de la vitesse des ondes planes dans le milieu diélectrique n'était connue expérimentalement qu'avec l'approximation assez faible des expériences de Sarasin et de la Rive.

 

Je me suis proposé de faire des comparaisons plus précises de ces vitesses tant dans l'air que dans des milieux à plus grande constante diélectrique, le bitume et la glace.

 

En faisant interférer deux systèmes d'ondes dont l'un s'est propagé depuis l'oscillateur le long d'une ligne métallique et dont l'autre effectue une partie de son trajet dans l'air entre deux miroirs paraboliques, j'ai constaté que pour des fils de cuivre d'un millimètre de diamètre et des ondes de longueur inférieure au mètre, la vitesse le long des fils différait de moins de 1/200 de la vitesse des ondes planes.

 

Plus tard, en vue d'obtenir une plus grande précision et de pouvoir mesurer un faible écart de vitesse, j'ai repris la même question en comparant directement la vitesse de la lumière à la vitesse de propagation des ondes hertziennes le long des fils.

 

Je me suis servi à cet effet du phénomène de biréfringence électrique dans le sulfure de carbone. J'ai disposé l'appareil de façon à pouvoir constater l'arrivée simultanée à une cellule de Kerr de la lumière émise par une étincelle et d'oscillations électriques qui chargeaient le condensateur de cette cellule.

 

Ces expériences, dont le détail est indiqué dans les pages suivantes, ont déterminé la petite différence entre la vitesse de la lumière et la vitesse de propagation le long des fils d'ondes hertziennes amorties.

 

Cette différence varie avec la longueur de ces ondes, la résistance électrique des fils, le diamètre de ceux-ci. Pour des fils de cuivre cette différence devient très petite lorsque leur diamètre atteint 2 millimètres.

 

Les expériences de propagation dans la glace, dont il est question plus haut, m'ont permis de déterminer la constante diélectrique de la glace pour la fréquence très élevée qui correspond à. 0 m. 25 d'onde.

 

Pour expliquer un écart important avec les déterminations antérieures de Blondlot faites pour des longueurs d'onde plus grandes, 10 mètres environ, j'ai été amené à étudier la dispersion de la glace dans le spectre hertzien.

 

La glace sèche est très transparente et une faible dispersion normale fait passer sa constante diélectrique de 3 à 2 lorsqu'on augmente progressivement la longueur d'onde de Om.25 à 12 mètres.

 

La propagation le long des fils, des trains d'ondes amorties, se prête fort bien a la détermination d'intervalles de temps très courts, ou cherche à trouver le chemin, parcouru sur une ligne par les ondes, durant l'intervalle de temps à mesurer.

 

J'ai fait deux applications de ce procédé, l'une à la comparaison de la vitesse de la lumière dans l'air et dans un milieu réfringent dispersif, le sulfure de carbone ou la naphtaline monobromée, l'autre à la détermination de la durée d'établissement de la biréfringence électrique dans différents liquides.

 

Des indications sur les méthodes employées sont données plus loin dans cette notice.

 

Les résultats suivants ont été obtenus. La vitesse mesurée dans un milieu dispersif était la vitesse avec laquelle se propage, le long d'un faisceau de lumière, une perturbation dans l'état de polarisation; cette vitesse est la vitesse de groupe.

 

Pour les radiations les plus réfrangibles du spectre visible, le rapport des vitesses dans l'air et dans le liquide est très supérieur à l'indice de réfraction. Les valeurs trouvées correspondent à celles qui se déduisent de la formule de Lord Rayleigh et de Gouy.

 

A ma connaissance ces expériences sont, pour le cas de la lumière, les seules qui jusqu'ici constituent une vérification directe de cette formule et une mesure de la différence entre la vitesse de groupe et la vitesse de phase.

 

Les expériences sur la durée d'établissement de la biréfringence électrique m'ont permis de mesurer des temps de l'ordre du temps de relaxation de Maxwell, d'autant plus longs que la constante de Kerr est plus petite.

 

Les travaux dont il est question plus haut sont tous relatifs à des études faites en employant des oscillateurs de Hertz à étincelles qui émettent des trains d'ondes très amorties.

 

Dans toutes mes recherches postérieures sur les oscillations électriques, j'ai employé des oscillateurs à ondes entretenues par des lampes triodes.

 

Les premières en date ont été faites pendant les trois dernières années de guerre lorsque, mobilisé depuis août 1914, j'ai été envoyé à la fin de 1915 dans les services de la Télégraphie Militaire que dirigeait le Général Ferrié. A mon arrivée dans ces services, le Général Ferrié m'a chargé d'utiliser les lampes triodes, alors nouvelles et non encore employées pour l'émission radiotélégraphique, à la construction de postes à ondes entretenues.

 

Le but primitif était d'établir une liaison radiotéléphonique entre un avion et le sol.

 

Un premier appareil ayant donné des résultats utiles, l'emploi des appareils à lampes s'est développé et j'ai été chargé d'étudier un grand nombre de petits postes à lampes pour des usages et des longueurs d'onde très variés.

