Delobelle : synthèse dans la série des diterpènes
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Thèse présentée à la faculté des sciences de l’Université de Paris
pour obtenir le grade de Docteur es sciences physiques

par



BERNARD GAUTHIER

SYNTHESE DANS LA SERIE DES DITERPENES



soutenue en 1962

devant la commission d’examen :

Normant, président
M. Julia, Freymann, examinateurs




INTRODUCTION


Les terpènes constituent une classe de produits naturels, extraits des huiles essentielles de plantes : ils possèdent la particularité d'être un assemblage de chaînes isopréniques C5H8, la tête de l'une étant en général fixée à la queue de l'autre.


Les terpènes sont divisés en quatre catégories : les monoterpènes C10H16, construits à partir de deux chaînes isopréniques, les sesquiterpènes C15H24, à trois chaînes, les diterpènes C20H32, à quatre chaînes, enfin les triterpènes C20H48, à six chaînes.


A proprement parler, dans chaque catégorie, le terme terpène doit être réservé aux carbures acycliques ou cycliques de formule (C5H8)n, que l'on trouve assez rarement dans la nature.


Celle-ci est surtout abondante en acides, phénols, alcools ou oxydes dérivés de ces hydrocarbures : on les appelle terpénoides.


Nomenclature des Diterpènes.


La nomenclature des diterpènes n'est pas encore normalisée.


KLYNE fait dériver ces substances de trois squelettes fondamentaux : le podocarpane, l'abiétane et le pimarane.




Ces désignations ont été conservées, mais on a utilisé la numérotation des stéroïdes au lieu de celle des phénanthrènes.




Dans l’écriture des formules des mélanges racémiques, on reproduit seulement l'isomère optique ayant la stéréochimie absolue des stéroïdes (méthyle 10 en position b).


Règle isoprénique. Biosynthèse.


Dans le groupe des diterpènes, en dehors du camphorène (I), de l'acide abiétique et de ses dérivés, le squelette carboné dérive d'un arrangement régulier tête à queue de quatre chaînes isopréniques.


Comme le phytol a la structure linéaire (II), RUZICKA a particularisé en 1953 la règle isoprénique pour les diterpènes sous le nom de règle du phytol : en établissant des liaisons carbone-carbone judicieuses, on passe du squelette acyclique du phytol à ceux monocyclique de l'axérophtène (III), bicy-cliques du manool (IV), du sclaréol (V), de l'acide agathique (VI), puis tricycliques des pimaradiènes (VII) et (VIII), de l'acide pimarique (IX) et de ses dérivés.


Dans le même article, RUZICKA suggéra que le géranylgéraniol hypothétique (X), pourrait être le précurseur iogénétique des terpènes cités plus haut et de ceux de la série abiétique, par une suite de réactions mettant en jeu des mécanismes généralement acceptés :


Une double cyclisation concertée du géranylgéraniol à une extrémité de la molécule fournit le bicycle (XI) qui se réarrange allyliquement en manool (IV).


Le cycle C se ferme par les intermédiaires a et b pour fournir l'acide pimarique (IX).


Celui-ci conduit par un réarrangement de WAGNER-MEERVEIN soit à l'acide lévopimarique, soit à l'acide néoabiétique que l'on convertit facilement en acide abiétique (XII).




Cette hypothèse a reçu une brillante confirmation : par traitement des acides pimarique (IX) ou isopimarique avec de l'acide sulfurique à -30°, WENKERT et CHAMBERLIN ont obtenu l'acide abiétique (XII).


Ces auteurs donnent une interprétation un peu différente de cette réaction par protonation préférentielle de la liaison 8-14 à la liaison 18-19.




L'acide abiétique conduit immédiatement au ferruginol (XIII), et par une déisopropylation analogue à celle qu'a réalisée WENKERT in vitro, à l'acide podocarpique (XIV).


