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Notice sur les travaux
scientifiques
de
Je donnerai plus loin le résumé analytique de mes travaux, mais on me
permettra d'en fixer d'abord le caractère en rappelant brièvement quelques
résultats et en montrant comment mes recherches s'enchaînent.
Il me suffira pour cela d'indiquer les principales lignes
de l'étude que je poursuis encore actuellement sur l'oxydation lente.
Schönbein est le premier qui ait montré tout l'intérêt de
cette analyse. C'est lui qui a mis en évidence les phénomènes d'oxydation
communiquée ; lui aussi qui a révélé, à côté du produit oxydé principal, la
présence de l'eau oxygénée et parfois de l'ozone.
De tels faits avaient frappé les chimistes. Aussi, les
théories ingénieuses n'ont pas manqué pour en donner l'explication. Mais le domaine
expérimental ne s'était guère agrandi.
On pouvait, il est vrai, reconstituer par hypothèse
l'histoire de l'oxydation en imaginant la formation transitoire d'un peroxyde dont l'eau oxygénée
était le débris et dont l'oxydation communiquée était la trace.
Mais ce peroxyde, véritable clef de la réaction,
demeurait à peu près insaisissable. C'est que la plu-part des observateurs ne
cherchaient leurs matériaux que parmi les produits oxydables de la chimie organique.
J'ai été assez heureux pour trouver dans la chimie minérale un cas beaucoup plus
instructif, un exemple type où j’ai pu saisir le peroxyde, déterminer ses
conditions de stabilité et analyser dans le détail le mécanisme de l’oxydation.
Cet exemple privilégié est celui des sels de cérium.
On verra comment j’ai reconnu l’existence du carbonate
double de cérium peroxydé, comment je l’ai isolé et comment j’ai démontré son
rôle dans l’oxydation spontanée du carbonate céreux , c est l’une des conclusions de
ma thèse (1899).
Peu de temps après parurent en Allemagne des publications importantes.
Baur, puis Engler et ses élèves, donnèrent une suite directe à mon travail et y
ajoutèrent une observation et une interprétation nouvelles (1902, 1904) ; mais
déjà les belles expériences de Manchot et de ses collaborateurs sur l’oxydation
des sels ferreux (1901) venaient, à point nommé, se ranger à côté de l’exemple
du cérium et sous la même explication.
De nom côté, je travaillais isolé et sans aide ;
aussi ai-je donné, dès ce moment, à mes recherches une orientation différente
afin de ne pas les confondre avec celles des savants allemands.
Le composé peroxydé si mobile que j’avais pu surprendre
au cours de l’oxydation spontanée du sel céreux est un générateur d’eau
oxygénée au contact des acides et un oxydant actif en milieu alcalin.
On pouvait donc espérer produire avec le sel céreux
et analyser dans leur mécanisme toutes les formes possibles de l’oxydation
communiquée.
L’oxydation du glucose, provoquée par un sel de cérium,
m’a paru tout à fait caractéristique à cet égard, et l’on peut dire que c’est
actuellement l’exemple le plus net et le mieux connu de catalyse oxydante.
Mais j’ai voulu multiplier des exemples analogues, et,
pour accorder ma recherche à des travaux antérieurs, j’ai pris comme sujet
d’étude l’oxydation catalytique des phénols.
On connaît la découverte classique de la laccase par M.
Gabriel Bertrand et sa démonstration de l'activité de l'acétate de
manganèse comme oxydase de l'hydroquinone.
J'ai pensé que l’acétate de cérium agirait de même et, que
son action, étant mieux connue, pourrait éclairer les phénomènes de ce genre.
En effet, l'expérience a confirmé cette prévision :
l'acétate de cérium excite l'oxydation de l'hydroquinone ; mais, ce que j’étais loin de
supposer, c'est que l'acétate du lanthane, dont on ne connaît qu'une série de
sels, l'excite tout aussi vivement.
Et il en est de même des congénères du lanthane (néodyme, praséodyme,
yttrium, etc.).
Le champ de mes expériences s'élargissait ainsi au-delà de
ce que j'avais prévu, et il fallait, de toute nécessité, faire une
comparaison méthodique entre ces activités diverses pour en chercher la cause.
Je me suis donc proposé de déterminer la vitesse
d'oxydation de l’hydroquinone par l'air sous l'influence de ces excitateurs.
C'était là un problème banal en apparence, et en réalité tout nouveau.
En l'examinant de près on s'aperçoit que, pour définir la vitesse d'oxydation
d'un liquide par l'oxygène libre, il est indispensable de le maintenir
saturé d'oxygène dissous, malgré la réaction oxydante.
Il faut donc soumettre ce liquide à une agitation
extrêmement vive, pratiquée de telle sorte qu'il s'émulsionne avec l'air; et
on reconnaît alors que, pour faire la mesure précise de l'oxygène absorbé par
minute, il devient nécessaire d'inscrire à chaque instant la pression.
L'appareil doit, évidemment, malgré l'agitation, demeurer hermétiquement
clos et conserver une température rigoureusement constante.
On imagine sans peine toutes les difficultés qu'il faut
résoudre avant de réunir toutes ces conditions dans une technique
commode et sûre.
Après une longue suite d'essais, ces difficultés ont été
résolues. Mon appareil est disposé de telle sorte qu'on peut, à temps voulu,
mélanger les réactifs.
