Documents disponibles au laboratoire de chimie du Muséum National d’Histoire Naturelle,

63 rue Buffon 75005 Paris

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Titres et travaux scientifiques

 

de

 

Darius Molho

Maître de conférences au Muséum National d'Histoire Naturelle

 

 

AVANT - PROPOS

Ce fut l'exemple d'un oncle, qui m'incita à entreprendre des études d'Agronomie. Celles-ci me mirent en contact avec la Nature et me permirent de me familiariser avec l'expérimentation au laboratoire, dans des domaines variés des Sciences Naturelles (Botanique, Microbiologie, etc...) de même que les stages que je pus faire ensuite dans les Laboratoires de Professeurs éminents, que je suis heureux de remercier ici.

 

C'est au cours d'un séjour dans le Laboratoire de Microbiologie des Professeurs GUITTONEAU et CHEVALIER, à l'Institut Agronomique, que j'ai compris l'importance, non seulement de la systématique, mais également de l'étude du chimisme des espèces microbiennes et des biosynthèses qu'elles sont capables de réaliser.

 

Aussi est-ce vers l'étude de la Biochimie, que je me suis tourné en entrant alors au Laboratoire du Professeur JAVILLIER, sous la direction de M.Paul MEUNIER.

 

Ce dernier s'occupait beaucoup, à l'époque, de dosages photométriques de vitamines.  Il me demanda d’améliorer et de rendre plus spécifique un dosage de vitamine E par le ferricyanure, réaction qu'il avait mise au point, peu de temps auparavant. Je fus ainsi amené à entreprendre la synthèse de modèles de la vitamine E.

 

Pour m'initier à la synthèse organique, M. MENTZER m'accueillit au Laboratoire de Chimie thérapeutique, qu'il avait créé, deux ans avant, aux Etablissements Roussel.

 

Ce fut le début d'une collaboration  et d'une amitié qui ont duré vingt-trois ans.

 

Qu'il me soit permis de dire ici toute l'admiration que j'avais pour mon Maître, pour son enthousiasme dans la recherche et sa joie de vivre. Bien souvent j'ai puisé auprès de lui le réconfort et un nouveau courage après des échecs qui sont si courants dans la Recherche Scientifique. Je pense exprimer là le sentiment commun à tous ceux qui furent ses élèves.

 

Lorsque j'entrai dans l'équipe de M. MENTZER, son programme de travail était la recherche d'analogues structuraux d'hormones oestrogènes et d'antivitamines K doués d'activité pharmacologique. Dès lors, je pris une part active à ces travaux, qui nous ont conduit, avec P. MEUNIER, à la synthèse et à la découverte des propriétés anti-coagulantes de la phényl indanedione, devenue sous le nom de Pindione, un médicament très utilisé contre les thromboses. Ce sont d'ailleurs ces recherches qui ont fait l'objet de ma thèse de Sciences.

 

En 1948» admis dans le cadre des chercheurs du C.N.R.S., je rejoignis M. MENTZER au Laboratoire de Chimie biologique de la Faculté des Sciences de Lyon. Le but de nos recherches était alors l'élaboration de méthodes générales de synthèses d'hétérocycles oxygénés. C'est ainsi que nous avons découvert une nouvelle voie d'accès à la structure g-pyronique par la méthode dite "de condensation thermique". Nous avions de la sorte à notre portée les pigments flavoniques, ce qui orienta nos recherches vers la Chimie des Produits Naturels.

 

Nous avions en main des procédés permettant de confirmer, par la synthèse, des structures de composés extraits de la nature; mais il nous était possible également de préparer, par avance, des séries de substances et de les rechercher ensuite dans les végétaux.

 

Effectivement, les collections, que nous avons ainsi constituées, nous ont beaucoup facilité les recherches systématiques et taxinomiques, entreprises plus tard à la suite du développement des méthodes chromatographiques de fractionnement.

 

Cette orientation, prise par notre Laboratoire de Lyon, convenait parfaitement à l'esprit de la Chaire de Chimie du Muséum, où M. MENTZER fut nommé en 1958.

 

II me demanda de le suivre à Paris, tout d'abord comme Maître de Recherche au C.N.R.S., puis comme Sous-Directeur.

 

Là, M. MENTZER me confia le soin d'organiser un service de Synthèse Organique.