Enfin l'ion phénonium C, avec un cycle B cyclopentamque permet de passer au totarol (XV). Une partie de notre travail vient à l'appui de l'existence de C.


Il est connu depuis longtemps que le rimuène (XVI) du type pimarane mais de stéréochimie controversée, fournit par réaction avec l'acide formique l'isophyllocladène tétracyclique (XVII).


Cette transformation est schématisée ci-dessous et est proposée comme biosynthèse des diterpènes du type phyllocladène.


Dans ce cas, c'est la liaison 12-13, et non le méthyle 20 qui migre.




Ainsi, tous les diterpènes a- ou polycycliques dérivent d'un précurseur unique par des réactions explicables et concevables en laboratoire.


Ces considérations biogénétiques, .qui étaient initialement de simples hypothèses, sont peu à peu confirmées par l'expérience et permettent d'éclaircir certains points de stéréochimie.


L'étape initiale de la biosynthèse, permettant de passer du géranylgéraniol (X) au bicycle (XI) est la même pour tous les diterpènes.


Dans cette hypothèse, ceux-ci devraient avoir la même jonction des cycles A et B. Tous les diterpènes connus possèdent effectivement une configuration trans des cycles A et B, le méthyle en 10 et l'hydrogène en 5 étant de part et d'autre du plan commun des cycles.


La stéréochimie du carbone 9 et la jonction des cycles B et C, dépendant de mécanismes plus complexes, peuvent être différentes.


Dans le kaurène, le cycle B est même probablement en bateau.




La configuration absolue est en général 10b, 5a, c'est-à-dire que l'hydrogène est en arrière, le méthyle angulaire en avant du tableau.


Toutefois, l'acide épéruique, le darutigénol, le (—)kaurène et le cafestol ont la configuration opposée.


Jonction des cycles A et B : stabilité.


La synthèse des diterpènes que nous avons élaborée faisant intervenir en même temps l'établissement des liaisons 4-5 et 9-10 intéressant toutes deux la jonction des cycles A et B, il était intéressant d'examiner quelle était des deux configurations cis ou trans, la plus stable.


HÜCKEL et LINSTEAD ont étudié les stabilités relatives de bicycles à six atomes du type décaline ou contenant des hétéroatomes sans substitution angulaire.


Ils ont montré que dans tous les cas l'équilibre favorise la forme trans.


Ces généralisations ont été exploitées hâtivement dans la stéréochimie des stéroïdes, sans tenir compte du fait que le carbone 10 porte un méthyle angulaire.


CHIURDOGLU et JAMINET par équilibration d'un mélange de décalines à 50° avec du chlorure d'aluminium obtiennent un mélange contenant 5 % de cis et 95 % de trans.


Cette proportion est en bon accord avec la différence d'énergie entre la cis et la trans décaline, déduite des chaleurs de combustion et égale à 2,1 kcal/mole. Cette valeur est assez proche de la valeur 2,8 kcal/mole trouvée entre les cis et trans-décahydroisoquinoléïne-diones-1,3 (XVIII) par BACHMANN.


Ce résultat confirme la similarité des liaisons faisant intervenir des atomes de carbone, d'oxygène ou d'azote.


Pour la méthyl-9 décaline, une proportion égale de cis et de trans se trouverait à l'équilibre.


De même, l'introduction d'un méthyle en 9 ou en 10 dans les décahydroisoquinoléinediones (XIX) et (XX), modifie l'équilibre et l'isomère cis prédomine.




D'après LINSTEAD et MILLIDGE, l'équilibre trans : 75 % , cis : 25 %, dans les anhydrides d'acides carboxy-2 cyclohexaniques (XXI) devient 50-50 dans les produits méthylés angulairement (XXII).




HÜCKEL a établi que la décalone-1 (XXIII a) est isomérisée facilement de la forme cis à la forme trans et que le mélange équilibré des deux isomères à 220° contient au moins 95 % de trans. Au contraire, un mélange à l'équilibre de méthyl-10 décalone-1 (XXIII b), contient entre 45 et 55 % d'isomère trans.


