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Titres et travaux scientifiques
de
LA GÉOLOGIE DU BASSIN DE LA MÉDITERRANÉE OCCIDENTALE
PROBLÈMES -
PLAN DE RECHERCHES
ENSEIGNEMENT
INTRODUCTION
L'étude géologique des régions
entourant la Méditerranée occidentale a débuté au XIXe siècle par des levers de
reconnaissance dont E. SUESS et P. TERMIER ont tiré parti pour tenter le
raccord des chaînes nord-africaines et espagnoles avec l'Italie et les Alpes.
À cette époque, les montagnes
de l'Espagne méridionale étaient mal connues et le Maroc tout à fait ignoré.
Depuis une vingtaine d'années,
grâce à des notions plus précises sur les terrains sédimentaires qui
participent aux plissements des montagnes circum-méditerranéennes, et sur ceux
qui leur sont postérieurs, les problèmes changent d'aspect.
Il devient possible de
reconstituer l'histoire des mers qui depuis l'ère secondaire ont séparé de la
très vieille Afrique un continent septentrional, premier fondement de notre
Europe. Ces «vieux bâtis» selon le terme classique, ont été diversement plissés
au cours des temps primaires, mais depuis lors, ils ont formé chacun un tout
pratiquement rigide.
Par contre, la zone qui les a
séparés durant les ères secondaire et tertiaire eut une histoire complexe.
D'abord elle fut occupée par des mers qui subirent de nombreuses vicissitudes,
débordant à certaines époques sur les vieux continents ; puis elle se rétrécit
sous l'effet de poussées tangentielles et des chaînes montagneuses importantes
s'y formèrent par plissement.
Les reliefs du pourtour de la
Méditerranée en sont les restes, partiellement désarticulés par une phase terminale de
distensions et d'effondrements qui permit à la mer d'occuper son
bassin actuel.
Une vue d'ensemble du domaine
méditerranéen doit comporter l'analyse de son cadre ancien — matière délicate
et sur laquelle la documentation est encore insuffisante — puis l'histoire complète de ses
mers anciennes, de la formation des divers tronçons montagneux, enfin l'étude
des transformations, géologiquement très récentes, qui aboutirent à la
géographie actuelle.
Les analyses sont assez avancées
pour que l'on commence à saisir les étapes de cette évolution et que l'on tente de
les interpréter à la lumière des grandes doctrines géologiques modernes. Or, celles-ci,
en ce qui concerne les sillons marins permanents du Secondaire,
dits géosynclinaux, le mécanisme de la formation des chaînes de
montagnes, ou les déplacements relatifs des vieux bâtis continentaux, sont
basées sur des observations faites dans d'autres régions et qui comportent
encore une grande part d'hypothèse.
Par sa situation, par l'étroit
rapprochement du vieux bâti africain, connu jusqu'au bord Sud du Rif, et du
socle européen formant la Meseta espagnole, le bassin de la Méditerranée
occidentale est un lieu de choix pour confronter ces doctrines avec les faits observés.
Il apparaît déjà que la
confrontation n'est pas pleinement satisfaisante. La portée d'une étude minutieuse
des régions
méditerranéennes dépassera donc le cadre local puisqu'elle aboutira à une
critique objective et peut-être à l'amendement de certaines théories générales de
la géologie.
Dans les lignes qui suivent,
après un bref rappel historique, le lecteur trouvera quelques détails sur
la façon dont se posent les principales questions, sur le programme des recherches
actuelles et de l'enseignement qui pourrait en découler, enfin, des
considérations au sujet du plan international sur lequel se situent les travaux.
Une grande mer, la Téthys de
SUESS ou la Mésogée de H. DOUVILLÉ, ceinturait le globe à l'époque secondaire.
Elle courait
des Antilles à Gibraltar, aux Alpes, à l'Asie Mineure, à l'Himalaya et aux îles
de la Sonde. NEUMAYR a souligné le rôle capital qu'elle a joué, entre les vieux
blocs continentaux de l'Eurasie primaire au Nord, du continent
Indo-Africano-Brésilien ou Gondwanie au Sud.