 

La Chaire de Chimie du Muséum a pour vocation, depuis sa fondation sous Louis XIII, l’étude des constituants organiques des plantes, en vue d'isoler de nouveaux médicaments utiles "pour le bon peuple de France et de Navarre", comme le spécifiait l'acte de fondation du Jardin du Roy.

 

L'esprit analytique prévalut, au sein de la Chaire, depuis les origines avec DAVISSON jusqu'à SIMON, en passant par ROUELLE, VAUQUELIN et CHEVREUL. Cependant, Marcellin BERTHELOT écrivait, en 1902, dans une Note aux Comptes Rendus de l'Académie des Sciences sur la vie et les travaux de CHEVREUL,:"les opérations décrites par CHEVREUL avec tant de soin, pour définir les espèces chimiques, sont d'ordre purement analytiques, précisément comme les opérations des naturalistes pour définir les espèces vivantes. Il y manque une notion fondamentale, celle de la synthèse, c'est à dire de la puissance créatrice de la Chimie sur laquelle a reposé tout son progrès, je dirais même tout son rêve, depuis les origines de notre science."

 

Il semble bien que cette remarque ait été suivie d'effet ; les successeurs de CHEVREUL à la Chaire de Chimie, ARNAUD, SIMON, FOSSE, SANNIE et MENTZER, ont consacré une partie de leurs travaux à la synthèse organique.

 

Il semble très souhaitable que cette double activité, analyse et synthèse, soit poursuivie à l'avenir.

 

L'avènement des méthodes modernes d'investigation, qui permettent d'abord un fractionnement des plus minutieux par chromatographie, puis la détermination des structures, par la spectrographie U.V., I.R., de R.M.N., de masse, le dichroïsme circulaire..., a rénové la Chimie extractive et l'a rendue particulièrement féconde.

 

Cependant, la chimie des produits naturels, comme l'ont remarqué de grands chimistes, tels BARTON, WOODWARD, etc.., est particulièrement passionnante. Elle intéresse les domaines les plus actuels de la Chimie mécanismes réactionnels, problèmes de stéréochimie, qui éclairent d'un jour nouveau les réactions classiques de la Chimie organique.

 

De plus les modes de formation, au sein de la plante, des produits naturels, bien que s'effectuant par des processus enzymatiques, fort éloignés des méthodes utilisées par des chimistes organiciens, peuvent néanmoins servir de modèles pour l'élaboration de nouvelles synthèses. Parfois, au contraire, c'est la synthèse chimique qui peut permettre d'élucider un mécanisme biogénétique : ainsi, à la suite de travaux purement chimiques de ALGAR et MAC KEMA, sur une transposition avec migration d'aryle des époxydes de chalcones en milieu acide, GRISEBACH a montré que la biosynthèse des isoflavones se réalisait, in vivo, par une migration d'aryle.

 

Depuis mon arrivée au Muséum, j'ai organisé mon Service en trois groupes de chercheurs qui, d'ailleurs, collaborent les uns avec les autres.

 

Un groupe s'occupe de synthèse organique de produits naturels ou apparentés par des méthodes nouvelles, parfois inspirées par des processus biogénétiques. Nous étudions aussi les mécanismes de ces réactions, les isomérisations et certaines réactions de chimie organique.

 

Un deuxième groupe, utilisant les produits ou les séries de produits que nous a fourni la synthèse, les recherche dans la nature. C'est ainsi que nous avons caractérisé ou isolé des furocoumarines dans divers Heracleum, des périnaphténones dans les Pénicilliées de type Herquei et les acides aryl polyéthyléniques dans les Pipéracées. Ces recherches sont faites, soit dans un but taxinomique, soit, plus exhaustives, pour mettre en évidence les filiations et passages biogénétiques possibles des produits les uns aux autres.

 

Enfin, ayant toujours été intéressé par la Biochimie dynamique, à laquelle j'ai consacré régulièrement une partie de mon activité, j'ai demandé à l'un de mes collaborateurs de mettre au point plusieurs tests d'essai d'activité phytohormonale (antiauxine,  inversion du géotropisme, abscission, etc..).

 

Nous mesurons en ce moment, en particulier, les effets d'abscission sur la tige du coton d'une série d'acides diéniques, dont nous étudions, par ailleurs, la synthèse.

 

L'organisation du Laboratoire du Muséum, suivant ces trois axes de recherches, me semble tout à fait souhaitable et conforme à l'esprit de Notre Maison.

 

C'est d'ailleurs, dans les grandes lignes, la structure actuelle de la Chaire, telle que l'a voulue M. MENTZER.

