Guignet : travaux scientifiques

Documents disponibles au laboratoire de chimie du Muséum National d’Histoire Naturelle,

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NOTICE

Sur les

TRAVAUX SCIENTIFIQUES

DE M. ERNEST GUIGNET

 

 

I.

Emploi du permanganate de potasse comme agent d'oxydation pour le dosage du soufre de la poudre et des composés organiques sulfurés (en commun avec M. Cloëz, examinateur des élèves à l'École Polytechnique).

(Comptes rendus, t. XLVI, p. 1110. - Journal l'Institut, 1858, p. 300. - Journal für praktische Chemie, Bd. LXXV, s. 175.)

 

Le dosage du soufre de la poudre de guerre est une opération facile ; mais il n'en est pas de même pour le soufre engagé dans les composés organiques.

Le moyen proposé donne constamment de bons résultats. Quand on opère à chaud et en vase clos avec un excès du réactif oxydant, on transforme complètement le soufre en acide sulfurique, que l'on précipite finalement par un sel de baryte.

 

II.

Production d'acide nitrique et de nitrates par l'action du permanganate de potasse sur les matières organiques azotées (en commun avec M. Cloez).

(Comptes rendus des séances de l'Académie des Sciences, t. XLVII, p. 710.- Annalen der Chemie und Pharmacie, Bd. CVIII, s. 378.)

En chauffant une matière organique azotée avec une dissolution de permanganate de potasse, on obtient constamment du nitrate de potasse ; l'azote de l'ammoniaque s'oxyde de la même manière, mais en partie seulement, une portion de cet élément se dégageant à l'état de liberté.

Ces expériences ont servi à éclairer et à compléter la théorie de la nitrification, jusque-là fort obscure et reposant sur des données incomplètes et inexactes.

 

III.

Production, à la température rouge, d'un nouvel oxyde de chrome hydraté, doué de propriétés toutes spéciales.

(SALVETAT, Comptes rendus, t. XL VIII, p. 295, 7 février 1859. —LE MÊME, Répertoire de Chimie, 4e livraison, janvier 1859. — LE MÊME, Bulletin de la Société d'Encouragement, t. VI, p. 321, 11 mai 1859. — LE MÊME, Bulletin de la Société d'Encouragement, juin 1859. — SHIPTON, Rapport du Jury international de l'Exposition de Londres, 1863, classe II, section A, p. 74. — SCHEUBER-KESTNER, Bulletin de la Société Chimique, année 1865, 1er semestre, p. 23 et 413- — CHEVREUL, Comptes rendus, t. LVII, p. 1060, 8 décembre 1863.)

Au point de vue purement chimique, la préparation de cet oxyde est très curieuse; car elle se réduit à la production d'un oxyde hydraté qui a pris naissance à la température du rouge sombre. Cet oxyde se forme par la calcination d'un mélange de 3 parties d'acide borique cristallisé et 1 partie de bichromate de potasse. Il se trouve dans le mélange sortant du four, à l'état de borate double de sesquioxyde de chrome et de potasse, lequel est ensuite décomposé par l'eau. La présence de la potasse n'est pas nécessaire; car on obtient le même produit par l'action de l'acide borique sur l'acide chromique ou sur le sesquioxyde de chrome hydraté ordinaire.

M. Shipton, élève de M. Hofmann, croyait que ce nouvel hydrate devait contenir nécessairement un peu d'acide borique; mais les expériences de M. Scheurer-Kestner et celles de l'auteur ont démontré qu'on peut enlever au produit les dernières traces d'acide borique sans altérer la nuance.

Il est donc bien établi que ce curieux produit est un oxyde de chrome hydraté. D'après M. Salvétat et d'après l'auteur, la formule de cet oxyde serait Cr2O3, 2HO. Les analyses postérieures de M. Scheurer-Restner s'accordent mieux avec la formule 2Cr2O3, 3HO. Il est d'ailleurs impossible de former des combinaisons particulières de cet hydrate avec les acides. Par l'action des acides bouillants, le nouvel hydrate donne les mêmes produits que les autres hydrates d'oxyde de chrome.