Pour les méthyl-9 décalones-1 (XXIII c), ROSS, SMITH et DREIDING ont montré que l'équilibration sur palladium sur charbon à 250° donne un mélange dans lequel l'isomère cis prédomine (60 % cis, 40 % trans).


Dans tous les cas étudiés ici, il semble que la présence d'un méthyle angulaire rende l'isomère cis plus stable ou tout au moins augmente à l'équilibre le pourcentage d'isomère cis au détriment de l'isomère trans.


Ces résultats expérimentaux peuvent être retrouvés qualitativement au moyen d'une systématique de calcul d'énergies non liées.


Les différences d'énergie entre les conformations éclipsées (XXIV), gauche (XXV), et stable (XXVI) du butane normal ont été calculées par PITZER et par BECKETT.




Ces valeurs sont les suivantes :


(XXV) ? (XXVI) — 0,8 kcal/mole ;
(XXIV) ? (XXVI) —3,6 kcal/mole (cette barrière est estimée à 6,1 kcal par Ito).


En utilisant ces valeurs, TURNER a calculé les différences d'énergie entre les trans et les cis décalines et entre les méthyl-9 décalines correspondantes.


Pour les premières, la différence d'énergie est de 2,4 kcal/mole et est réduite par l'introduction d'un méthyle angulaire à 0,8 kcal/mole.


Toutefois, si l'on suppose qu'une interaction gauche méthyle-méthylène possède une énergie plus grande qu'une interaction gauche méthylène-méthylène, cette différence est encore minimisée car la méthyldécaline trans possède quatre interactions du premier type, alors que la cis n'en possède que deux.


JOHNSON a étendu ces résultats aux perhydroanthracènes et aux perhydrophénanthrènes, puis ROBINS et WALKER et KLYNE ont étudié l'influence d'un groupe carbonyle dans les carbures précédents.


Les valeurs trouvées sont en bon accord avec les résultats expérimentaux cités.


Dans un podocarpatriène du type (XXVII), deux facteurs supplémentaires entrent en jeu : d'une part, le noyau benzénique fixe la double liaison de l'octaline substituée et favorise la jonction cis.


L'existence des octahydrophénanthrones (XXVIII a) et (XXVIII b) sous la forme cis presque uniquement est bien établie.




WENKERT et STEVENS ont isomérisé l'éthylènecétal (XXIX) par la potasse en styrène (XXX) de constitution cis. BARNES et BEACHEM par cyclisation de l'alcool (XXXI), obtiennent un mélange d'octahydrophénanthrènes contenant au moins 76 % d'isomère cis.




D'autre part, la triméthyl-4,4,9 décaline peut exister sous trois formes (en considérant les cycles sous forme chaise uniquement): une forme trans (XXXII a) et deux formes cis (XXXII b) et (XXXII c).




Le tableau C indique le nombre d'interactions gauches (la trans-décaline étant prise comme zéro) et les différences d'énergie non liées.


L'isomère cis, possédant deux interactions 1-3 éclipsées d'énergie 4,8 kcal/mole (XXXII c) est à éliminer.


Les isomères cis b et trans sont également favorisés si l'on compte toutes les interactions égales. Sinon, l'isomère cis est le plus stable.




Les exemples suivants montrent l'action conjuguée d'un cycle benzénique et d'un carbone 4 disubstitué :


PARHAM, WHEELER et DODSON ont réduit le céto-acide (XXXIII) par la méthode de Wolff-Kischner en un mélange d'acides cis et trans (XXXIV).




Nous avons vérifié (cf. infra) que la réduction de Wolff-Kischner de la cétone éthylénique (XXXV), conduit au styrène (XXXVI), de jonction A/B cis.




WENKEUT et JACKSON par traitement du déhydroabiétonitrile (XXXVII) par le chlorure d'aluminium dans le benzène, obtiennent en majeure partie le nitrile déisopropylé (XXXVIII) de structure cis et de configuration absolue opposée.