 

Tous ces appareils ont été adoptés non seulement par l'armée française mais aussi par les armées belge, anglaise, italienne, américaine, ils ont, dans la plupart des cas, remplacé les émetteurs à étincelles.

 

En 1916, j'ai pu établir une communication téléphonique entre deux .avions en vol. Ces travaux avaient surtout un but militaire mais ils m'ont nécessairement conduit à des recherches d'un intérêt plus général.

 

Afin de pouvoir réaliser rapidement les nombreux postes radiotélégraphiques à lampes qui étaient demandés, j'ai du travailler les phénomènes dont les lampes triodes sont le siège et établir une théorie de leur fonctionnement.

 

En m'aidant de renseignements et d'idées communiqués par le Général Ferrié et ses collaborateurs, j'ai rédigé une notice théorique sur le fonctionnement de la lampe triode comme relais amplificateur, comme oscillateur et comme détecteur.

 

Cette notice constitue le premier travail étendu sur la lampe électronique, il a été tenu secret jusqu'à la fin des hostilités et publié ensuite, eu partie, par la Revue Générale de l'Electricité.

 

De retour à la Faculté des Sciences de Nancy, j'ai continué à travailler les questions d'obtention des oscillations entretenues et d'amplification des courants alternatifs. Avec la collaboration de M. Touly, j'ai réalisé un oscillateur à ondes très courtes, dont la longueur était de l'ordre du mètre. Il a servi à reproduire avec beau-coup de netteté les expériences de Hertz.

 

Cet oscillateur à ondes courtes a été employé bien souvent dans les laboratoires, soit sous sa forme primitive, soit sous la forme symétrique indiquée plus tard par M. Mesny. Il sert aussi maintenant à établir des liaisons radiotélégraphiques ou radiotéléphoniques.

 

Ayant orienté vers l'étude des ondes entretenues de courte longueur, le travail de mon assistant M. Pierret, nous avons, par des procédés analogues à ceux de Barkhausen, obtenu des transmissions radiotéléphoniques sur des ondes de 0 m. 18 environ.

 

C'est à partir de ces expériences, qu'a été réalisée récemment une communication par ondes de 0 m. 18 entre les terrains d'aviation anglais et français de part et d'autre du Pas-de-Calais.

 

Des recherches sur les harmoniques des oscillateurs m'ont conduit a indiquer un moyen d'isoler facilement chacun des harmoniques, le long de circuits oscillants distincts.

 

J'ai fait plusieurs séries de recherches sur la décharge en haute fréquence et sur les propriétés diélectriques des gaz ionisés dans les champs de haute fréquence. Ces travaux ont été entrepris en vue d'étudier au laboratoire les phénomènes très complexes dont la haute atmosphère est le siège, lors du passage des ondes radioélectriques.

 

Mes recherches ont été l'origine de travaux expérimentaux d'élèves ou de collaborateurs poursuivis sous ma direction tant à Nancy qu'à Paris, au Laboratoire National de Radioélectricité.

 

Je citerai, par exemple, ceux de M. Laville sur la propagation des ondes courtes le long des fils, de H. Gutton sur des phénomènes de résonance que l'on observe dans les gaz ionisés par le passage d'une décharge dans le gaz, de Mlle Chenot sur la propagation des décharges en haute fréquence dans les tubes contenant un gaz raréfié, propagation dont j'ai donné récemment une théorie, de M. Beauvais sur la réflexion totale des ondes électromagnétiques, de Me Mihul sur la perméabilité du fer aux fréquences élevées.

 

Hors du domaine des oscillations électriques, j'ai étudié avec M. Laville un électromètre sensible pour la mesure des différences de potentiel alternatives et l'ai appliqué à la détermination des constantes d'appareils téléphoniques.

 

J'ai publié une étude du régime instable des relais amplificateurs, dirigé un travail de M. Riéty sur les courants de diaphragme, de M. Detrait sur le frottement des liquides le long d'une paroi que ce liquide ne mouille pas, construit une balance d'induction destinée à la recherche des obus enterrés dans les champs à remettre en culture.

 

A l'époque où je travaillais au Laboratoire de R. Blondiot, je me suis occupé des causes qui pouvaient troubler l'observation difficile des radiations qu'il étudiait et fait des expériences sur les influences perturbatrices des champs magnétiques.

 

Enfin je me suis attaché à déceler, par un procédé photographique, l'existence de radiations très pénétrantes émises~par un bec Auer. J'ai dû abandonner ces essais après plusieurs années, ayant acquis la conviction personnelle que ces radiations existaient mais étaient si faibles qu'il ne m'était pas possible de prouver cette existence, d'une façon absolument certaine, par des procédés photographiques.

 

Outre les notes et mémoires relatifs à mes recherches, j'ai publié un traité d'Electrotechnique, un ouvrage sur la lampe à 3 électrodes, un traité de Radiotechnique générale, un ouvrage élémentaire sur la T. S. F., une brochure sur les lignes téléphoniques, des articles de vulgarisation dans quelques revues.

 

Le cours d'électricité que je professe à l'Ecole nationale de l'Aéronautique a été autographié par les soins de cette École.

 

 

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