Les sédiments qui s'y sont
déposés jusqu'au Tertiaire ont été disloqués sur tout son parcours par des
plissements tangentiels; un immense édifice montagneux en est résulté, les
Alpides de SUESS
Certains de ses segments
demeurent presque inconnus, mais, dans les Alpes mêmes, Marcel BERTRAND, HEIM,
LUGEON et leurs élèves ont analysé sa structure avec une admirable précision.
Notre Méditerranée n'est que
l'humble reste de l'immense Téthys et les chaînes qui l'entourent font partie
du cortège des Alpides.
Mais si cette vue générale est
admise, les modalités de la formation des plissements y restent mal connues.
Les deux extrémités du bassin, régions privilégiées, pourraient nous fournir à
cet égard, des données essentielles.
A l'Est, en effet, les chaînes
d'Asie Mineure pincées entre l'Arabie encore africaine et la plate-forme russe
; à l'Ouest, l'étroit rapprochement des vieux bâtis africain et européen,
permettent d'étudier plus aisément qu'ailleurs les rapports exacts de ces
anciens socles avec l'édifice alpin.
A l'Orient, les recherches
progressent peu, faute de cartes topographiques convenables. Par contre, aux
alentours de la Méditerranée occidentale, nos connaissances s'accroissent
rapidement.
Les géologues algériens ont
démêlé depuis longtemps que sur le bord de la très vieille Afrique toute la
partie septentrionale de l'Algérie et de la Tunisie, est formée d'éléments
alpins par le caractère de leurs sédiments et par les étapes des plissements
dans lesquels ceux-ci sont engagés.
En Espagne, après les cartes de
reconnaissance de CORTAZAR, MALLADA, VIDAL, HERMITE, puis de la Mission
française d'Andalousie (1885), les progrès se sont ralentis.
Seuls les travaux, précieux
mais limités, de NICKLÈS, Robert DOUVILLÉ et NOLAN ont marqué, alors, la
vigilance des naturalistes français quant à la géologie du Sud de la Péninsule.
C'est sur ces premières données
relativement à l'Afrique du Nord et à l'Espagne méridionale que E. SUESS, puis
P. TERMIER tentèrent leurs raccords structuraux. Tous deux envisageaient le
prolongement des Alpes par l'Italie, une partie de la Sicile et les chaînes
tertiaires de l'Afrique du Nord.
Au Maroc, alors inconnu, SUESS
les voyait tourner en un arc de Gibraltar pour former les Cordillères
andalouses et mourir aux Baléares en rameau libre. TERMIER admettait, au
contraire, le rattachement des chaînes du Sud de l'Espagne à la Provence.
Mais les surfaces explorées
étaient trop réduites par rapport à tout ce qui restait inconnu. Et les
synthèses d'après guerre, dues à STAUB, à KOBER, à STILLE, à von SEIDLITZ, rendent encore plus sensibles
par leurs divergences les lacunes immenses de nos connaissances. La hâte
d'expliquer et de coordonner a fait négliger l'analyse préalable de ce qu'il
fallait expliquer et coordonner.
Ces travaux, d'ailleurs très
suggestifs et utiles, ont ceci de commun qu'ils visent à étendre aux chaînes
circum-méditerranéennes des conceptions théoriques diverses basées sur
l'interprétation d'autres régions.
Le nouvel
aspect des problèmes.
La génération de géologues qui a
débuté lorsque la théorie des charriages renouvelait l'interprétation des Alpes, sentit
qu'après cette révolution dans les doctrines, son rôle serait surtout
analytique et que, pour le Sud de l'Espagne en particulier, nul ne pourrait
tenter de synthèse valable tant que l'humble travail des descriptions et des
analyses ne serait pas mené avec une rigueur suffisante.
Cette phase nouvelle s'ouvre en
Espagne par la publication de l'Etude géologique de la Sierra de Majorque chapitre terminal forme une manière d'
«Introduction à l'étude de la Méditerranée occidentale».
