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Titres et travaux scientifiques
de
C'est en
1920, en même temps que des obligations familiales m'incitaient à entrer à
l'Ecole Centrale dont je venais de subir avec succès le concours d'entrée, que
je pénétrai au laboratoire de Cryptogamie du Muséum grâce à l'appui du Dr
Fernand CAMUS qui avait bien voulu s'intéresser à moi.
Depuis
mon plus jeune âge attiré par les choses de la Nature, ayant senti tout enfant
l'irrésistible vocation, j'avais alors abordé depuis plusieurs années déjà, par
de nombreuses herborisations, l'étude de la flore française, commençant
naturellement par celle des phanérogames, la continuant par celle des
champignons.
Encouragé
par M. le Professeur Louis MANGIN, je vins durant les quelques moments que mes
études à l'Ecole Centrale me laissaient de libres, me documenter auprès des
livres et des collections du laboratoire. J'eus alors l'exceptionnelle fortune
d'y rencontrer le regretté N. PATOUILLARD, le maître incontesté de la Mycologie
contemporaine, dont je devins l'élève et l'ami.
Les
encouragements qu'il me prodigua, l'affection qu'il voulut bien me témoigner ne
furent pas sans influer sur ma décision de renoncer définitivement à la
carrière industrielle lorsque j'obtins mon diplôme d'Ingénieur des Arts et
Manufactures et malgré les situations qui s'offraient à moi du côté de
l'industrie chimique.
Peu de
temps après (1923), j'étais nommé conservateur de l'Institut botanique alpin du
Lautaret, rattaché à la Faculté des Sciences de Grenoble et dirigé par le
regretté Professeur Marcel MIRANDE qui me réserva le plus amical accueil.
Au cours
de mes voyages successifs au Lautaret et dans les Alpes du Dauphiné je
découvris une végétation mycologique très riche et peu connue qui m'apportait
matière à des recherches de longue baleine.
Bientôt
après, j'obtins la licence de sciences naturelles, en même temps qu'appelé sous
les drapeaux après un sursis de cinq années, je me fis détacher au titre de
chimiste militaire au laboratoire de Chimie organique du regretté Professeur L.
J. SIMON, au Muséum d'Histoire Naturelle, où je m'occupai d'une méthode de
dosage volumétrique du carbone chez les substances organiques privées d'azote,
à l'aide de la combustion par le mélange sulfo-chromique.
A la mort
du Professeur SIMON, j'allai terminer mon service militaire au laboratoire de
Chimie biologique du Professeur Gabriel BERTRAND : de mon séjour auprès de
l'éminent chimiste de l'Institut Pasteur, mon instruction générale devait tirer
un grand profit.
Durant
les cinq années qui s'écoulèrent entre mon entrée à l'Ecole Centrale et ma
libération, je reçus presque journellement les leçons du maître vénéré, N.
PATOUILLARD, qui m'initia à l'étude des champignons exotiques et eut sur mon
éducation scientifique une influence essentielle.
A la mort
de PATOUILLARD, survenue en mars 1926, M. le Professeur MANGIN voulut bien
m'appeler auprès de lui comme préparateur. Je devais trouver aux côtés de ce
maître un appui extrêmement précieux, une bienveillante et constante sympathie
qui facilitèrent grandement ma tâche.
Je
m'employai tout d'abord à terminer la rédaction et à assurer la publication de
plusieurs notes de mycologie exotique que PATOUILLARD avaient laissées
inachevées. Je me décidai en même temps à m'efforcer de poursuivre l'oeuvre
qu'il avait entreprise, d'autant que la disparition de PATOUILLARD, après celle
de BOUDIER, pouvait faire craindre que la tradition de l'Ecole mycologique de
Paris, où s'illustrèrent précédemment LEVEILLÉ et les frères TULASNE, allait
s'éteindre.
Bientôt
après, dans le but de combler une lacune de la bibliographie mondiale, je
fondai avec la collaboration de mes collègues Pierre ALLORGE, POTIER de la
VARDE, HAMEL et ZAHLBRUCKNER, une publication trimestrielle à caractère
international, les Annales de Cryptogamie exotique, dont j'assume
actuellement la direction, et qui entre dans sa cinquième année d'existence,
suivant, malgré les difficultés économiques de l'heure, une progression
favorable.