L'hydrolyse de ce nitrile en acide correspondant est très difficile (21 jours à 160°).




Ceci n'est concevable que si le nitrile est encombré et axial.


En (XXXVII) et en (XXXVIII a), il est équatorial. Il est vraisemblable que le nitrile (XXXVIII a) s'épimérise en (XXXVIII b) dans lequel le groupe CN est axial et parallèle au méthyle en 10 pour éviter les deux interactions en 4 avec le noyau B.


En conclusion, un podocarpatriène du type (XXVII) est plus stable sous la configuration cis à laquelle conduira obligatoirement une suite de réactions contrôlées thermodynamiquement.


Seule une réaction contrôlée cinétiquement ou mettant en jeu un mécanisme concerté, permettra d'atteindre la forme trans ou un mélange des deux.


Synthèses antérieures.


Le squelette des octahydrophénanthrènes (XXVII) représente un intermédiaire important pour la synthèse de diterpènes hydroaromatiques ou non, tricycliques et bicycliques (par attaque du noyau C convenablement substitué).


Trois méthodes différentes ont été envisagées dans ce but :


1) La première consiste à relier les noyaux A et C et à former ensuite le noyau B par une cyclisation intramoléculaire acidocatalysée ; cette méthode n'est pas stéréo-spécifique et conduit en général à un mélange d'isomères cis et trans.




Les exemples d'emploi de cette méthode sont très abondants dans la littérature.


Les premiers à l'avoir utilisée sont BARDKAN et SENGUPTA en 1932 pour la synthèse de l'octahydrophénanthrène (XXXIX).


Depuis, les étapes marquantes ont été les suivantes :


HAWORTH et BARKER par réaction du magnésien du bromure de (m-isopropylphényï) éthyle sur la dimé-thyl-2,5 carbethoxy-2 cyclohexanone ont obtenu l'alcool (XL) qu'ils ont cyclisé en un mélange d'isomères dont l'un a été identifié à l'acide d, l déhydroabiétique (XLI).


BHATTACHARYYA, puis HAWORTH et MOORE, par la même suite de réactions à partir de la même cyclohexanone et du magnésien d'un halogénure de (p-méthoxy-phényl) éthyle ont synthétisé parmi d'autres isomères, l'acide d, l podocarpique (XIV).




Cette synthèse a été reprise d'une façon un peu différente par KING et TOPLISS ; le noyau A aromatique est substitué par un groupement éthynyle dont on fait le dérivé sodé, que l'on fait réagir sûr la cyclohexanone.




Cette méthode a été largement utilisée malgré sa relative complexité: KING, KING et TOPLISS avaient obtenu de façon analogue le trans méthoxy-12 podocarpatriène (XLII), qui par réaction de Friedel-Crafts, condensation du magnésien de l'iodure de méthyle, déshydratation, hydrogénation et déméthylation, conduit au d, l ferruginol (XIII).




BARLTROP et ROGERS, ont condensé le dérivé sodé du m-méthoxyphénylacétylène avec la triméthyl-2,2,5 cyclohexanone, cyclisé l'alcool obtenu en trans méthoxy-13 podocarpatriène et réduit celui-ci par le lithium et l'ammoniac liquide en podocarpénone (XLIII) qu'ils ont convertie par la suite en totarol (XV) et en d, l ambréïnolide (XLIV), puis utilisant la forme naturelle de celle-ci comme relais en sclaréol (V), en labdanolate de méthyle et en isomanoöl.


En vue d'approcher les acides résiniques, ces mêmes auteurs ont fait par des moyens analogues, la synthèse de l'ester trans-octahydrophénanthrènecarboxylique (XLV) réduit ensuite par le lithium dans l'ammoniac liquide en cétoalcool (XLVI) et oxydé en cétoester (XLVII) identique avec un produit de dégradation de l'acide agathique (XLVIII).