Des équipes variées de
chercheurs abordent bientôt l'étude détaillée des principaux problèmes posés.
Des Hollandais scrutent le massif de la Sierra Nevada, des Suisses l'Occident de
ces montagnes, des Allemands les régions situées au Nord des zones des plissements
alpins, pendant que, seul ou en collaboration avec des Français et
des Espagnols, je poursuis des recherches en Bas-Aragon, puis dans les
Cordillères bétiques, entre Valence et l'Andalousie.
Sous peu, le midi de l'Espagne
sera aussi bien connu que l'Algérie. La géologie marocaine, abordée en détail
depuis 1926 par de juvéniles équipes, s'éclaire chaque année de lueurs nouvelles.
Les obstacles qui s'opposaient
aux synthèses fécondes tombent par pans entiers. Mais aussi voit-on s'élargir
singulièrement le champ de ces synthèses.
La
Stratigraphie et la Paléogéographie.
Ce n'est plus la seule science
des déformations tectoniques qui peut répondre à toutes les questions
posées et éclaircir le mystère de la continuité des grandes zones structurales cachées
sous les espaces marins. Il y faut l'étude de la répartition des
sédiments secondaires et tertiaires sur tout le pourtour du bassin. L'analyse stratigraphique détaillée,
basée sur les faunes accompagnant les sédiments et sur la nature intime de
ceux-ci, permet, au moins pour les étages du Secondaire et du Tertiaire, la
reconstitution de cartes paléogéographiques.
L'évolution des mers ancienne
apparaît. L'on peut déjà, non plus schématiquement comme en 1922,
mais avec plus de détails définir les zones (géosynclinales, dirait-on selon le
vocabulaire de E. HAUG) où la mer a régné en permanence jusqu'au Tertiaire, avec les
caractères sédimentaires et paléobiologiques propres aux régions alpines.
Ces cartes nouvelles ont servi
en 1936 à illustrer un cours sur l'histoire géologique de la Méditerranée fait
au Centre des Hautes Etudes méditerranéennes de Nice. Elles sont encore inédites.
Ce bassin, ce sillon,
prolongeant celui des Alpes et d'Italie, s'allonge de Sicile vers l'Ouest, entre
l'ancienne Europe et la vieille Afrique.
Sur ses bords, on saisit les
étapes de transgressions et de retraits des eaux, au cours desquelles se sont
succédés, sur le vieux bâti, des golfes peu profonds, épicontinentaux (bassin
aragonais, marge N.-E. des Cordillères bétiques, domaine Atlasique) ou des
épisodes continentaux, voire lacustres.
Mais tout l'espace compris entre
les anciens continents européen et africain n'a pas été uniformément occupé par
la mer. Au Nord de la Kabylie, dans le bord méditerranéen de l'arc rifain, enfin dans les
montagnes andalouses entre l'Ouest de Malaga et Murcie, règnent des terrains
primaires qui ont dû faire partie d'un ensemble spécial. Et la
réapparition de ces éléments des «bâtis anciens» va poser une série de
questions, dont, ici encore, la solution ne peut être cherchée que dans une analyse
stratigraphique minutieuse.
Déjà au cours du Secondaire ils
semblent avoir été réunis en un grand ensemble formant, selon les époques, une barrière émergée ou des
hauts-fonds.
Ce vaste bourrelet a plus ou
moins séparé
le sillon profond de la mer alpine, qui passait au Nord, des mers qui
s'étendaient sur l'Afrique septentrionale. Celles-ci, seulement
influencées par des communications latérales ou épisodiques avec le sillon
alpin, ont déposé des sédiments dont le cachet est souvent spécial et dont
l'histoire semble complexe.
L'individualisation du bourrelet
nord-africain résulte, à n'en pas douter, d'un bombement du bâti continental profond
provoqué par des efforts tangentiels. D'ailleurs comme dans tout l'édifice
alpin, les déformations essentielles seront dues à de telles poussées. Hormis à la
fin du Tertiaire, les fractures verticales ne jouent qu'un rôle infime.