En même
temps mes conceptions sur la systématique, et l'anatomie générales des Agarics,
sur la biologie de l'espèce, se précisaient. Je songeai à tirer de ces études
un travail d'ensemble dans le cadre duquel les idées que je m'étais faites sur
les limites de l'espèce, sur les affinités génériques, sur la phylogénie des
Basidiomycètes, trouveraient à se préciser et à se placer. En d'autres termes,
j'avais le désir de travailler à un premier ouvrage qui clôturerait mes travaux
et mes conceptions de jeunesse.
J'abordai
ainsi l'étude d'un genre d'Agarics à spores ocracées, le genre Inocybe,
dont la difficulté avait rebuté bien des mycologues, et qui m'attirait par l'isomorphisme
et le polymorphisme, remarquables de ses représentants. Cette étude me réserva
la chance de voir se confirmer certaines idées personnelles sur la variation
des caractères et leur subordination. Il en résulta la publication de l'ouvrage
qui constituait ma thèse de doctorat et auquel furent décernées, à la Faculté
des Sciences de Paris, la mention très honorable et les félicitations du jury.
La plus
grande partie de ce livre est constituée par un essai monographique sur le
genre Inocybe. Des indications précises concernant leurs caractères
macroscopiques et microscopiques, accompagnées de 120 dessins au trait et de 35
planches en couleurs, sont complétées par des remarques critiques de divers
ordres.
Le
groupement des espèces, la mise en évidence de leurs affinités, sont établis en
partant de considérations toutes personnelles. Je me suis efforcé de rechercher
et de noter les variations des caractères et leurs amplitudes, et cette
compréhension dynamique de certaines particularités physionomiques ou
anatomiques m'a conduit à réduire de nombreuses espèces au rang de simples
variétés ou de formes, et à ressusciter la notion de stirpe, échelon
d'ordre supérieur à l'espèce, pouvant être superposé à l'espèce ancestrale, et
qui tire sa valeur de la ressemblance des formes qui le composent en tant que
cette ressemblance est l'indice d'une filiation qui, en général, a cessé
actuellement d'exister.
Dans la
distinction des sections, stirpes et espèces, j'ai insisté sur le
caractère olfactif de la chair dont j'ai montré, dans le cas des odeurs
d'huiles essentielles, qu'il était lié à l'existence d'un réseau dense de
filaments lactifères et à celle d'oxydases énergiques.
Ainsi
s'est dégagé un quadruple caractère, d'ordre à la fois anatomique, chimique,
olfactif et biochimique, sur lequel se sont édifiés les fondements de la
classification du genre Inocybe telle que je l'ai proposée, et notamment
la mise en évidence d'une première section — les Lactiferae — comprenant
des espèces à odeurs de fruits, de fleurs ou de muscs, qui s'est révélée
naturelle, et dont les représentants étaient jusqu'alors dispersés dans des
groupes différents. Ainsi, le point de vue chimique m'a aidé utilement dans la
recherche des affinités spécifiques.
C'est
encore par l'étude du genre Inocybe que j'ai découvert deux relations
qui, du point de vue de la biologie générale en même temps que de la
systématique des Agarics, possèdent un intérêt non négligeable.
J'ai
observé en effet que, parmi les Inocybes, certaines espèces, offrant sur
leurs lamelles des organes stériles — les cystides — à membrane épaisse et
réfringente, surmontés de cristaux d'oxalate de calcium, possèdent des spores à
profil d'amande n'admettant qu'un seul plan longitudinal de symétrie. Au
contraire, les Inocybes privés de cystides oxalifères présentent
toujours des spores à profil dorsiventral en forme de rein, manifestant la
tendance à l'existence de deux plans perpendiculaires de symétrie.
La
corrélation est donc profonde et continue entre deux sortes d'organes qui
jouent dans la physiologie des champignons une importance fondamentale, l'un
(la spore) étant l'aboutissement des fonctions reproductrices, l'autre (la
cystide.) symbolisant en partie l'activité nutritive dont le champignon est le
siège.
Les
autres observations concernent la variabilité du contour sporal chez les Inocybes.
Ainsi, j'ai découvert l'existence de sporées hétérogènes, offrant des types
différents de spores mûres correspondant à des paliers d'évolution distincts.
Je me
suis efforcé de rechercher les causes qui peuvent présider à un tel
polymorphisme : hybridations, existence de basides portant un nombre variable
de spores, mutations ou novations.
J'ai été
ainsi amené à admettre que la spore, chez les Inocybes, possède un certain état
d'instabilité qui se traduit aisément par une modification de son contour dans
une direction évolutive déterminée dont j'ai montré les diverses étapes, depuis
le profil simplement oval jusqu'à celui qui se montre hérissé de bosses
spiniformes en passant par les contours polygonaux ou à bosses obtuses.