Soumis à l'action de la chaleur, il noircit vers 200 degrés, dégage de l'eau et laisse un résidu d'oxyde de chrome intermédiaire qui se change au rouge vif en sesquioxyde anhydre.

 

IV.

Action des sels solubles sur les sels insolubles ; affinité spéciale de l'acide phosphorique pour les sesquioxydes.

(Comptes rendus, t. XLIX, p. 454, 26 septembre 1859.)

Ce travail fait connaître un certain nombre de réactions curieuses qui .s'accomplissent quand on traite les phosphates de protoxydes de cobalt, de nickel, d'argent, etc., par des solutions bouillantes de sels neutres de sesquioxydes de fer, de chrome, etc.

Il s'opère dans ces conditions une décomposition mutuelle tout à fait complète. Quelquefois la réaction a lieu à froid. En tout cas, on obtient des phosphates de sesquioxydes insolubles et des sels neutres de protoxydes qui restent en dissolution.

L'analyse chimique peut utiliser avec avantage quelques-unes de ces réactions.

 

V.

Etude d'un nouvel acide produit par l'action du permanganate de potasse sur la nitrobenzine du commerce (en commun avec M. Cloez).

(Comptes rendus, t. LII, p. 104, 1861.)

Cet acide ressemble à l'acide nitrobenzoïque, mais sa composition est différente ; elle se rapproche beaucoup de celle de l'acide nitrocinnamique.

C'est une substance incolore, peu soluble dans l'eau, volatile sans décomposition. On l'obtient en cristaux très nets, soit par dissolution, soit par sublimation.

Les auteurs l'ont produit d'abord par l'action d'une solution bouillante de permanganate de potasse sur la nitrobenzine ; mais il est plus facile de le préparer en faisant bouillir de la nitrobenzine avec un mélange d'acide nitrique et de bichromate de potasse.

 

VI.

Action de l'amalgame de sodium sur le sulfure de carbone.

(Bulletin de la Société Chimique, 1861, p. 111.)

Cette importante réaction, qui donne lieu à la formation d'un composé très-soluble dans l'eau et fortement coloré en rouge de sang, a été signalée pour la première fois par l'auteur.

Plusieurs chimistes étrangers, MM. Lœwig et Hermann, M. 0. Lœw, ont continué cette étude et sont arrivés à produire des composés intéressants.

 

VII.

Recherches sur la composition des outremers artificiels.

(Répertoire de Chimie appliquée, année 1861, p. 427•)

Un des principaux résultats de ces recherches est exposé dans un excellent résumé de tous les travaux récents sur l'outremer dû à M. Scheurer-Kestner.

La plupart des chimistes qui ont analysé les outremers du commerce ont opéré sur des mélanges. Ceux qui ont essayé de représenter la composition de l'outremer par une formule, M. Breunlin par exemple, ont discuté les proportions relatives de soufre contenues dans les diverses variétés d'outremer ; ils ont comparé le poids du soufre dégagé à l'état d'acide sulfhydrique, quand on traite l'outremer par un acide, au poids du soufre qui se dépose dans les mêmes circonstances.

Tous ces raisonnements et les formules qui en découlent pèchent complètement par la base.

L'auteur a constaté que tous les outremers artificiels contiennent du soufre à l'état de simple mélange. La proportion de soufre libre s'élève souvent à plus de 3 pour 100 du poids de l'outremer.

On sépare le soufre libre par l'action du sulfure de carbone ou par l'ébullition avec une solution de soude caustique. La couleur du bleu d'outremer reste absolument la même après la séparation du soufre.

Il est donc nécessaire de reprendre les analyses des outremers du commerce après les avoir purifiés. C'est en opérant de cette manière qu'on peut découvrir la véritable constitution chimique de ces importants produits.