En dehors de cette zone
Kabylo-bético-rifaine, qui semble avoir été longtemps passive, les
mouvements orogéniques ont tardé à créer des reliefs. Il n'est pas encore certain
que, comme le veulent les géologues hollandais, de grands plissements soient
déjà nés
au Jurassique dans les alentours de la Sierra Nevada; ce n'est que plus
récemment, au Crétacé, que les sédiments de la Téthys enregistrent
les premiers effets certains d'un réveil orogénique, répercussion
atténuée, dans les domaines marins, de la naissance des Pyrénées et
des Haut et Moyen Atlas.
Ces deux édifices, nés de
plissements à très grand rayon de courbure des vieux bâtis continentaux
de part et d'autre de la mer, se sont individualisés en deux phases, l'une
crétacée, l'autre tertiaire. Ils forment d'ailleurs les marges extrêmes du
cadre de
la Méditerranée occidentale étudiée ici.
Formation des
chaînes tertiaires alpines.
Après leur surrection, les
épisodes orogéniques se succèdent :
Un grand chaînon naît en
Andalousie méridionale dont la Sierra Nevada forme l'ossature, alors que la mer règne
encore ou revient entre ces reliefs et la Meseta espagnole.
C'est ensuite au tour des
plissements du Nord de l'Algérie de se former, si tant est que leur âge
soit vraiment établi.
Plus tard enfin, s'édifient les
chaînes récentes d'âge strictement alpin, c'est-à-dire d'âge
post-oligocène et miocène. On en voit passer la branche majeure de Majorque
et d'Ibiza aux Provinces de Valence, d'Alicante, de Murcie, de Jaen, de
Cordoue, de Séville, entre le Sud du vieux bâti de la Meseta espagnole et le
bourrelet Kabylo-bético-rifain.
En Afrique, les grands
mouvements récents sont limités au Rif et à l'extrême Nord de la frontière
algéro-marocaine ; plus loin à l'Est, seuls des efforts atténués se font
sentir, à ce moment, au Sud de la zone des Kabylies.
Où se prolongeaient les chaînes
alpines d'Espagne et comment se reliaient-elles aux Alpes ?
C'est encore le résultat de
l'enquête stratigraphique et paléogéographique qui nous fixera. Les
observations de ces derniers lustres et celles qui sont en cours laissent
pressentir la réponse.
On a vu plus haut que les zones
essentielles de la Téthys, où régnèrent des mers typiquement alpines par leur
faune et le faciès de leurs sédiments, semblent bien avoir passé des Alpes en
Italie et en Sicile selon le schéma classique, mais de là avoir gagné
directement la région subbétique définie sur 900 kilomètres de long, de
Majorque à l'Atlantique.
Or, dans les segments
actuellement connus des Alpides l'on a constaté que les paroxysmes orogéniques
alpins se sont partout produits sur l'emplacement du sillon majeur de la
Téthys. On est donc en droit de penser que la règle s'applique à ce tronçon
occidental de la chaîne et que la zone des grands plissements a dû passer,
aussi directement que le géosynclinal, de Sicile à Majorque et aux cordillères
subbétiques.
Au Sud, le massif
Kabylo-bético-rifain, individualisé lors des temps secondaires, a continué à
jouer un rôle d'écran durant le Tertiaire, à deux points de vue : histoire
sédimentaire de l'Afrique du Nord, et plissements.
Les dislocations
algéro-tunisiennes différeront donc plus ou moins de celles de l'Espagne par
l'âge et par le style.
Ainsi, toutes ces chaînes qui
bordent la Méditerranée et que l'on raccordait, ne sont pas exactement
comparables les unes aux autres. Sous leur unité trompeuse, apparaît un
ensemble composite, et nous sommes entraînés bien loin des interprétations
primitives où l'on ne cherchait qu'un lien tectonique unique et linéaire entre
tant d'éléments divers.
Plan des
recherches et d’un enseignement.
