Norbert : Chimie des orthophosphates
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Thèse présentée à la faculté des sciences de Montpellier
pour obtenir le grade de Docteur ès sciences physiques

par



Alain NORBERT

Contribution à la chimie des orthophosphates de sodium et de potassium



soutenue 10 novembre 1965

devant la commission d’examen :

R. Jouty, président
A. Potier, M. Maurin, P. Silber, examinateurs




INTRODUCTION


Nos connaissances sur les différents orthophosphates de sodium et de potassium se sont surtout développées dans deux directions : solubilités dans l'eau — systèmes binaires et ternaires, — et formation de polyphosphates par condensation thermique.


Les réactions permettant de préparer des orthophosphates «acides» par voie aqueuse sont connues depuis fort longtemps, en particulier celles entre chlorure de potassium et solutions aqueuses phosphoriques qui ont fait l'objet d'un grand nombre de brevets et de quelques travaux à but utilitaire.


Les réactions correspondantes avec les sels de sodium ne semblent pas avoir soulevé le même intérêt.


Une étude récente se rapporte à l'action de solutions aqueuses chlorhydriques sur des phosphates avec extraction de l'acide orthophosphorique formé par des solvants organiques.


Mais les réactions entre phosphates solides et gaz chlorhydrique sont restées complètement ignorées.


Or, il a été montré au même laboratoire que le gaz chlorhydrique réagit avec les sulfates alcalins solides pour donner du chlorure et divers sulfates «acides», et que ces produits réagissent mutuellement dans l'état solide avec régénération, dans des conditions convenables, de sulfate neutre.


Cet ensemble, utilisant des méthodes expérimentales inhabituelles dans le domaine des oxy-sels «acides», a permis de renouveler et de compléter nos connaissances sur les sulfates «acides» de sodium et de potassium.


Ayant observé que les phosphates solides réagissent aussi avec le gaz chlorhydrique, nous avons effectué une étude comparable en mettant en œuvre les orthophosphates mono-, di- et tri-métalliques de sodium et de potassium : étude pondérale pour rechercher les meilleures conditions expérimentales et pour déterminer la quantité de gaz susceptible de réagir avec un phosphate donné — analyse radiocristallographique pour reconnaître les différentes phases solides formées au cours de la réaction.


Ces réactions fournissant finalement un mélange de chlorure et d'acide orthophosphorique, nous avons précisé les conditions de l'action mutuelle de ces deux composés avant d'étudier les réactions dans l'état solide entre le chlorure et les différents phosphates «acides» dont la formation semblait probable au cours de la réaction directe entre M3PO4 sol et HCl gaz.



RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS.


Les orthophosphates mono- di- et trimétalliques de sodium et de potassium réagissent lentement avec le gaz chlorhydrique. La vitesse de réaction est maximale vers 70°C et dépend fortement, en plus des facteurs usuels en système hétérogène, des traces d'humidité amenées dans l'enceinte réactionnelle par le gaz ou par le sel mis en œuvre.


L'étude pondérale de la réaction, moles de gaz fixées par mole de phosphate mis en œuvre en fonction de la durée, combinée avec l'analyse radiocristallographique des mélanges formés au cours de la réaction, permet d'envisager les processus suivants, avec les sels de sodium et ceux de potassium :


(I)

M3PO4 sol + HCl gaz

M2HPO4 sol + MCl sol

(II)

M2HPO4 sol + HCl gaz

MH2PO4 sol + MCl sol

(III)

2MH2PO4 sol + HCl gaz

MH5(PO4)2 sol + MCl sol

(IV)

MH5(PO42 sol + HCl gaz

2H3PO4 liq + MCl sol


Deux groupes se distinguent. Les réactions (I), (II) et (III) correspondent à la formation de mélanges pulvérulents, la réaction (IV) à celle d'une masse visqueuse constituée à la limite d'acide orthophosphorique et de chlorure.


Avec les sels de potassium, les réactions (I) et (II) se chevauchent partiellement, la réaction (III) semble pouvoir être isolée. Avec les sels de sodium, les trois premiers stades sont enchevêtrés, mais la transformation totale du phosphate trisodique en un mélange de phosphate hémisodique et de chlorure peut être réalisée avant que de l'acide phosphorique soit formé.


Dans l'ensemble, l'identification par les rayons X des phosphates «acides» formés n'est vraiment nette qu'après vieillissement des échantillons dans des conditions appropriées, sauf en ce qui concerne les phosphates dimétalliques M2HPO4, pour lesquels les résultats de la diffractométrie X restent peu concluants.


Mais comme les phosphates mono- et dimétalliques réagissent avec le gaz chlorhydrique en donnant finalement les mêmes produits que les phosphates trimétalliques traités par HCl gaz, il est permis de penser que les stades (I) et (II) interviennent au moins transitoirement.