Une autre
partie de ma thèse comporte une mise au point personnelle de l'anatomie
générale des Agarics. J'y ai passé successivement en revue les catégories de
cellules dont l'ensemble constitue le champignon lui-même.
Des vues
nouvelles sur les variations des basides, le rapport entre le volume de ces
organes et celui des spores qu'ils portent, sur les téguments des spores et
leur ornementation, sur les pores germinatifs, la découverte de ce premier
stade incomplet de pore germinatif que j'ai appelé cal, sont présentées.
Un autre
chapitre concerne la classification des Agarics à spores ocres dont je décris
cinq coupures génériques nouvelles, dont trois appartenant à la flore malgache.
Je suis
amené d'autre part à considérer que la série des Agarics à spores ocres se
rattache aux Gastéromycètes, par l'intermédiaire des Cyttarophyllum et
des Podaxés, de même que PATOUILLARD a montré que la série des Agarics à spores
noires se rattache à d'autres Gastéromycètes par les Montagnites et Gyrophragmium,
de même que, tout récemment, M. G. MALENÇON établissait la parenté certaine qui
relie les Lactario-Russulés à certains basidiomycètes souterrains ou
semi-épigés (Elasmomyces, Hydnangium, etc.).
Ainsi un
argument nouveau a été apporté à cette conception, d'autre part soutenue par
PATOUILLARD, BUCHOLTZ et MALENÇON, selon laquelle les Agarics, contrairement à
l'opinion presque unanimement admise, comprennent, non pas un ensemble de formes
de même origine, mais bien les aboutissements de séries de convergence,
parallèles et indépendantes, respectivement reliées à des rameaux composés de
champignons à réceptacle plus ou moins clos.
En somme,
j'ai appuyé la théorie qui fait dériver les Agarics de diverses origines et non
d'une souche unique.
Quoique
poursuivant mes recherches sur les Agarics Ochrosporés, je n'abandonnais pas
les autres groupes par lesquels j'avais commencé l'étude de la mycologie.
Attiré
toujours par les Alpes, j'y entreprenais de nouveaux séjours et les
observations que, seul ou en collaboration avec M. L. RÈMY, j'ai faites dans
les Alpes briançonnaises de 1922 à 1929, ont commencé à faire l'objet d'une
suite de notes groupées sous l'appellation de Fungi brigantiani.
J'apportais
ainsi une contribution à l'étude des rouilles, des charbons, des pezizes et des
agarics de ces régions alpines, décrivant plusieurs espèces nouvelles.
Je
signalais qu'il existe une flore mycologique alpine supérieure de même qu'on
connaît une flore vasculaire et lichénique nivale.
Enfin, je
précisais les caractères biologiques des champignons parasites dans les étages
alpin et nival, montrant la prédominance à ces altitudes d'Urédinées à cycle
raccourci et donnant de ces particularités des explications découlant des
caractères du climat local.
D'autre
part, je poursuivais l'étude des champignons exotiques grâce aux nombreux
envois reçus au Muséum, provenant d'Indo-Chine, du Venezuela, du Sahara, du
Congo, de la Guinée, de l'Afrique occidentale et équatoriale, des Iles
australes, de l'Equateur, de la Mozambique, et surtout de Madagascar.
Indépendamment
de plusieurs notes publiées à ce sujet, je me suis voué plus particulièrement
depuis quelque temps à l'étude spéciale de la flore mycologique malgache, et
j'espère publier dans quelques années un prodrome à une flore mycologique de
cette colonie.
Je
publiais en outre une note sur une maladie grave du manioc à Madagascar causée
par un polypore, le Phaeolus manihotis Heim.
En
étudiant les champignons recueillis au Hoggar et sur les bords du Niger par la
mission Augiéras-Draper — récoltes dont l'étude m'avait été confiée, — je
découvrais le mécanisme de la sporulation chez les Podaxon, dont les
basides peuvent se transformer directement en spores géantes.
Une
collaboration étroite et amicale avec M. Georges MALENÇON, qui avait hérité en
même temps que moi des conseils et de la tradition de PATOUILLARD, commençait
en même temps à porter ses fruits.
Ensemble
nous publiions un travail sur la flore mycologique du Tonkin, et nous en
rédigeons actuellement un autre sur celle du Portugal dont nous avons exploré
tous deux, en 1931, la province du sud.