L'histoire géologique qui vient
d'être esquissée se dégage peu à peu de l'ombre. Elle permet déjà de prévoir la méthode
qui convient
pour en scruter les détails et en brosser un tableau fidèle et nuancé : Les
recherches sur le terrain, pour compléter la documentation accumulée depuis plus de
20 ans ; les travaux de laboratoire, pour l'étude paléontologique et microscopique
des matériaux
recueillis (Point n'est besoin d'appareils spéciaux, et en dehors des
microscopes dont sont pourvus tous les laboratoires, les collections et les
bibliothèques existantes totalisent à peu près toutes les ressources désirables) ;
la mise au net des cartes levées et l'élaboration des profils géologiques
généraux qui en découlent devront chaque année marier leurs effets.
Le vaste inventaire déjà
commencé sur le bassin méditerranéen doit être poursuivi en utilisant pour
de perpétuels contrôles réciproques, toutes les disciplines stratigraphique.
lithologique, paléobiologique, tectonique.
La méthode n'est pas nouvelle,
mais elle
ne fut guère appliquée à un champ si vaste. Dans l'étude des Alpes
suisses qui forment la partie la mieux connue de la chaîne, ce
n'est qu'après des années de travaux spécifiquement tectoniques que
l'on s'oriente vers l'analyse minutieuse des horizons et de leurs variations
latérales.
En Méditerranée occidentale où
la structure des chaînes est plus simple, on peut espérer qu'une vie d'homme suffira à
fermer ce cycle, dont les parties essentielles fournissent à la fois un programme de
recherches et le plan d'un enseignement.
— Pour toutes les
divisions des ères secondaire et tertiaire, il faut poursuivre objectivement
l'étude de la stratigraphie de tout ce domaine. Après que soient datées les
formations, l'examen micrographique de leurs sédiments, l'étude globale des
faunes et les conclusions paléobiologiques qui en découleront permettront
d'évoquer leurs conditions de dépôt avec bien plus de rigueur que les esquisses
préliminaires ne l'ont fait.
— Ces longues
analyses poussées à l'aide des publications récentes et de documents inédits,
déjà recueillis ou à recueillir, nécessiteront plusieurs années. Elles seront
interrompues par la description des phases orogéniques prémonitoires inscrites
dans les dépôts secondaires. En cette matière tout sera nouveau. Bien que
des discordances très accusées soient connues dans le Crétacé algérien, on n'a
pu les mettre en corrélation avec les phénomènes similaires signalés au Maroc
et bien moins encore avec ce que révèlent les Cordillères bétiques. Cette
tectonique ancienne, qui a précédé sur le même emplacement les paroxysmes
récents, nécessitera une étude minutieuse.
— Quant aux
inventaires stratigraphiques qui concernent le Nummulitique, ils feront aussi
l'objet d'un soin particulier parce que c'est sur eux que l'on est en droit de
compter pour distinguer les phases orogéniques alpines.
Des thèses en cours sur le
Nummulitique d'Algérie et d'Espagne, nous promettent à cet égard d'importants
résultats.
— Ce n'est
qu'après les investigations stratigraphiques et les synthèses
paléogéographiques que l'on abordera à fond l'orogénie tertiaire. Alors
seulement la discrimination des diverses chaînes nées à divers moments,
l'analyse de leur tectonique, l'examen comparé de leurs constituants prendront
toute leur signification : la synthèse structurale apparaîtra d'elle-même.
— Mais
l'histoire géologique ne s'arrête pas au paroxysme alpin. La fin des temps
tertiaires avec le retour local de leurs mers, puis les oscillations des
rivages de la Méditerranée quaternaire, conduirons à reprendre l'étude du
Néogène supérieur ainsi que la question des terrasses marines et fluviatiles.
Et les ultimes étapes de cette
immense évolution parachevant le modelé du relief terrestre aboutiront à
l'explication de la géographie actuelle, si importante par ses incidences sur
le sort des sociétés humaines, dans ce bassin qui fut le foyer central de notre
civilisation occidentale.
— Un tel cycle
de travaux ne se développera pas sans obliger le chercheur à s'élever au-dessus
des faits observés pour les confronter avec les grandes théories géologiques.