 

II existe, en effet, des groupes de Recherches de Chimie de synthèse, de Chimie d'extraction et de Biochimie dynamique. Et cette structuration a été approuvée par le C.N.R.S., qui nous a nommé Laboratoire Associé.

 

De plus deux services, existant déjà, me semblent particulièrement intéressants à développer.  Ce sont :

 

- Le Service du Radiocarbone.

Parfaitement équipé en matériel, ce Service manque de personnel. Il serait souhaitable de pouvoir réorganiser ce Laboratoire qui peut nous permettre des travaux tout à fait intéressants de biogénèse.

 

- Le Service de Mesures Physiques.

L'équipement que nous possédons est important et moderne. Nous pensons recevoir, dans les prochains mois, du C.N.R.S., un spectrographe de masse, appareil rare encore dans les laboratoires et qui nous rendra de grands services.  De plus, nous venons de commander, pour améliorer notre spectrographe de R.M.N, un découpleur de spins, appareil particulièrement efficace pour la détermination de certaines structures.

 

Il me semble souhaitable d'envisager, pour l'avenir, l'achat d'un dispositif de R.P.E. pour l'étude des radicaux libres et des réactions radicalaires.

 

Notre Service de Physique, riche encore de deux chromatographes en phase gazeuse, d'un analyseur d'acides aminés, de spectrographes I.R., U.V. et de polarimètres, est tout à fait important et efficace et il est indispensable de le maintenir à jour.

 

Je pense souhaitable de créer ou de maintenir des liens avec d'autres Laboratoires du Muséum. Par le matériel qu'ils nous fournissent, ils nous permettent des travaux spécifiques à notre Maison, travaux qui, en échange, leur apportent un enrichissement dans leurs propres recherches et dans leurs connaissances.

 

Dans ce sens, nous avons, en relation avec le Laboratoire de Cryptogamie de M. le Professeur HEIM, étudié une série de Pénicillium et souhaitons continuer des recherches dans ce sens, autant que possible.

L'an dernier, trois chercheurs de notre Laboratoire ont fait un stage à la Jaysinia à Samöens, d'où ils ont rapporté de nombreuses plantes dont ils poursuivent l'étude. Nous envisageons pour l'avenir, en accord avec M. le Professeur HAMEL, des études de biogenèse de xanthones, à l'aide de 14C, dans Gentiana kochana, cultivée dans les jardins de la Jaysinia.

 

Enseignement

Dans le cadre de son enseignement, M. MENTZER me confiait environ deux conférences par an sur des sujets très spécialisés, souvent sur des travaux personnels.

 

Je pense, qu'en plus du cours magistral du Professeur, il est très important d'inclure, dans le programme de l'enseignement, un certain nombre de conférences de Professeurs ou de Chercheurs, français ou étrangers, sur leurs travaux personnels ayant un rapport avec nos lignes de travail.

 

Un autre aspect de l'enseignement, que nous pratiquons au Laboratoire, est la préparation de diplômes d'Etudes Supérieures, de thèses de 5ème cycle, de thèses d'Etat ou d'Université.

 

Tous les quinze jours, un séminaire réunit les chercheurs et, à tour de rôle, chacun parle de son travail en cours ; une discussion suit l'exposé. Ce procédé est riche d'enseignement : il apprend à l'élève à parler en public, à présenter ses résultats et ses idées avec clarté, enfin, la discussion permet souvent d'enrichir son travail et celui de ses camarades.

 

De telles réunions contribuent à créer un climat d'équipe et de camaraderie.

Bibliothèque

Nous avons une riche bibliothèque. Il me semble donc essentiel de maintenir les abonnements, voire d'en augmenter le nombre. Grâce à la ténacité de M. MENTZER et la compétence de Mme FATIANOFF, un important fichier de produits naturels d'extraction (hormis les alcaloïdes) a été constitué depuis 1959 et il est maintenu à jour constamment. C'est un outil de travail très utile. La diffusion de ce fichier est faite, dans le public, par les "Actualités de Phytochimie fondamentale" qui paraissent tous les deux ans.

 

Aussi longtemps qu'il sera, matériellement, possible de le faire, il me semble souhaitable de maintenir cette publication dont aucun homologue n'existe, (sauf quelques gros manuels, Hegnauer, Karrer, difficiles à mettre à jour) et ceci tant pour son utilité que pour le souvenir de M. MENTZER, qui attachait un grand prix à cette partie de son oeuvre.






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