Aussitôt, l'absorption de l’oxygène commence et le
manomètre trace le graphique de la réaction oxydante.
Chaque expérience laisse de la sorte un document qui
demeure prêt pour le contrôle et pour l'interprétation.
L'étude de ces documents est instructive. D'abord, on constate
qu'à une température déterminée la courbe obtenue pour un système donné est
définie ; c'est un caractère d'identité du système.
De plus, on reconnaît que, dès l'instant où elle a
commencé, l'oxydation change rapidement d'allure. Le système change donc de
propriétés, et l'inscription graphique fait apparaître des phénomènes qu'aucune
autre
méthode
n'avait encore révélés.
On verra plus loin que les résultats dépassent l'objet que
je
m'étais
d'abord proposé. On pourra, en particulier, observer un cas tout
nouveau de catalyse oxydante en examinant la photographie des tracés fournis par
l'acétate de nickel.
On n'avait jamais soupçonné l'activité de ce sel comme
oxydase. C'est qu'elle ne dure qu'un instant. Mais l'ayant reconnue, j'ai réussi à la
rendre durable et à l'expliquer. Elle est justement proportionnelle
à la dose d'hydrate de nickel libre dans la dissolution, si bien qu'elle permet
à la fois d'atteindre l'hydrolyse de l'acétate et d'estimer l'acidité
extrêmement faible du produit phénolique.
Ainsi, par l'étude cinétique de l'oxydation le chimiste
peut arriver à une analyse plus profonde des propriétés du sel dissous, et aussi du
composé organique oxydable.
En même temps, il voit surgir des exemples inattendus d'oxydation
communiquée, qui s'interprètent par des mécanismes nouveaux.
On peut donc faire crédit à la méthode ; son utilité
s’affirme autant par les problèmes qu'elle soulève que par ceux
qu'elle résout.
A quelles applications pratiques peuvent donner lieu de telles
recherches ?
Remarquons qu'elles touchent de très près à l'étude des
diastases oxydantes et qu'elles intéressent directement la biologie.
Observons aussi que l'industrie chimique doit
d'importants progrès au perfectionnement des méthodes catalytiques.
Mais les applications de la science se font souvent par
des voies indirectes, et je puis en donner un exemple tiré de mes
travaux.
Parmi les procédés d'oxydation, il en est un que j'ai eu
plus
d'une
fois l'occasion d'appliquer, c'est le procédé électrolytique.
Je me suis donc aussi préoccupé de l'étude des vitesses d'oxydation par
l'électrolyse. Ici encore c'est une méthode pneumatique qui m'a servi.
J'ai cherché à mesurer par différence l'oxygène retenu en
déterminant à chaque minute l'oxygène libéré.
Un artifice très simple m'a permis d'y réussir. Le gaz dégagé
dans le compartiment positif du vase à électrolyse n'est pas directement évacué
dans l'atmosphère ; on ne lui donne issue que par un tube capillaire. Il en résulte un
excès
de
pression qui, à chaque instant, est proportionnel au débit. Un simple
manomètre peut donc fournir l'indication continue du phénomène électrolytique. De
là on tire aussitôt le principe d'un ampèremètre ; car, si l'on électrolyse de la soude,
il n'y a plus de réaction oxydante, tout l'oxygène se dégage, et l'indication
continue de son débit est aussi l'indication continue et précise de l'intensité
du courant.
J'ai poussé plus loin les conséquences.
Qu'on suppose le courant constant et qu'on chauffe
le tube capillaire. La viscosité du gaz qui le traverse varie beaucoup avec la
température. Le niveau du manomètre va donc se déplacer, et il devient un
thermomètre.
Le capillaire peut être éloigné autant qu'on le veut de
l'appareil, sa température seule importe à la mesure, et, s'il est en platine, elle
peut dépasser 1600 degrés.
J'ai longuement élaboré cette nouvelle méthode et j'ai
réalisé un pyromètre dont la lecture est très commode et qui présente, en
outre, tous les avantages d'un thermomètre à gaz.
Il a été imaginé aussi, en même temps, par Bredig et Hahn
RÉSUMÉ ANALYTIQUE.
En abordant des recherches de chimie, je m'étais proposé l’étude de la
transformation des sels métalliques par les divers agents
oxydants.
Le choix des matériaux était là de première importance; or,
en examinant de près les propriétés des différents sels, il m'a semblé que ceux
du cérium méritaient une attention particulière.
On ne connaissait, en effet, que deux séries de sels
de cérium, les sels céreux incolores et les sels cériques jaunes; et, par une exception
remarquable, les dissolutions céreuses et cériques présentent à peu près la
même
stabilité.
Mais on n'avait préparé que des dissolutions acides ou neutres.
J'ai observé qu'on pouvait maintenir le cérium dissous en milieu alcalin, et
qu'aussitôt l'ordre de stabilité des sels aux divers degrés d'oxydation
subissait des changements profonds. Ces faits donnaient au cérium une importance
parti-culière. Je me suis donc attaché à en faire l'étude et j'ai d'abord préparé
des sels de cérium purs.
Mots clefs :
acétate, acide, activité, analyse, appareil, capillaire,
carbonate, catalyse, catalytique, céreux, cérium, chimie, dissolution, électrolyse, électrolytique,
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