La méthode est moins fructueuse et fournit surtout l'isomère cis lorsqu'un cycle se trouve substitué après cyclisation par un groupement carbonyle sur les carbones 4 ou 6; la cétone que STORK et BURGSTAHLER ont obtenue par condensation du bromure de b-phényléthyle sur l'ester de HAGEMANN est un mélange d'isomères où le cis prédomine, comme l'ont montré DUTTA et altri après l'avoir synthétisée d'une façon différente et convertie en acide cis-deisopropylabiétique (XLIX).




Toutefois, BARLTROP et DAY ont transformé cette même cétone en un mélange d'esters méthyliques duquel ils ont isolé le trans-deisopropylabiétate de méthyle sans indiquer le rendement.


La cyclisation de la cétolactone (L) de PARHAM par le chlorure d'aluminium et l'acide chlorhydrique gazeux dans le benzène à reflux, puis la réduction du groupe carbonyle par la méthode de WOLFF-KISCHNER, conduisent à un mélange de cis et de trans acide deisopropylabiétique : il y a eu dans ce cas une double réaction de Friedel et Crafts : fermeture normale du cycle B et réaction inverse avec départ du groupe isopropyle (cf. 3).




GHATAK a réalisé une synthèse de l'acide podocarpique selon le schéma suivant : la cyclohexenone (LI) est carboxylée en 4 par réaction avec le cyanure de potassium et hydrolyse ; ce cétoester est condensé avec le magnésien de l'iodure de méthyle et l'alcool obtenu cyclisé par l'acide polyphosphorique en un mélange facilement résolu en isomères cis et trans ; le premier est transformé en isomère trans par création d'une double liaison en 5-6 et hydrogénation catalytique.


Le dernier permet d'accéder à l'acide podocarpique (XIV).




2) La deuxième méthode est plus récente : elle consiste à partir d'une méthyl-1 tétralone-2 (LIII) convenablement substituée, constituant les cycles B et C et à lui adjoindre le cycle A par le procédé de ROBINSON (tableau D) ; elle a été particulièrement utilisée dans le domaine des stéroïdes.


Son utilisation a été rendue plus facile par la mise au point de la monométhylation des tétralones-2 (LIII) au moyen de leur énamine.


Son usage s'est étendu à la synthèse des diterpènes en gem-diméthylant la cétone non saturée (LIV) par l'iodure de méthyle en présence de tertiobutylate de potassium, puis hydrogénation catalytique de la double liaison 5-6.


La face avant de la molécule étant encombrée, l'approche du catalyseur se fait par derrière et conduit à la stéréochimie des diterpènes naturels (jonction trans des cycles A et B) : cette méthode a par conséquent, l'avantage d'être stéréospécifique.


La réduction du groupe carbonyle par les méthodes de Clemmensen ou de Wolff-Kischner fournit le squelette fondamental (XXVII) des diterpènes.


Ce procédé est illustré par la synthèse de l'acide déhydroabiétique, du méthoxy-12 podocarpatriène (XLII) intermédiaire dans la synthèse du ferruginol.


Récemment, le méthoxy-14 podocarpatriène (LV) a été utilisé pour la synthèse totale des pimaradiènes et de produits de dégradation du phyllocladène.


HOWEL et TAYLOR ont utilisé cette méthode pour accéder à la phénanthrénone (LVI). STORK, DAVIES et MEISELS se sont servi de (LVII) comme intermédiaire pour synthétiser le diacétate d'onocérine. TURNER et altri ont utilisé le même intermédiaire pour synthétiser un produit de dégradation de l'acide cassaïque (LVIII)




Une variation de cette méthode a été introduite par WENKERT.


La condensation de l'éthynylméthylcétone et du méthyl-1 naphtol-2 conduit au cétophénanthrol (LIX), cis, que l'on hydrogène puis deshydrate en (LX).