Celles-ci sont excellemment exposées à Paris et en Province. Mais il ne rentre
pas dans le cadre des enseignements didactiques de les appliquer à des
problèmes particuliers. Et ce ne sera pas un des moindres fruits de l'étude
géologique du bassin méditerranéen que le contrôle de leur valeur.
Un programme
de recherches complètes conduira à utiliser mais aussi à réadapter, à modifier,
à remplacer peut-être certaines de ces conceptions.
L'une d'elles est la théorie
des géosynclinaux, dont la révision à la lumière d'observations précises
s'impose. Une autre est la doctrine mobiliste.
Les géophysiciens modernes font
état d'une mobilité relative des masses continentales, dont le principe fut
énoncé par WEGENER et utilisé par ARGAND et STAUB pour l'explication de la
naissance des grandes chaînes et singulièrement des Alpes.
Que Téthys ait été jadis, en
quelque sorte, la large mer séparant l'Eurasie de la Gondwanie, puis que le
rapprochement des deux continents en ait chassé les eaux et fait surgir tout un
train de replis dont l'ultime serrage a donné les Alpes, cela paraît une
explication séduisante sur le méridien, sur la transversale, des Alpes suisses.
Mais peu de régions sont aussi
propices que l'Afrique du Nord et l'Espagne à l'inscription de tels phénomènes
dans la nature des sédiments et dans leurs dislocations, entre les deux vieux
bâtis étroitement affrontés.
S'il est prématuré de se
prononcer dès aujourd'hui, l'on est en droit d'espérer être, d'ici peu, en
mesure de préciser si oui ou non cette doctrine mobiliste s'applique au cas
particulier de la Méditerranée occidentale et trouve dans sa géologie la
confirmation des faits.
Coordination
des travaux.
Les grands noms de DE VERNEUIL,
COLLOMB, MICHEL-LÉVY, Marcel BERTRAND, KILIAN, nous font impérieusement
souvenir que la France a, depuis 100 ans, joué un rôle actif dans la géologie
espagnole.
Elle possède la quasi totalité
de l'Afrique du Nord alpine. Il est légitime d'attendre de ses chercheurs une
contribution dominante aux problèmes géologiques méditerranéens.
C'est actuellement le Laboratoire
de Nancy qui joue un peu le rôle de quartier général pour tous ceux, espagnols,
français, suisses, hollandais, voire allemands, qui ont abordé l'un ou l'autre
des problèmes géologiques d'Espagne, du Maroc ou plus généralement de la
Méditerranée occidentale.
Ce rôle pourrait être mieux
tenu si l'organisation universitaire ne rejetait, à juste titre d'ailleurs, de
telles préoccupations au second plan.
En effet, ces études spéciales,
l'enseignement qui en découlerait, ne peuvent trouver place dans aucune chaire
d'université. Les programmes de licence sont essentiellement didactiques et ne
laissent que quelques heures pour l'énumération des grandes lignes de la
Géologie régionale. Ils ne permettent pas plus de s'élever au-dessus du plan
des exposés généraux pour remettre en question des doctrines, que d'exposer
l'histoire complète d'une région comme la Méditerranée occidentale.
Ce serait dans un centre
consacré par essence à la recherche et à la découverte, que les travaux
énumérés ici pourraient normalement porter leurs fruits, soit par
l'enseignement, soit par l'activité d'un laboratoire où tous ceux qui étudient
les problèmes méditerranéens viendraient se rencontrer et se documenter.
Organiser le labeur
scientifique et assurer d'opportunes liaisons entre les spécialistes est
toujours délicat. Ici, par l'extension géographique du domaine envisagé et par
la variété des savants qui y déploient leur activité c'est sur un plan
international que se placent les investigations, donc en dehors de tout organisme
officiel de coordination. Un laboratoire spécialement orienté vers ces
recherches ne manquerait pas de jouer un rôle utile dans le rassemblement des
travailleurs et la conjonction de leurs efforts.
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