 

VIII.

Phénomènes de transport à travers les corps poreux; application à l'analyse immédiate; dialyse.

(Comptes rendus, t. LV, p. 740, 10 novembre 1862.)

Le célèbre chimiste Graham a désigné sous le nom de dialyse la méthode qui consiste à séparer, à l'aide d'un diaphragme de parchemin végétal, certains corps cristallisant aisément (cristalloïdes), d'autres corps incristallisables (colloïdes), ces diverses substances étant d'ailleurs en dissolution dans un même liquide.

M. Graham attribue au parchemin végétal un rôle actif; il le regarde comme un colloïde qui aurait la double propriété de laisser passer les cristalloïdes et de refuser le passage aux autres colloïdes.

L'auteur du travail ci-dessus désigné a cru, au contraire, que le rôle du parchemin végétal est purement mécanique, et il l'a démontré en remplaçant les dialyseurs de parchemin par des vases poreux tels que ceux qu'on emploie pour les piles. Tous les phénomènes de la dialyse se produisent aisément avec ces dialyseurs d'un usage très commode.

De plus, certaines liqueurs (par exemple la solution d'oxyde de cuivre ammoniacal) attaquent le papier parchemin. Comme elles sont sans action sur les vases poreux, on peut les soumettre à la dialyse, ce qui était impossible avec les appareils de M. Graham.

 

IX.

Action de l'ammoniaque sur la poudre-coton. — Nouvelle réaction propre aux nitrates.

(Comptes rendus, t. LVI, p. 358, 23 février 1863.)

D'importants travaux dus à M. Paul Thenard et à M. Schutzenberger ont démontré que l'ammoniaque peut agir sur certaines matières organiques neutres, notamment sur le coton, en donnant des produits fortement azotés.

Le présent travail a pour but de constater une réaction du même genre qui s'opère avec la plus grande facilité, même sous la pression ordinaire, quand on fait bouillir de la poudre-coton avec de l'ammoniaque liquide.

Il se forme ainsi une matière brune soluble dans les alcalis, précipitable par les acides et facile à purifier. Elle renferme beaucoup d'azote.

On obtient en même temps du nitrate d'ammoniaque. On peut le séparer aisément des eaux mères en y ajoutant du sous-acétate de plomb; il se forme ainsi du nitrate de plomb bibasique qui est peu soluble et se dépose en une poudre cristalline.

Une liqueur qui ne renferme que 1 pour 100 de nitre donne un précipité sensible avec le sous-acétate de plomb.

Ce réactif peut donc être employé dans certains cas pour reconnaître et même pour séparer les nitrates.

 

X.

Composition chimique et formation des terrains de la grande oolithe et du forest-marble (dans la Haute-Marne).

(Comptes rendus, t. LXIX, p. 1028.)

Une grande partie du sol de la Haute-Marne est constituée par de vastes plateaux appartenant à la formation géologique supérieure à la grande oolithe et désignée sous le nom de forest-marble. Tel est le plateau de Langres, très connu au point de vue géographique, car il renferme dans ses contreforts les sources d'importantes rivières.

Comme les terrains du forest-marble reposent sur les couches calcaires de la grande oolithe, comme toutes les pierres errantes, souvent trop nombreuses, que renferment ces terrains, sont aussi calcaires, on avait toujours regardé les terres des plateaux de la Haute-Marne comme des terres calcaires; de là des indications absolument fausses au point de vue agricole.

Les analyses chimiques ont prouvé tout au contraire que les terrains du forest-marble (désigné dans le pays sous les noms d'herbues et de rougets) sont argilo-siliceux ; qu'ils ne contiennent souvent que 1à 2 pour 100 de calcaire, plus une quantité variable d'oxyde de fer s'élevant jusqu'à 10 pour 100 dans les rougets.