Par carbonation de (LX) avec le sodium triphénylméthyle et le gaz carbonique, puis méthylation et réaction de Clemmensen, on obtient, parmi d'autres isomères, l'acide desoxypodocarpique converti facilement en acide podocarpique par acétylation en 12 et réaction de BAYER-VILLIGER.


c) La troisième méthode peu employée, consiste à bâtir le cycle C sur une décaline constituant les cycles A et B.


WOLFF et LEDERER ont synthétisé l'ambréïnolide suivant le schéma ci-dessous :




Certaines décalones ont été synthétisées comme : intermédiaires, mais leur élaboration est longue et difficile.


Peu de chercheurs ont essayé de cycliser directement une chaîne non saturée acyclique pour obtenir directement les trois cycles A, B et C des diterpènes.


CALIEZI et SCHINZ, s'inspirant des schémas biogénétiques dont il a été question auparavant, ont converti le tétraène-ester acyclique (LXI) en esters tricycliques (LXII a) et (LXII b) par traitement avec l'acide formique contenant un peu d'acide sulfurique.




Il est plus simple de cycliser un noyau benzénique, constituant le cycle C, substitué par une longue chaîne insaturée.


Après la publication de nos travaux, ANSELL et GADSBY ont par traitement par l'acide polyphosphorique de l'alcool (LXIII), obtenu les cis et trans podocarpatriènes isomères (LXIV).





Travaux effectués.


Le travail que nous avons effectué comprend trois parties :


1° Synthèse du podocarpatriène (XXVII) et du méthoxy-13 podocarpatriène (LXV).


2° Synthèse du méthoxy-12 podocarpatriène (XLII).


3° Synthèse du méthoxy-12 isopropyl-13 podocarpatriène (LXVI) (méthyléther du ferruginol) et de la méthoxy-12 méthyl-13 podocarpatriénone-7 (LXVII b) (méthyléther du nimbiol) et étude de la chlorométhylation de quelques cycles benzéniques.


Ces produits sont soit des diterpènes existant à l'état naturel (nimbiol, ferruginol), soit des intermédiaires commodes pour y accéder.


Nous avons d'autre part étudié la formation du méthoxy-14 podocarpatriène (LV) en vue de la synthèse des pimaradiènes et du phyllocladène.


Ce travail, déjà fort avancé, n'est pas exposé ici.




La méthode que nous avons employée est une méthode très simple de double cyclisation : le magnésien d'un bromure de phénylpropyle est condensé avec la méthylhepténone naturelle pour donner l'alcool (LXVIII) que l'on cyclise par l'acide polyphosphorique ou l'acide oxalique en un mélange de podocarpatriènes isomères 5a (jonction des cycles A/B trans) et 5b (cycles A/B cis) et de carbures éthyléniques (tableau E).


La pierre d'achoppement de la méthode était la séparation de ces isomères.


Le dosage des éthyléniques par l'acide perbenzoïque donna des résultats peu encourageants jusqu'au moment où l'on s'aperçut que la méthode n'était pas adaptée, car l'acide perbenzoïque attaque les noyaux fortement substitués comme la méthoxytétraline.


Dans ces cas, le dosage fut effectué avec le tétroxyde d'osmium. Le trans méthoxy-14 podocarpatriène F = 115-116°, a pu être isolé directement du mélange des deux isomères par cristallisation dans le pentane à — 60° avec un rendement de 16 % à partir du bromure de phényl-propyle (il est certainement possible d'améliorer ce rendement par traitement des eaux-mères de cristallisation).


Cette méthode simplifiée n'a pu être utilisée que dans ce cas.


La distillation avec une colonne à bande tournante et la chromatographie sur alumine ont permis dans deux cas de séparer les constituants du mélanges mais ce sont des méthodes longues et ne fournissant pas toujours des produits stéréochimiquement purs.