Avec M.
le Dr OFFNER, nous étudiions, d'autre part (1924-1927), au triple point de vue
systématique, biologique et géographique, le pleurote des Ombellifères, Agaric
faisant l'objet d'un commerce assez important dans plusieurs régions de
l'Europe occidentale et méridionale ainsi qu'en Afrique du Nord.
Nous
établissions la valeur et la répartition des formes biologiques de ce pleurote,
venant sur les souches décomposées ou languissantes de diverses espèces
d'Ombellifères, et que nous fixions au nombre de trois : l'une méditerranéenne,
l'autre subalpine, la troisième méditerranéenne-atlantique.
Enfin,
plus récemment, en collaboration avec M. Jacques DUCHÉ nous abordions, au
double point de vue systématique et pédologique, l'étude de la microflore du
sol, domaine négligé des auteurs français, et qui, en Amérique et en Russie, a
fait l'objet de nombreuses publications.
Un
premier travail concerne la microflore des sables littoraux atlantiques à
partir desquels diverses espèces, dont trois nouvelles pour la science, ont été
isolées.
En même
temps, nous étudiions l'action de ces organismes sur la cellulose et sur les
nitrates.
Il en
résulte, d'une part, que le sable des dunes littorales, depuis le Cotentin
jusqu'au sud du Portugal, constitue, malgré la température très élevée qui y
règne en été, un milieu mycologiquement vivant, et, d'autre part, que les
champignons anaérobies isolés possèdent ou conservent, malgré la pauvreté du
milieu sableux en substances mimiques, des propriétés biochimiques très nettes.
Des
essais, actuellement en cours, vont élargir dans une direction expérimentale et
physiologique, nos premières observations à ce propos.
Signalons
enfin que plusieurs notes isolées traitent de toxicologie chez les champignons
supérieurs et de pathologie végétale : mises au point, accompagnées de photographies
et de dessins, des maladies cryptogamiques des œillets de celles des rosiers,
des pourridiés, des maladies bactériennes des plantes coloniales, des rouilles
des anémones, de la mérule, de la maladie hollandaise des ormes (due au Graphium
Ulmi), etc.
J'apportais,
en outre, ma collaboration régulière à la Commission d'études des ennemis des
arbres, des bois abattus et des bois mis en œuvre, qui fonctionne régulièrement
au Ministère de l'Agriculture sous l'active direction de M. le Professeur MANGIN.
Mais si
dix années de recherches et de publications m'avaient conduit à défendre
quelques idées personnelles, j'avais hâte de les ordonner dans un cadre
didactique. Ainsi ai-je été amené à faire au Muséum une série de dix
conférences sur les bases anatomiques d'une classification des Agaricacés. J'y
ai développé et complété les données que j'avais exposées dans ma thèse de
doctorat et passé en revue avec détails les divers éléments histologiques dont
les Agarics sont constitués. Ces leçons feront ultérieurement l'objet d'une
publication.
Enfin, à
côté des recherches purement scientifiques, dont le but est la découverte de
faits nouveaux et leur publication, j'ai apporté au laboratoire de cryptogamie
la collaboration effective que mes fonctions successives de préparateur et
d'assistant m'imposaient. Cette collaboration, indépendamment du soin de
veiller à la conservation des herbiers mycologiques, à leur enrichissement, et
au dépouillement des matériaux reçus, des colonies principalement, s'est employée
notamment dans les deux ordres d'activité suivants :
1° Par
des excursions mycologiques, publiques ou à petit comité, qui ont eu lieu
surtout dans la région parisienne ; elles ont aidé à la formation d'un groupe
actif d'amateurs qui les suivent régulièrement et qui contribuent à la vitalité
du laboratoire qui les accueille avec sympathie.
2° Par
des expositions mycologiques publiques, annuelles ou bisannuelles. Le succès de
ces expositions est considérable puisqu'elles attirent chaque fois plusieurs
milliers d'amateurs.
Voici,
résumées brièvement, les diverses questions auxquelles, depuis 1919, mes
occupations botaniques se sont attachées. Mon activité a été tellement absorbée
dans le cadre du laboratoire où ma vie scientifique s'est jusqu'ici déroulée, qu'il
semblera naturel que tout ce qui touche l'avenir de cette chaire ne puisse me
laisser indifférent.
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champignon / chimie / cryptogamie / cystide / espèce / étude / exotique / exposition /
flore / gastéromycète / inocybe / laboratoire / madagascar / maladie / malgache /
muséum / mycologie / ombellifère / patouillard / pleurote / recherche / science / spore /
stirpe / systématique
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