Toutes ces terres sont à peu près stériles. Celles qui sont à la portée des villages ou des fermes ont reçu des fumures depuis un temps immémorial ; elles passent pour très fertiles. Celles qui sont trop éloignées ne sont presque jamais fumées ; les cultivateurs les croient stériles ou tout au moins froides, bien que la composition chimique des unes et des autres soit exactement la même.

Au point de vue géologique, les terrains du forest-marble donnent lieu à des observations intéressantes, pour lesquelles il est nécessaire de se reporter au travail de l'auteur.

 

XI.

Recherches sur la composition chimique du vert de Chine (lokao) (en commun avec M. Cloez).

(Bulletin de la Société Chimique de Paris, t. XVII, p. 247, 1872.)

Le vert de Chine, signalé pour la première fois (en 1848) comme matière colorante distincte, par Daniel Rœchlin, a été l'objet de nombreux travaux dus à MM. Persoz, Michel (de Lyon), Charvin, etc. Ce dernier est même parvenu à reproduire en petit le vert de Chine à l'aide des nerpruns indigènes.

Après avoir attiré vivement l'attention des chimistes et des teinturiers, le vert de Chine est tombé dans un oubli à peu près complet. Cette couleur a été délaissée pour les magnifiques verts d'aniline ; elle était d'ailleurs d'un emploi difficile en teinture et d'un prix fort élevé.

Le vert de Chine ou lokao est une véritable laque, contenant une forte proportion de matières minérales diverses : chaux, alumine, oxyde de fer.

Il retient aussi beaucoup d'humidité. La partie sur laquelle nous avons opéré perd 9,4 pour 100 d'eau par une dessiccation à 100 degrés.

Soumise à l'incinération, la matière laisse un résidu grisâtre de 26,2 pour 100.

Les auteurs ont extrait de cette laque impure une matière colorante d'un bleu très-pur qu'ils ont appelée lokaïne. Cette substance est un véritable bleu de lumière; aussi, quand elle est mélangée de jaune, comme dans le vert de Chine brut, elle donne en teinture de très-beaux verts lumière.

Au point de vue chimique, la lokaïne se comporte comme un acide faible. Elle ne contient pas d'azote.

La lokaïne est un glucoside. Elle se dédouble très-nettement, par l'action de l'acide sulfurique faible, en glucose et en une matière nouvelle, la lokaétine, qui donne avec les alcalis un produit violet très-stable et de la teinte la plus riche.

Il est donc à désirer qu'on réussisse à produire industriellement le vert de Chine à l'aide des nerpruns indigènes.

 

TITRES.

Élève à l'École Polytechnique, promotion de 1849.

Classé dans le Génie militaire.

Démissionnaire en 1851, en vue de se livrer spécialement à l'étude de la Chimie.

Aide-préparateur au laboratoire de l'École Polytechnique jusqu'en 1854.

Nommé Répétiteur-adjoint de Physique à l'École Polytechnique et ayant conservé ces fonctions pendant dix ans, jusqu'en 1864.

Professeur de Chimie et de Physique, pendant ce même temps, à Sainte-Barbe et à l'institution Barbet.

Démissionnaire en 1864, afin de suivre des travaux de Chimie agricole, dans un laboratoire particulier, où il dirigeait plusieurs élèves.

Nommé, en 1872, Répétiteur-adjoint de Chimie à l'École Polytechnique (présenté à l'unanimité par le Conseil d'Instruction).

Dans le courant de l'année 1872, Conférences de Physique et de Chimie faites au camp de Satory pour l'instruction des Officiers de la division Pajol.

 

 

Mots clefs : acide, action, ammoniaque, analyse, azote, bichromate, bleu, borique, calcaire, chimie, chine, chrome, colloïde, composition, dialyse, dissolution, étude, forest-marble, formation, formule, hydrate, lokaïne, lokao, nerprun, nitrate, nitrobenzine, oolithe, outremer, oxyde, permanganate, phosphate, plomb, potasse, poudre-coton, protoxyde, réaction, sel, sesquioxyde, soufre, terres, travail, végétal, vert, guignet






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