Finalement, la préparation des isomères trans en quantité appréciable fut effectuée par voie chimique, d'après une observation de WENKERT : par action de l'anhydride chromique en milieu acétique, les composés trans sont oxydés en céto-7 podocarpatriène, les composés cis en dicéto-6,7 podocarpatriène, les éthyléniques donnant des fractions acides.


La séparation par chromatographie est dès lors facile, la monocétone étant éluée avec un mélange hexane-benzène, la dicétone avec un mélange éther-méthanol.




Le choix de l'agent de cyclisation le plus favorable n'a pu être malgré nos efforts dans ce sens, nettement précisé : cela provient de la difficulté d'analyse du mélange réactionnel : les spectres infrarouges des isomères cis et trans étant assez semblables et perturbés par la présence de carbures insaturés, seule la méthode d'oxydation chromique a donné des résultats valables ; l'acide oxalique donne en général un mélange contenant plus de trans mais aussi plus d'éthyléniques.


De plus, la proportion d'isomères trans diminue au fur et à mesure que la température s'élève.


Cette constatation est en accord avec la stabilité relative des deux isomères et laisse supposer l'existence d'un mécanisme concerté.


La cyclisation des alcools (LXVIII a, b, c), fournit, avec un rendement d'environ 60 %, le mélange de podocarpatriènes cis et trans (XXVII), (XLII), (LV) correspondants.


Au contraire, l'alcool (LXVIII d) ne fournit aucun produit défini et les alcools e et f à côté d'une petite quantité de carbures cis cherchés (LXVII e) et (LXVII f) des quantités importantes de produits dont le spectre infrarouge possède une bande d'absorption à 800 cm-1 caractéristique d'un noyau benzénique portant deux hydrogènes vicinaux.


En particulier, le produit de réaction de (LXVIII c) présente les bandes d'absorption dans l'ultraviolet et l'infrarouge données dans la littérature pour le totarol (XV).


Nous n'avons pas encore pu toutefois, nous procurer du totarol authentique pour vérifier cette hypothèse.


Le mécanisme proposé pour expliquer ces faits est le suivant : le premier stade de la réaction serait une déshydratation de l'alcool (LXVIII) pour donner le diène (LXIX) ; la fixation d'un proton sur la double liaison entraînerait un transfert concerté des électrons pour donner l'ion phénonium (LXX).


L'attaque de la double liaison médiane se ferait en deux temps : attaque électrophile par la double liaison protonée suivie d'une attaque nucléophile par le noyau benzénique.


Il s'en suit une addition trans sur la double liaison médiane conduisant à l'isomère trans.




Ce transfert d'électrons est favorisé si le noyau benzénique est substitué en para ou en ortho par des substituants méthoxy donneurs d'électrons et légèrement empêché par un groupe alkyle ou méthoxy en méta.


L'ion phénonium intermédiaire peut se stabiliser par attaque de la liaison 8-10 en 9 ou en 14, ou de la liaison 7-8 en 9 ou en 14 (hypothèses 1, 2, 3 et 4).


Le problème n'a pas d'intérêt pour (LXVIII a).


Dans le cas de (LXVIII b) les hypothèses 1 et 2 sont indifférentes et 3 et 4 ne se produisent pas.


Pour (LXVIII c), seule l'hypothèse 1 est possible, 3 n'ayant pas lieu.


Pour (LXVIII e et f), l'hypothèse 2 est à écarter par suite de l'encombrement stérique résultant entre les groupes méthyle en 10 et alkyle en 13. 1 et 3 ne se produisent pas.


Reste donc l'hypothèse 4 qui conduirait à l'éther méthylique du totarol.









MOTS CLEFS : abiétique / benzénique / chaîne / cis / configuration / constituant / cycle / cyclisation / décaline / décalone / diterpènes / énergie / équilibre / ferruginol / forme / interaction / intermédiaire / isomère / liaison / méthode / méthoxy / méthyle / podocarpatriène / podocarpique / réaction / résultat / stéréochimie / synthèse / trans






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