Une confirmation en est apportée par l'étude du comportement thermique de mélanges de chlorure avec les différents orthophosphates «acides», particulièrement par la similitude observée entre deux types de mélanges, obtenus soit par action de HCl gaz sur un phosphate, soit par addition des poudres des sels en question.


Cette étude du comportement thermique de mélanges utilise thermogravimétrie et calcinations isothermes, avec contrôle chimique de la variation de la teneur en chlorure et identification par les rayons X des phases présentes.


Elle confirme que les étapes (I), (II) et (III) sont généralement mieux séparées avec les sels de potassium qu'avec les sels de sodium pour lesquels le chevauchement est systématique. Elle révèle de plus que les orthophosphates mono- et dimétalliques de sodium et de potassium sont inertes au chlorure correspondant, aux températures où ces solides ne subissent pas de décomposition propre.


Des trois réactions (I), (II) et (III), seule la dernière est réversible.


Entre 90 et 120°C dans le cas du potassium, 80 et 130°C dans le cas du sodium, des tensions de vapeur mesurables sont développées en vase clos.


Mais à ces températures, la décomposition des phosphates hémimétalliques solides avec production de vapeur d'eau est déjà commencée sous vide.


De plus, les réactions entre MH5(PO4)2, et MCl solides sont lentes.


Des états d'équilibre définis risquent donc de ne pas être atteints. Mais les conditions expérimentales permettant de rendre la réaction (III) totale dans un sens ou dans l'autre ont été déterminées.


La réaction (IV) est réversible.


En fait, elle schématise deux étapes :


(V) MH5(PO4)2 sol + HCl gaz ↔ solution phosphorique saturée liq. + MCl sol
(VI) ensemble équilibré comprenant. HCl gaz ; solution phosphorique liq et MCl sol


En effet, le phosphate hémimétallique est soluble dans l'acide o-phosphorique, et sa solubilité s'élève avec la température ; la solubilité du gaz chlorhydrique est négligeable, celle du chlorure est très faible.


Le système se représente donc par la relation (V) ou (VI) suivant que la solution phosphorique est saturée en présence d'un excès de solide MH5(PO4)2, ou bien non saturée.


Une étude tensiométrique en vase clos, tensions du gaz HCl en fonction de la composition de l'ensemble condensé auquel on soutire progressivement du gaz par pompage, différencie les deux étapes.


Lorsque le système correspond à (V), une tension déterminée et constante s'établit à chaque température car la composition de la solution phosphorique est fixe (saturation) ; mais cette composition varie avec la température et reste indéterminée. Lorsque le système correspond à (VI), les tensions chlorhydriques varient, à chaque température, avec la composition de la solution phosphorique.


Les mesures de tension en fonction de la température confirment ces conclusions.


Signalons que les équilibres du système (VI) sont relativement mobiles. Mais avec le système (V), les tensions s'établissent lentement ; les résultats de mesure peuvent être considérés comme satisfaisants au-dessus de 50°C et jusqu'à 127 et 131°C respectivement pour potassium et sodium, limite supérieure imposée par la fusion non congruente des phosphates hémimétalliques respectifs.


Pour notre étude, il était indispensable de bien connaître les diagrammes Debye-Scherrer des différentes phases solides mises en œuvre ou rencontrées, ainsi que leurs domaines de stabilité thermique respectifs (obtention et conservation de sels anhydres et secs, allure de la décomposition thermique des phosphates «acides» dans nos conditions expérimentales).


Toutes ces données ont été vérifiées, précisées ou établies suivant le cas.


Les diagrammes de poudre de KH5(PO4)2 et de H3PO4 sont nouveaux.


Ceux de K3PO4 et de NaH5(PO4)2 sont rectifiés ; les indications qui concernaient ces deux sels dans la bibliographie sont fausses.


Les données Debye-Scherrer relatives à KH2PO4 et Na3(PO4)2 ont été complétées.


Les sels hémimétalliques NaH5(PO4)2 et KH5(PO4)2, mal connus et qui interviennent dans les réactions réversibles (III) et (V) ci-dessus, ont fait l'objet d'une étude plus développée : préparation, contrôle de pureté — en particulier par diffractométrie X avec dosage possible des mélanges KH2PO4 + KH5(PO4)2 — prétendue hygroscopicité, stabilité thermique.






MOTS CLEFS : acide / action / aqueuse / chlorhydrique / chlorure / composition / condition / décomposition / équilibre / étude / expérimentale / fonction / formation / gaz / HCl / hémimétallique / mélange / orthophosphate / phases / phosphate / phosphorique / potassium / réaction / réversible / sel / sodium / solide / solubilité / sulfate / température / tension / thermique






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